CONSEIL DE SÉCURITÉ : Non à une justice internationale à deux vitesses

Index AI : IOR 40/013/02

Amnesty International estime qu’il ne devrait pas y avoir deux poids deux mesures dans la justice internationale, et que personne ne devrait bénéficier d’une immunité pour des crimes tels que le génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, quelles que soient les circonstances. L’organisation a appelé aujourd’hui (lundi 1er juillet 2002) les États-Unis à revenir sur leur position, qui consiste à demander que leur personnel ne relève pas de la compétence de la Cour pénale internationale. Le Statut de Rome de cette Cour entre en vigueur aujourd’hui.

Lors de la réunion du Conseil de sécurité du 30 juin, les États-Unis ont mis leur veto à la prolongation de la Mission des Nations unies en Bosnie-Herzégovine (MINUBH) pour protester contre le refus qui avait été opposé à leur demande d’immunité. Ils ont ensuite accepté que cette mission soit prolongée de soixante-douze heures pour permettre la tenue de nouvelles discussions.

" Nous saluons la fermeté dont ont fait preuve les autres membres du Conseil de sécurité, et nous les appelons, ainsi que tous les autres pays engagés dans la lutte contre l’impunité pour les auteurs des pires crimes qui puissent exister, à continuer de soutenir pleinement la Cour pénale internationale ", a déclaré Amnesty International.

" La position des États-Unis menace l’intégrité du système judiciaire international dans son ensemble et remet en question l’applicabilité universelle d’un de ses principes les plus fondamentaux,qui consiste à n’accepter aucune immunité pour des crimes tels que le génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité ", a ajouté l’organisation en soulignant que la question allait bien au-delà du simple sort de la MINUBH ou même de la Cour pénale internationale.

Les Conventions internationales de Genève de 1949 demandent déjà aux pays de rechercher les auteurs des crimes de guerre les plus graves, quels que soient leur rang ou leur nationalité, et autorisent les États à traduire ces auteurs en justice devant leurs propres tribunaux. Or, ces Conventions sont depuis longtemps ratifiées par la quasi-totalité des pays, y compris par les États-Unis. Par ailleurs, la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide [ONU, 1948] exclut aussi toute immunité pour les personnes soupçonnées d’un tel crime. Amnesty International estime que les mêmes principes s’appliquent aux crimes contre l’humanité.

" Les préoccupations exprimées par les États-Unis sont totalement déplacées ", a affirmé Amnesty International.

Le Statut de Rome de la Cour pénale internationale contient des garanties solides contre les poursuites motivées par des raisons politiques et non fondées. Parmi ces garanties figure la présence d’un procureur indépendant élu par les États parties. Ce procureur aura besoin de l’autorisation d’un collège de juges pour ouvrir une enquête. Par ailleurs, le Conseil de sécurité aura le pouvoir de suspendre toute enquête. Enfin, la Cour pénale internationale n’agira que quand les tribunaux nationaux n’auront pas la capacité ou la volonté de le faire.

Le fait de ne pas prolonger le mandat de la MINUBH jusqu’au 31 décembre 2002, date à laquelle il est prévu que ses fonctions relatives à la formation des policiers soient reprises par une mission de police de l’Union européenne, entraînerait une rupture majeure des efforts internationaux destinés à aider au rétablissement des forces de police bosniaques. Une telle décision menacerait aussi la crédibilité de l’ensemble du travail mené par la communauté internationale en Bosnie-Herzégovine depuis des années, travail marqué par un investissement considérable en hommes et en autres ressources, et dans lequel les États-Unis eux-mêmes ont joué un rôle prépondérant.

Par ailleurs, l’opposition des États-Unis à la compétence de la Cour pénale internationale à l’égard de la Bosnie-Herzégovine est en contradiction avec le fait que les autorités américaines aient reconnu le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie. En effet, celui-ci exerce déjà sa compétence sur ce pays pour des crimes similaires à ceux qui figurent dans le Statut de Rome.

À ce jour, 74 pays – dont la Bosnie-Herzégovine – ont ratifié le Statut de Rome, et de nouvelles ratifications sont attendues dans les prochains jours. Les pays ayant ratifié ce Statut vont élire le premier procureur et les 18 juges de la Cour pénale internationale.

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