Justice internationale pour les victimes du... par AmnestyBE
Par Rachel Campbell, chargée de campagne d’Amnesty International pour Israël et les Territoires palestiniens occupés
Aujourd’hui, le Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU se réunit pour commencer à débattre d’un rapport crucial sur les graves lacunes des enquêtes israéliennes et palestiniennes sur les violations graves du droit international commises durant le conflit 2008-2009 dans la bande de Gaza et le sud d’Israël.
À la fin de la semaine il va voter une résolution sur ce que devrait être la prochaine étape. Notre voeu : mettre fin à un déni de justice depuis deux ans et prendre en compte les victimes du conflit - cette fois au niveau international ? ? Le rapport qui sera débattu cette semaine est le deuxième d’un comité d’experts indépendants auxquels le Conseil a demandé une évaluation des enquêtes nationales.
Dans le rapport, publié vendredi dernier, le comité a conclu pour la deuxième fois qu’Israël n’a pas mené réellement d’enquête transparente, claire, sur les agissements des dirigeants civils et militaires qui ont planifié et ordonné ces opérations militaires, et sur des violations présumées du droit international pendant le conflit.
Le comité a également constaté que les autorités du Hamas n’ont pas réussi à mener des enquêtes sur les actions des groupes armés palestiniens, notamment les tirs de roquettes sur Israël.
Fait important, le comité a noté que les besoins des victimes n’ont pas encore été abordés. Ils citent un habitant de Gaza décrivant les enquêtes israéliennes comme « superficielle, pas significative, et trompeur pour la communauté internationale."Cet habitant ajoute "nous sommes des civils et des innocents" .
Une femme israélienne, une victime des attaques à la roquette dans le sud d’Israël, a exprimé sa frustration quand elle a dit : « Je n’ai pas de tribunal, je n’ai personne pour me représenter, personne pour poursuivre. Est-ce une vraie justice ? "
Vendredi dernier, Amnesty International a également publié sa propre évaluation de la mise à jour des enquêtes israéliennes et palestiniennes, ainsi que ses recommandations pour ce qui devrait se passer.
L’évaluation réitère notre point de vue, partagé par d’autres organisations des droits de l’homme, que plus de deux ans après le conflit, Israël et les autorités du Hamas ont omis de procéder à des enquêtes crédibles, indépendantes et conformes aux normes internationales.
Les ravages causés par ce conflit ont été sans précédent : plus de 1.400 Palestiniens, en majorité des civils, ont été tués par les forces israéliennes à Gaza, et beaucoup d’autres ont été blessés. Trois civils israéliens ont été tués par des roquettes tirées sans discernement par des groupes armés palestiniens.
En Septembre 2009, le rapport de la mission d’établissement des faits de l’ONU sur le conflit de Gaza, dirigée par le juge Richard Goldstone, a constaté que les deux parties avaient commis des crimes de guerre et actes pouvant être qualifiés de crimes contre l’humanité , et a appelé les deux parties à mener des enquêtes crédibles, indépendantes dans un délai de six mois.
Lorsque l’évaluation d’Amnesty International a été publiée, notre appel pour une action demandant au Conseil des droits de l’homme que la justice pour les victimes soit une réalité - et non pas seulement une aspiration - a rassemblé 108 927 signatures depuis son lancement en Janvier.
La pétition d’Amnesty International invite le Conseil des droits de l’homme à voter pour une action efficace en vue de mettre fin à l’impunité pour les crimes commis pendant le conflit.
Simultanément, les membres d’Amnesty International signalent à leurs gouvernements - y compris les membres du Conseil des droits de l’homme - que, après deux années d’inaction, il est suffisamment clair que ni les Israéliens ni les autorités du Hamas n’ont l’intention de mener des enquêtes crédibles et de traduire les coupables en justice .
Nous demandons instamment au Conseil des droits humains à adopter une résolution efficace notifiant au Conseil de sécurité de déférer la situation à la Cour pénale internationale, parce que nous croyons que c’est la seule façon de garantir la justice pour les victimes palestiniennes et israéliennes.
Les événements récents ont démontré qu’une telle mesure est possible. Le mois dernier le Conseil de sécurité a déféré la situation en Libye au Procureur de la Cour pénale internationale.
Cette décision rapide a permis de souligner la réticence de la communauté internationale au cours des deux dernières années pour lutter contre l’impunité pour les crimes commis pendant le conflit de Gaza. Deux poids, deux mesures sont inacceptables ; l’ONU doit faire preuve de cohérence et doit prendre les mêmes mesures de justice pour les victimes à Gaza et le sud d’Israël.
La semaine dernière, l’Organisation de la Conférence islamique a proposé a proposé au Conseil des Droits de l’Homme d’envisager un projet de résolution au nom de l’Autorité palestinienne. Fait inquiétant, elle est insuffisante et risque d’entraver le processus vers la justice internationale à mons qu’elle ne soit est modifiée de façon substantielle.
Le projet de résolution recommande que le rapport de la mission d’enquête de l’ONU , publié depuis un an et demi, soit renvoyé à nouveau à l’Assemblée générale des Nations Unies. Mais le rapport Goldstone a déjà été approuvée par l’Assemblée générale en Novembre 2009 !
Pour prendre des mesures efficaces, le Conseil des droits de l’Homme doit maintenant transmettre le rapport du comité des experts indépendants à l’Assemblée générale, qui peut déférer la situation du conflit de Gaza au Conseil de sécurité, organe le plus puissant de l’ONU.
En outre, la résolution de l’Organisation de la Conférence islamique est unilatérale, car elle ne traite que des violations commises par Israël tout en ignorant le fait que le Hamas et d’autres groupes armés palestiniens ont tiré des roquettes aveugles sur le sud d’Israël. Toute résolution efficace doit s’appliquer aux deux côtés, elle ne peut pas être sélective.
Les membres d’Amnesty International ont fait tous les efforts pour convaincre les membres du Conseil des droits de l’homme qu’ils doivent utiliser cette ultime chance de faire en sorte que les victimes palestiniennes et israéliennes du conflit puissent enfin obtenir justice.
Ils doivent tenir compte des conclusions du comité d’experts indépendants, condamner le refus des autorités israéliennes et du Hamas d’enquêter sur des crimes graves de droit international et de poursuivre les auteurs présumés, et adopter une résolution qui permettra de fournir une solution de justice internationale pour les victimes.
Vidéo : Amnesty International Philip Luther sur la nécessité pour la justice internationale pour les victimes du conflit à Gaza