Du fait de l’aide financière insuffisante et décroissante apportée par la communauté internationale dans le cadre des programmes de redressement et du fait de la lenteur des efforts de reconstruction des gouvernements dans ces trois pays, des personnes sont bloquées dans des habitats de fortune, exposées à des maladies comme le choléra et, parfois, privées de tout accès aux routes.
« Un an après le passage dévastateur du cyclone Idai au Malawi, au Mozambique et au Zimbabwe, la plupart des habitants touchés sont confrontés à la face sombre de la crise climatique. Ils peinent à survivre, a déclaré Tigere Chagutah, directeur adjoint pour l’Afrique de l’Est et l’Afrique australe à Amnesty International.
« Les enfants ne sont pas scolarisés et les centres de soins ne sont pas encore entièrement reconstruits »
« Des dizaines de milliers de personnes sont toujours sans logement, certaines vivant dans des structures fournies par les Nations unies et d’autres dans des abris de fortune, sans accès à des installations sanitaires de base et exposées au choléra et à d’autres affections opportunistes. Les enfants ne sont pas scolarisés et les centres de soins ne sont pas encore entièrement reconstruits. Étant donné la situation désastreuse de ces pays et les responsabilités en matière de crise climatique, les États plus riches et les donateurs multilatéraux doivent s’engager bien davantage qu’ils ne l’ont fait jusqu’à présent et s’assurer que l’argent parvienne bien à ceux qui en ont besoin. »
Une réponse sous-financée
Un an après le passage du cyclone Idai dans la région, moins de la moitié des 406 millions d’euros requis pour l’aide aux secours et au relèvement à destination des populations touchées au Zimbabwe et au Mozambique a été assurée, avec seulement un peu plus de 36 000 euros engagés au cours du premier trimestre 2020. Le Mozambique, pays le plus durement touché de ces trois nations d’Afrique australe, a accueilli une conférence des donateurs en mai 2019 centrée sur l’aide à la reconstruction et au renforcement de la résilience à long terme. Cette conférence a permis de lever un peu plus d’un milliard d’euros de fonds – soit moins d’un tiers des besoins.
La lenteur des efforts de reconstruction
La plupart des écoles endommagées par le cyclone au Mozambique n’ont pas encore été reconstruites et des centaines de milliers d’enfants ont vu leur scolarité interrompue. Si la plupart des enfants sont désormais retournés à l’école, les enseignants doivent se battre pour dispenser à leurs élèves une éducation décente en raison du manque d’infrastructure et de matériel.
Au Mozambique, la province de Sofala est l’une des régions les plus durement touchées. L’accès aux routes demeure bloqué et les habitants n’ont d’autre choix que de rester dans les abris communs et dépendent de l’aide humanitaire distribuée par les agences de l’ONU, entre autres. Le gouvernement doit accorder la priorité à la reconstruction des infrastructures essentielles afin de favoriser le rétablissement de moyens de subsistance pour les habitants.
À Beira, la capitale de la province, des épidémies de maladies comme le choléra et la malaria se sont répandues et des milliers de personnes [1] ont été infectées. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a fourni une aide sanitaire d’urgence à des milliers de personnes, notamment des vaccins contre le choléra. Toutefois, les autorités du Mozambique doivent mettre en place un système de santé adapté aux besoins post-cyclone afin de mieux réagir à l’avenir. Si le principal hôpital à Beira a été reconstruit, l’accès aux soins de santé demeure aléatoire.
Au Zimbabwe, le deuxième pays le plus touché, de nombreuses personnes vivent toujours sous des tentes de fortune dans des camps installés par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR).
Dans le cadre du dialogue régional sur le changement climatique organisé à Mutare la semaine dernière par Amnesty International et ses partenaires, des victimes originaires des trois pays touchés ont déclaré qu’elles avaient perdu leurs moyens de subsistance et continuaient de dépendre de l’aide pour survivre.
Les populations dans les zones touchées ont demandé à leurs gouvernements de les aider à reconstruire leurs vies. Elles se sont dites inquiètes face à l’absence de communication efficace sur les informations climatiques et de coordination entre les organismes gouvernementaux et les associations locales pour gérer les risques et faire face aux catastrophes lorsqu’elles surviennent, d’autant qu’elles sont vouées à se multiplier en raison de la crise climatique. Les représentants de la population ont appelé à un meilleur partage des informations météorologiques, notamment grâce à des panneaux d’affichage et aux radios communautaires.
Nécessité d’un mécanisme international portant sur les « pertes et dommages »
« Au lendemain de cette catastrophe naturelle, il est clair que les gouvernements du Malawi, du Mozambique et du Zimbabwe ne peuvent se permettre d’assumer seuls le coût des pertes et dommages causés par le cyclone Idai, de rebâtir massivement et d’aider à reconstruire la vie des habitants touchés. Cette situation montre pourquoi il est essentiel que les États se mettent d’accord sur un mécanisme international adapté en matière de pertes et dommages, avec des financements dédiés, en vue de venir en aide à celles et ceux dont les droits sont impactés par la crise climatique, a déclaré Tigere Chagutah.
« Un an après le passage du cyclone, il est temps que les gouvernements touchés et leurs partenaires internationaux renouvellent leur engagement, intensifient la reconstruction et veillent à ce que leurs efforts aillent réellement dans le sens de la mise en œuvre des droits humains. »
Complément d’information
Le cyclone Idai a frappé le Malawi, le Zimbabwe et le Mozambique entre le 14 et le 16 mars 2019. Ce cyclone, l’une des pires catastrophes naturelles que l’hémisphère sud ait jamais connues, a fait plus d’un millier de morts et privé trois millions de personnes de nourriture, d’eau, d’un abri et d’infrastructures cruciales.