Selon des craintes crédibles, des accusations mensongères auraient été portées à l’encontre d’un opposant bien connu d’Alexandrie en représailles de ses activités militantes, a déclaré Amnesty International alors que son procès en appel doit reprendre.
Le 12 mars, le militant Hassan Mostafa a été déclaré coupable et condamné à deux ans de prison pour avoir insulté et agressé un procureur à Alexandrie – accusations qu’il nie fermement. Son dossier a été marqué par des irrégularités de procédure et le refus du tribunal d’entendre tous les témoins de la défense. Hassan Mostafa est actuellement détenu à la prison de Borg al Arab et assistera à sa prochaine audience samedi 18 mai.
« Si Hassan Mostafa est incarcéré uniquement pour avoir exercé pacifiquement son droit à la liberté d’expression et d’autres droits humains, Amnesty International le considérera comme un prisonnier d’opinion et appellerait à sa libération immédiate et inconditionnelle, a indiqué Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International.
« La Cour d’appel doit passer en revue tous les éléments de preuve dans cette affaire. »
Les faits présumés se sont déroulés dans la matinée du 21 janvier 2013, dans les locaux du ministère public de Mansheya, à Alexandrie. Hassan Mostafa s’y est rendu avec un groupe d’avocats et de militants d’Alexandrie afin de s’enquérir du sort réservé à des dizaines de manifestants et de passants, dont des enfants, arrêtés la veille lors de troubles déclenchés par le procès de policiers accusés d’avoir tué des manifestants durant la « Révolution du 25 janvier ».
Hassan Mostafa a été arrêté environ une heure plus tard à l’intérieur du palais de justice d’Alexandrie, bâtiment qui jouxte le ministère public de Mansheya, dans un couloir longeant le bureau du procureur général d’Alexandrie. Selon des militants présents à ce moment-là, un groupe de policiers antiémeutes les ont frappés à coups de bâtons alors qu’ils tentaient de s’interposer et d’empêcher l’arrestation d’Hassan Mostafa.
Ce sont des collègues du plaignant qui ont mené les investigations et prononcé les inculpations à l’encontre d’Hassan Mostafa.
« Au regard des préoccupations que cela suscite en termes d’impartialité, Amnesty International estime que les intérêts de la justice seraient mieux servis si le recueil des preuves et les investigations sur le crime présumé n’avaient pas été effectués par des procureurs de ce bureau », a expliqué Hassiba Hadj Sahraoui.
Lors de la première audience en appel le 4 mai, à laquelle a assisté un délégué d’Amnesty International, des témoins ont certifié que, si une altercation avait bien éclaté à l’intérieur du bureau du ministère public de Mansheya, Hassan Mostafa n’avait pas giflé ni agressé physiquement le procureur.
Lors de cette audience, le juge a décidé de renvoyer l’affaire au 18 mai afin d’entendre les témoins à charge. Il a également ordonné à l’accusation de présenter des preuves en lien avec un rapport médical de l’hôpital qui signalerait une rougeur sur la joue du plaignant après les faits présumés, les avocats de la défense ayant soulevé des doutes quant à sa fiabilité.
Avant sa récente arrestation, Hassan Mostafa était un militant actif de l’opposition égyptienne depuis plusieurs années. En avril 2010, il a été interpellé lors d’une manifestation réclamant la levée de l’état d’urgence, maintenu en vigueur pendant des décennies par le président alors au pouvoir, Hosni Moubarak.
Amnesty International craint que les charges retenues contre lui ne soient liées au fait qu’il milite dans l’opposition et se démène en vue d’obtenir du ministère public de Mansheya qu’il dévoile où se trouvent les personnes arrêtées dans le cadre des troubles ayant eu lieu en 2013.
Ses avocats ont confié à Amnesty International qu’ils redoutent que d’autres charges ne soient portées à son encontre en lien avec sa participation à une autre manifestation, dans le but inavoué de le maintenir plus longtemps derrière les barreaux.
Le procès d’Hassan Mostafa se déroule sur fond de multiplication des actes de harcèlement juridique dont sont notamment victimes les opposants, les blogueurs, les comédiens et les manifestants en Égypte. Les accusations d’insulte envers le président Mohamed Morsi ou des représentants de l’État, ou de « diffamation » de la religion, ainsi que les vagues d’arrestations ciblant les manifestants de l’opposition, sont aujourd’hui la norme.