Communiqué de presse

Cuba. Aperçu de la situation des droits humains

Détention arbitraire de courte durée

Des manifestants pacifiques et des défenseurs des droits humains sont régulièrement détenus pour avoir exercé leurs droits aux libertés d’expression, d’association, de réunion et de circulation.

Les autorités incarcèrent souvent des militants pour les empêcher de participer à des manifestations publiques ou à des réunions privées. Les journalistes indépendants qui dénoncent ces détentions sont harcelés par les autorités ou se retrouvent derrière les barreaux. Les familles des détenus ignorent généralement où se trouvent ces derniers.

La Commission cubaine des droits humains et de la réconciliation nationale (CCDHRN) a relevé 768 placements en détention motivés par des considérations politiques rien qu’en août 2015 – contre 674 le mois précédent.

Harcèlement et « actes de répudiation »

En vertu de lois punissant les « troubles à l’ordre public », les « outrages », l’« irrespect », la « dangerosité » et les « agressions », les autorités traduisent en justice des opposants, dont beaucoup font alors l’objet de poursuites pénales sous-tendues par des considérations politiques et sont aussi victimes d’autres formes de harcèlement.

Les actes de répudiation sont des manifestations orchestrées par le gouvernement qui ont généralement lieu devant le domicile de détracteurs du gouvernement, et auxquelles participent des partisans du régime, des représentants de l’État et des agents des forces de l’ordre. La police est généralement présente mais reste passive devant ces agressions.

Restrictions juridiques aux libertés d’expression et de réunion

Les autorités cubaines utilisent abusivement certaines lois pour harceler et incarcérer des militants.

Elles s’appuient notamment sur l’article 91 du Code pénal, qui prévoit des peines de 10 à 20 ans d’emprisonnement pour toute personne qui, « dans l’intérêt d’un État étranger, commettrait un acte en vue de porter atteinte à l’indépendance ou à l’intégrité territoriale de l’État cubain ».

D’après l’article 72, « une personne sera considérée comme dangereuse si elle montre une propension à commettre des infractions illustrée par une conduite en contradiction manifeste avec les normes morales du socialisme » et l’article 75.1 dispose qu’un policier est habilité à formuler un avertissement s’il constate une telle « dangerosité ». Une personne peut-être déclarée dangereuse de manière totalement sommaire, ce dont les autorités se servent de plus en plus pour incarcérer des détracteurs du gouvernement.

La Loi pour la protection de l’indépendance nationale et de l’économie de Cuba, ou Loi n° 88, limite encore davantage l’exercice des droits civils et politiques. Elle prévoit des peines d’emprisonnement allant jusqu’à cinq ans pour collaboration avec des stations de radio, des chaînes de télévision ou des publications considérées comme favorables à la politique américaine.

Elle prévoit en outre des peines d’emprisonnement de sept à 15 ans pour toute transmission aux États-Unis d’informations susceptibles de servir à soutenir des mesures anti-cubaines, comme le blocus économique maintenu par les États-Unis. Elle interdit également de détenir, diffuser ou reproduire des « documents subversifs » émanant du gouvernement américain.

La Constitution limite aussi le droit à la liberté d’expression. En effet, l’État a le monopole des médias : télévision, radio, presse, fournisseurs d’accès à Internet et autres moyens de communication électroniques. L’article 53 de la Constitution reconnaît et encadre la liberté de la presse mais interdit explicitement que les médias soient gérés par des sociétés privées.

Restriction de la liberté d’association

À Cuba, tous les syndicats, organisations de défense des droits humains et associations civiques ou professionnelles qui ne sont pas contrôlés par le gouvernement sont considérés comme illégaux.

Aux termes de l’article 208 du Code pénal, les membres d’organisations dépourvues de statut officiel peuvent être condamnés à des peines d’emprisonnement allant d’un à trois mois et les dirigeants, quant à eux, sont passibles de trois à neuf mois d’emprisonnement.

Indépendance du pouvoir judiciaire et droit à un procès équitable

À Cuba, le pouvoir politique a la mainmise sur le système judiciaire, ce qui met à mal le droit à un procès équitable.

Le président, le vice-président et les autres juges de la Cour suprême populaire, ainsi que le procureur général et son substitut sont élus par l’Assemblée nationale.

Les avocats de la défense sont employés par le gouvernement et hésitent donc à contester les éléments présentés par les procureurs ou par les services de renseignement de l’État.

Réformes de la législation sur les migrations

Les modifications de la législation sur les migrations qui sont entrées en vigueur en janvier 2013 constituent une avancée. Entre autres mesures, les autorisations de sortie obligatoires ont été supprimées, ce qui permet à tous les Cubains, y compris aux défenseurs des droits humains et aux détracteurs du gouvernement, de se rendre plus facilement à l’étranger.

Toutefois, les 15 prisonniers d’opinion placés en détention au moment de la répression de la dissidence menée en mars 2003, et qui ont choisi de rester à Cuba plutôt que d’être exilés en Espagne en 2011, ne sont pas concernés. Ayant bénéficié d’une libération conditionnelle en 2010, ils purgent le reste de leur peine hors de prison. À la connaissance d’Amnesty International, aucun d’eux n’est autorisé à quitter le territoire.

Embargo des États-Unis

En septembre 2015, les États-Unis ont reconduit l’application de la Loi relative au commerce avec l’ennemi, qui impose des sanctions financières et économiques à Cuba.

Amnesty International a appelé à maintes reprises le gouvernement américain à lever cet embargo, qui a des effets fortement préjudiciables sur tout un éventail de droits économiques, sociaux et culturels, comme le droit à l’alimentation, à la santé et à l’assainissement.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS), le Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF) et d’autres organismes des Nations unies ont signalé les effets négatifs de l’embargo sur la santé et le bien-être des Cubains compte tenu de l’impossibilité d’obtenir du matériel médical, des médicaments et des équipements de laboratoire fabriqués sous brevets américains.

Bien qu’il incombe en premier lieu à l’État cubain de respecter, de protéger et de concrétiser les droits humains dans le pays, Amnesty International est convaincue que l’embargo maintenu par les États-Unis contribue à empêcher les Cubains de jouir de certains droits civils et politiques essentiels en faisant perdurer une situation dans laquelle des droits fondamentaux comme les libertés d’expression, d’association et de réunion continuent d’être bafoués systématiquement.

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