Communiqué de presse

Deux leçons que les États-Unis doivent tirer du cas de Glenn Ford Par Tessa Murphy, chargée de campagne sur les États-Unis à Amnesty International.

Pour les États-Unis, il y a deux leçons à tirer du cas de Glenn Ford, un homme de 64 ans qui a passé 28 ans dans le quartier des condamnés à mort pour un crime qu’il n’a pas commis.

La première est qu’il ne faut jamais recourir à la peine de mort, notamment parce qu’elle fait toujours courir le risque d’exécuter des innocents. La seconde est que le système juridique de Louisiane souffre de sérieux problèmes.

Mardi 11 mars, en fin de journée, Glenn Ford est sorti du tristement célèbre pénitencier d’État de Louisiane, connu sous le nom d’Angola, après y avoir passé près de 30 ans pour un crime qu’il a toujours nié avoir commis.

Il avait été condamné à mort en 1984 pour le meurtre d’Isadore Rozeman, commis en novembre 1983 à Shreveport, dans le nord-ouest de la Louisiane. Sa libération a été ordonnée par un juge après que les autorités de Louisiane eurent fait état d’informations parvenues en mai 2013 et incriminant un autre homme.

Glenn Ford est le 144e prisonnier innocenté à être libéré du quartier des condamnés à mort aux États-Unis depuis 1973, et le 10e en Louisiane, d’après le Centre d’information sur la peine capitale de Washington.

On trouve dans cette affaire plusieurs signes qui caractérisent souvent les condamnations injustes : des avocats inexpérimentés, des témoignages peu fiables et des fautes commises par l’accusation. Des questions de racisme ont également été soulevées, comme souvent en ce qui concerne la peine de mort aux États-Unis. Glenn Ford est afro-américain et a été jugé pour le meurtre d’un homme blanc par un jury exclusivement composé d’hommes blancs. Lors de la sélection des jurés, l’accusation avait rejeté des Afro-Américains.

Malgré la nature peu convaincante des preuves retenues contre lui, Glenn Ford est resté en danger d’être exécuté pendant des décennies. La Cour suprême de Louisiane a confirmé la condamnation et la peine de mort en 1986, même après avoir reconnu que de « sérieuses questions » se posaient au sujet des éléments de preuve. Un des juges avait exprimé son désaccord, arguant que les éléments de preuve ne suffisaient pas à condamner Glenn Ford.

Cette affaire rappelle un autre cas qui fait l’objet de contestations depuis plus de 40 ans et présente les mêmes failles. Albert Woodfox est un des « Trois d’Angola », un groupe de trois prisonniers du même pénitencier que celui où Glenn Ford était incarcéré. En 1973, ils ont été jugés coupables du meurtre d’un gardien de prison, par un jury exclusivement composé d’hommes blancs. Il n’y a aucune preuve matérielle reliant Albert Woodfox au meurtre, des éléments de preuve susceptibles de le disculper ont disparu et les condamnations ont été prononcées sur la base d’un seul témoignage oculaire, qui a été discrédité. Il a été révélé par la suite que le témoin avait été récompensé pour sa déclaration, notamment par une grâce.

La condamnation a été annulée par trois fois, une fois par une cour d’État et deux fois par un juge fédéral, mais Albert Woodfox reste incarcéré alors même qu’il continue de plaider sa propre cause. L’État de Louisiane a fait appel de toutes les décisions de justice en sa faveur, et aucune solution n’a été apportée aux graves irrégularités mises au jour dans cette affaire. La Cour d’appel fédérale étudie actuellement le cas d’Albert Woodfox. Si la décision est en sa défaveur, il finira probablement ses jours en prison.

Herman Wallace, un autre membre des « Trois d’Angola », a vu sa condamnation annulée par un juge fédéral l’année dernière, en raison de l’exclusion systématique des femmes du grand jury qui l’avait mis en accusation. Pour que la Cour fédérale se presse de statuer sur l’affaire, il a fallu qu’un diagnostic de cancer en phase terminale soit porté à l’égard d’Herman Wallace et qu’un juge reconnaisse que « la cour de Louisiane [avait] eu l’occasion de corriger cette erreur et ne l’[avait] pas fait. » Herman Wallace est mort trois jours après sa libération.

Glenn Ford et Herman Wallace ont passé des dizaines d’années de leur vie derrière les barreaux, à cause d’un système entaché d’erreurs. Justice n’a toujours pas été rendue à Albert Woodfox. Amnesty International continue de demander sa libération.

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