L’objectif mondial, fixé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), d’un taux de vaccination s’élevant à 70 % dans chaque pays d’ici à juillet 2022, ne sera pas atteint - loin s’en faut. Les compagnies pharmaceutiques continuent à empêcher un accès équitable aux vaccins contre le Covid-19, en monopolisant la technologie, en dressant des obstacles et en exerçant des pressions contre le partage de propriété intellectuelle, en facturant les vaccins à des prix élevés, et en les réservant en priorité aux pays riches.
Amnesty International exhorte tous les investisseurs institutionnels, notamment Baillie Gifford, Bank of America, Bank of NY Mellon, BlackRock, Capital Group, Morgan Stanley, State Street, UBS, Vanguard Group et Wellington Management, à tirer parti de ces Assemblées générales annuelles afin de demander qu’AstraZeneca, Johnson & Johnson, Moderna et Pfizer assument leurs responsabilités en matière de droits humains. Ils doivent également voter en faveur de résolutions d’actionnaires ayant pour objectif de favoriser la distribution universelle de vaccins contre le Covid-19, et interroger le conseil d’administration de chaque entreprise à propos des mesures prises afin d’atteindre les objectifs fixés par l’OMS en termes de vaccination.
« Les entreprises pharmaceutiques ont des responsabilités sur le terrain des droits humains, mais continuent pourtant à fortement contribuer aux inégalités scandaleuses en matière de distribution des vaccins dans le monde. Pendant qu’elles et leurs investisseurs engrangeaient des bénéfices record grâce aux vaccins contre le Covid-19, les pays à revenu faible ont reçu une toute petite fraction des stocks mondiaux et enregistré un nombre de décès disproportionné », a déclaré Mark Dummett, responsable à Amnesty International de l’équipe Responsabilités des entreprises en matière de droits humains.
« Si les investisseurs institutionnels ont tiré de vastes avantages de ce mercantilisme et de cette vision à court terme, ils ont le devoir de veiller à ce que leurs profits ne contribuent pas à des violations des droits humains. Les Assemblées générales qui s’annoncent représentent une occasion parfaite pour eux de rectifier la trajectoire, en usant de leur influence considérable afin de peser sur les agissements de ces entreprises. Elles doivent interpeller le conseil d’administration de chaque entreprise et soutenir les résolutions d’actionnaires susceptibles de provoquer un changement de cap attendu de longue date, qui ferait passer les personnes avant les profits. »
« 65,1 %des habitant·e·s du monde avaient reçu au moins une dose de vaccin contre le Covid-19, mais seulement 15,2 % des personnes issues des pays à revenu faible pouvaient en dire autant »
Amnesty International exhorte l’ensemble des investisseurs institutionnels de Johnson & Johnson, Moderna et Pfizer à voter en faveur de la résolution d’actionnaires présentée par Oxfam Amérique, qui demande l’envoi de rapports aux actionnaires portant sur le transfert des technologies utilisées dans la production de vaccins contre le Covid-19, qui permettrait à des fabricants dans les pays à revenu faible et à revenu intermédiaire de tranche inférieure de produire des vaccins. Il s’agirait là d’une avancée importante dans le but d’inciter le conseil d’administration de chacune de ces entreprises à changer de cap et à en faire plus pour que les vaccins parviennent jusqu’aux pays à revenu faible et à revenu intermédiaire de tranche inférieure, où le taux de vaccination reste très bas.
Selon la publication Our World in Data, au 25 avril 2022, 65,1 %des habitant·e·s du monde avaient reçu au moins une dose de vaccin contre le Covid-19, mais seulement 15,2 % des personnes issues des pays à revenu faible pouvaient en dire autant.
Amnesty International demande aussi aux investisseurs institutionnels de faire preuve de toute la diligence requise sur le terrain des droits humains en ce qui concerne leurs investissements, notamment en effectuant un suivi continu de l’impact des politiques de répartition des vaccins contre le Covid-19 de ces entreprises. Ils doivent aussi agir sans délai pour prévenir les impacts négatifs, réduire les risques, réparer les préjudices constatés, et rendre les résultats publics.
Complément d’information
En février 2022, Amnesty International a diffusé un rapport intitulé Quand l’argent dicte les décisions : La réponse des entreprises pharmaceutiques à la crise des vaccins anti-COVID, qui présentait une évaluation des principaux fabricants de vaccins : AstraZeneca plc, BioNTech SE, Johnson & Johnson, Moderna Inc., ainsi que Pfizer Inc. Pfizer et Moderna se trouvaient en queue du classement.
En 2021, Pfizer/BioNTech et Moderna ont projeté des revenus allant jusqu’à 54 milliards de dollars américains, et pourtant, moins de 2 % de leurs vaccins ont été envoyés à des pays à revenu faible. Johnson & Johnson a effectué une meilleure distribution, 50 % de ses stocks ayant été envoyés à des pays à revenu faible ou à revenu intermédiaire inférieur (bien qu’un grand nombre de doses aient été fournies à titre de « dons » par des pays à revenu élevé et non pas dans le cadre d’accords commerciaux). L’entreprise refuse toujours de partager sa technologie et sa propriété intellectuelle dans le cadre des initiatives coordonnées par l’OMS et abandonne maintenant son modèle tarifaire sans but lucratif.
À l’approche des Assemblées générales annuelles d’avril 2022, Amnesty International a écrit à plus de 30 institutions ayant réalisé des investissements dans les entreprises fabriquant le vaccin du Covid-19, en les appelant à user de leur influence considérable afin de faire pression sur les entreprises pharmaceutiques, dans le but de les inciter à supprimer les obstacles empêchant d’atteindre l’objectif de l’OMS, un taux de vaccination fixé à 70 %. Le total des investissements auprès des fournisseurs de vaccins effectués ou gérés par ces 10 institutions financières s’élève à plus de 250 milliards de dollars des États-Unis.