Des séquences vidéo montrent des détenus égyptiens ayant semble-t-il été torturés et tués

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

8 mars 2011

Index AI : PRE01/119/2011

Amnesty International demande aux autorités égyptiennes d’ouvrir en urgence une enquête, après avoir reçu des séquences vidéo filmées à l’intérieur d’une morgue montrant les corps de dizaines de détenus dont certains ont semble-t-il été torturés avant d’avoir été tués.

Ces trois vidéos de détenus de la prison d’Al Fayoum ont été filmées le 8 février 2011 à la morgue de Zenhoum, au Caire, par un homme qui s’y était rendu après avoir appris de la famille d’un autre détenu que la dépouille de son frère s’y trouvait.

« Il s’agit d’images insoutenables montrant un grand nombre de détenus semblant avoir été tués dans des circonstances horribles », a déclaré Malcolm Smart, directeur du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International.

« Les autorités égyptiennes ont une obligation de protection envers toutes les personnes incarcérées dans leurs prisons et doivent immédiatement déterminer comment ces détenus ont perdu la vie et traduire en justice tous les auteurs présumés d’homicides illégaux, d’actes de torture et d’autres formes de mauvais traitements. »

Malek Tamer a trouvé le nom de son frère, Tamer Tawfiq Tamer, un détenu d’Al Fayoum, l’une des plus grandes prisons d’Égypte, sur une liste de 68 prisonniers males figurant dans le registre de la morgue.

Il a déclaré qu’un grand nombre de ces corps, tous numérotés à l’aide d’un morceau de papier fixé sur la tête ou le torse, présentaient des lésions à la tête, à la bouche ou aux yeux, ce qui donne à penser que ces hommes ont été torturés avant d’être tués.

Parmi les lésions observées figuraient des blessures par balle, des traces de brulure, des ecchymoses et des doigts et orteils sectionnés, a ajouté Malek Tamer.

Il était accompagné d’un ami, Mohamed Ibrahim Eldesouky, dont le frère Reda Ibrahim Eldesouky, autre détenu d’Al Fayoum, était également allongé sans vie dans cette morgue.

Ces deux hommes ont pour la dernière fois vu leurs frères vivants dans la matinée du 30 janvier 2011 alors que ceux-ci se trouvaient sous la garde de l’armée avec d’autres détenus, sur l’autoroute reliant Al Fayoum au Caire, au sud-ouest du Caire, après avoir quitté la prison d’Al Fayoum le 28 janvier 2011.

Des militaires leur ont dit qu’ils pourraient chacun demander, au cours des deux jours suivants, des renseignements sur leur frère respectif auprès de l’autorité carcérale au Caire, qui dépend du ministère de l’Intérieur, sans quoi leur lieu de détention serait annoncé sous 10 jours.

Une semaine plus tard, Mohamed Ibrahim Eldesouky s’est rendu à la morgue de Zenhoum après que des inconnus en civil lui eurent dit que le corps de son frère Reda s’y trouvait.

Ayant vu que le nom de Tamer figurait sur la liste de 68 hommes dans le registre de la morgue, il en a informé Malek Tamer, qui s’est à son tour rendu à la morgue, avec une caméra.

Le certificat de décès de Tamer Tawfiq Tamer indique qu’il est mort à la prison d’Al Fayoum le 3 février de « suffocation présumée et d’une baisse très importante de la pression sanguine ».

Malek Tamer a dit que le corps de son frère était bleu de la tête à mi-poitrine, et que des ecchymoses et du sang coagulé étaient clairement visibles sur sa tête, son nez et ses yeux.

Le certificat de décès de Reda Ibrahim Eldesouky indique qu’il est lui aussi mort le 3 février mais ne donne aucune explication concernant son décès, déclarant seulement : « Examen médicolégal effectué et cas en cours d’observation ».

Mohamed Ibrahim Eldesouky a dit avoir vu des lésions similaires sur le corps de son frère, ainsi que des traces de brulure. Les autorités égyptiennes n’ont publié de rapport médical ou médicolégal pour aucun de ces deux détenus.

Malek Tamer et Mohamed Ibrahim Eldesouky n’ont encore reçu aucune réponse du bureau du procureur du Caire après lui avoir soumis les séquences vidéo et déposé une plainte avec le soutien du Centre égyptien pour le développement et les droits humains.

Quelque 21 600 prisonniers auraient été libérés ou se seraient échappés des prisons égyptiennes dans des circonstances peu claires après que le ministre de l’Intérieur, responsable de la gestion des prisons, eut quitté le ministère le 28 janvier à la suite des manifestations ayant rythmé cette Journée de la colère. Plus de la moitié ont de nouveau été arrêtés ou se sont plus tard rendus aux autorités.

·Regarder une séquence vidéo filmée à la morgue (Attention – contient des images très explicites)

· Prendre connaissance d’autres informations de référence sur ce cas (en anglais)

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