Communiqué de presse

Crise des réfugiés syriens - L’action de l’Union Européenne est insuffisante

Les violences et les atteintes aux droits humains ne semblent pas près de cesser en Syrie. Partant de ce constat, Amnesty International, la Commission des églises auprès des migrants en Europe (CEME), le Conseil européen pour les réfugiés et les exilés (CERE) et la Commission internationale catholique pour les migrations (CICM) demandent aux ministres européens de la Justice et des Affaires intérieures d’agir immédiatement pour aider les réfugiés fuyant la Syrie.

Les réfugiés de la Syrie dans les pays voisins

À ce jour, plus de 620 000 réfugiés ont fui vers les pays voisins et l’Afrique du Nord pour échapper au conflit sanglant qui a fait au moins 60 000 morts jusqu’à présent, selon les chiffres des Nations unies. Au moins deux millions d’autres personnes ont été déplacées de leurs foyers en Syrie. Les civils de ce pays sont les principales victimes de violations du droit international humanitaire et des droits humains commises par les différentes parties au conflit.

Beaucoup de ceux qui ont réussi à fuir en traversant les frontières rencontrent des difficultés extrêmes dans des conditions hivernales rigoureuses, comme l’ont illustré les récentes inondations des camps de réfugiés en Jordanie. Près de deux ans après le début du conflit, la région est le théâtre d’une crise humanitaire de très grande amplitude. Les réfugiés, dont beaucoup sont des femmes et des enfants traumatisés par ce qu’ils ont vécu en Syrie, luttent chaque jour pour accéder aux services de base (le logement, la santé, l’eau, les infrastructures sanitaires et l’éducation primaire, entre autres).

Face à cette crise, l’ONU a lancé un plan de réponse régional et recherche 1 milliard de dollars US pour prendre en charge jusqu’à un million de réfugiés syriens au cours de la première moitié de 2013.

Les pays voisins de la Syrie - l’Irak, la Jordanie, le Liban et la Turquie - continuent de recevoir et d’accueillir un grand nombre de personnes, mais leurs ressources sont mises à rude épreuve et on ne sait pas exactement combien de réfugiés ils peuvent accueillir. Ces pays ont déjà soulevé des préoccupations légitimes concernant la forte pression sur leurs ressources, ainsi que les troubles potentiels et l’instabilité qu’un tel afflux peut provoquer.

Il est urgent que l’Union européenne (UE) réponde de manière décisive et efficace pour protéger les réfugiés fuyant la Syrie, dans la région et en Europe. Autrement, les pays d’accueil dans la région pourraient refuser les réfugiés et imposer des conditions inacceptables à ceux qu’ils ont déjà accueillis.

Réfugiés syriens dans l’UE

D’avril 2011 à octobre 2012, quelque 23 500 Syriens ont demandé l’asile à l’UE, dont 15 000 d’entre eux à l’Allemagne et à la Suède. De nombreux pays de l’UE ont accordé une certaine protection aux réfugiés syriens, mais le traitement et le niveau de protection varient considérablement d’un pays de l’UE à l’autre.

De nombreux Syriens arrivent en Europe par la Grèce. Ceux qui cherchent asile en Grèce font face à des obstacles majeurs concernant l’enregistrement de leur demande. Sur les 214 demandes d’asile de ressortissants syriens soumises entre janvier et octobre 2012, un seul candidat a obtenu le statut de réfugié, et cinq autres ont bénéficié d’une protection subsidiaire. Certains Syriens essayant d’entrer en Grèce ont déclaré qu’ils avaient été refoulés en Turquie par les autorités grecques.

À Chypre, les autorités auraient refusé d’étudier les dossiers de Syriens qui voulaient que leurs demandes soient réexaminées. Dans certains pays situés aux frontières orientales de l’UE, les refus atteignent 50 %, et un grand nombre de Syriens sont donc laissés dans une situation indéfinie. Plusieurs pays de l’UE continuent de détenir des ressortissants de la Syrie.

Recommandations à l’Union européenne et à ses États membres

L’UE et ses États membres ont reconnu l’ampleur et l’urgence de la situation et donc augmenté leur aide aux pays de la région pour répondre à cette crise humanitaire. Mais l’UE doit encore considérablement amplifier son action en la matière.

L’UE doit adopter une approche commune pour les personnes fuyant la Syrie. Tous les Syriens doivent être autorisés à entrer en Europe et être considérés comme ayant besoin d’une protection internationale. Ces personnes doivent bénéficier d’un accès immédiat à des procédures d’asile équitables et efficaces. Selon le HCR, les civils syriens, et d’autres qui vivent en Syrie, y compris des Palestiniens, sont susceptibles de répondre à la définition du réfugié selon la Convention de 1951. La plupart des personnes qui ont fui la Syrie doivent être considérées comme des réfugiés et donc bénéficier des droits qui en résultent, y compris du droit au regroupement familial.

Conformément aux recommandations du HCR, tous les retours vers la Syrie et les pays voisins doivent être suspendus jusqu’à ce que la sécurité du pays et sa situation en matière de droits humains se soient suffisamment améliorées pour permettre un retour sûr, digne et durable.

Les Syriens présents dans l’UE, quel que soit leur statut d’immigration (y compris les demandeurs d’asile déboutés), doivent être autorisés à faire ou à refaire une demande d’asile, compte tenu de la terrible dégradation des droits humains en Syrie depuis le début du conflit.

La détention ne doit pas être utilisée, sauf dans des circonstances très exceptionnelles et uniquement en dernier recours.

L’UE et ses États membres doivent veiller à ce que les personnes arrivant dans l’UE en provenance de la Syrie bénéficient d’une protection efficace. L’UE et ses États membres doivent par ailleurs envisager d’urgence d’autres mesures concrètes visant à partager les responsabilités et à aider les pays voisins de la Syrie qui accueillent la majorité des réfugiés. Ces mesures concrètes comprennent :

  • Des dons généreux au plan de réponse de l’ONU concernant la crise syrienne.
  • Une offre importante de possibilités de réinstallation d’urgence pour les réfugiés les plus vulnérables qui fuient la Syrie, et se trouvent actuellement dans les pays voisins. La priorité doit être donnée, mais sans s’y limiter, à ceux qui ont besoin d’un traitement médical, aux femmes en danger, aux mineurs non accompagnés, aux réfugiés âgés ou handicapés, aux personnes en danger pour leur implication dans des activités pacifiques humanitaires ou autres, ainsi qu’aux victimes de torture et de violences.
  • L’établissement et l’expansion des programmes de réinstallation pour accueillir des Irakiens et d’autres personnes de pays tiers (réfugiés de l’Afghanistan, de la Somalie et du Soudan, par exemple) qui vivaient en Syrie au début du conflit et sont actuellement piégées par les violences en Syrie.
  • L’anticipation d’une situation d’urgence humanitaire de longue durée afin de fournir un soutien continu et de l’aide aux pays voisins qui reçoivent des arrivées massives et soudaines de réfugiés.

Nous demandons à la réunion des ministres de Dublin de tenir compte de nos appels et de prendre des engagements concrets pour aider et protéger ceux qui ont réussi à échapper au conflit dévastateur en Syrie.

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