Communiqué de presse

Des milliers de personnes cherchent à se protéger des violences qui secouent Bangui Par Susanna Flood, directrice du programme Médias d’Amnesty International

Lundi 9 décembre — Que dire à une veuve en deuil dont les deux fils viennent de se faire tuer et qui doit prendre en charge chez elle ses 15 petits-enfants ?

Que répondre aux enfants avec qui vous venez juste de plaisanter et de rire – des enfants qui ont fui avec leurs familles vers un camp pour personnes déplacées qui grossit chaque jour – lorsqu’ils vous disent qu’ils ont faim et n’ont rien mangé depuis deux jours ?

Que peut-on ressentir en voyant cette foule compacte de gens qui cherchent à se mettre à l’abri dans des conditions désespérées, parce qu’ils s’y sentent plus en sécurité que dans leurs propres maisons ?

Que dire lorsque vous sentez un frisson glacé vous envahir en entendant chacun blâmer, pour la énième fois, les musulmans ou les chrétiens pour sa détresse ?

Il n’existe pas de réponse toute faite à ces questions, et pourtant c’est aujourd’hui la réalité de Bangui, capitale de la République centrafricaine. La situation est terrible. Et la population a très peur.

Quatre jours après qu’un groupe armé a lancé une offensive éclair contre Bangui, plus de 60 000 personnes ont cherché refuge dans différents endroits à travers la ville. Beaucoup se sont réfugiées dans des églises ; des informations similaires émanent de mosquées – mais à plus petite échelle. La majorité s’est réfugiée autour de l’aéroport connu pour être sécurisé en raison de la présence des troupes françaises.

Ces personnes fuient leur maison parce qu’elles ont peur. Des informations continuent de faire état de groupes armés qui menacent, tuent et pillent les quartiers résidentiels. Des voisins qui vivaient autrefois en paix ensemble expliquent qu’ils vivent désormais dans la peur, quasiment en guerre, blâmant l’autre sur la seule base de sa religion.

En fait, ils pourraient facilement rentrer chez eux. Ils ne sont pas partis loin. Mais ils ne le feront pas avant de se sentir réellement en sécurité. Dans l’intervalle, on apprend que des femmes accouchent dans les camps en plein air, sans assistance médicale, tandis que les enfants malades souffrent eux aussi.

Médecins sans Frontières et d’autres ONG font un travail remarquable, prodiguant des soins dans les hôpitaux et les camps. Mais cette crise qui dure depuis fort longtemps a pris de telles proportions depuis le déchaînement de violence dans la nuit du 4 au 5 décembre que personne n’est suffisamment équipé pour faire face aux événements.

L’arrivée de nouvelles troupes françaises apporte un léger sentiment de protection, d’autant qu’on peut maintenant les voir patrouiller à pied. La Force multinationale de l’Afrique centrale (FOMAC) joue elle aussi un rôle de protection indispensable, même si une grande partie de la population ne fait pas confiance à son contingent tchadien, perçu comme favorable à certaines forces de l’ex-Seleka qui commettent des exactions.

Tout le monde dans cette petite capitale a perdu un proche ou connaît quelqu’un qui est mort au cours des derniers jours de violences. C’est le reflet de la situation dans le reste du pays, où des villages entiers ont été anéantis.

Si le rétablissement de la loi et de l’ordre public dans Bangui est la priorité absolue, cela ne suffira pas à traiter les causes bien plus profondes de cette crise. Il faut que justice soit rendue aux Centrafricains, pour que ce pays puisse guérir de ses blessures et que ses habitants puissent de nouveau vivre en paix, ensemble.

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