Égypte. L’arrêt de la Haute Cour d’appel militaire ne répare pas l’injustice

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

ÉFAI-
19 novembre 2009

Amnesty International s’élève contre la confirmation par la Haute Cour d’appel militaire égyptienne des condamnations prononcées à l’issue de procès iniques contre des membres importants du mouvement interdit des Frères musulmans et demande aux autorités de ne plus faire comparaître des civils devant des juridictions militaires.

« L’arrêt de la Haute Cour d’appel militaire, qui confirme les peines d’emprisonnement allant jusqu’à sept ans prononcées contre 18 membres des Frères musulmans, tous civils, témoigne d’un âpre échec face à une injustice née d’un procès contraire aux règles d’équité les plus élémentaires », a fait savoir Malcolm Smart, directeur du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International.

Aux termes du jugement rendu par la Cour le 17 novembre 2009, cinq des 18 Frères musulmans toujours incarcérés – les autres ayant été libérés en juillet sur ordre d’un tribunal administratif – doivent désormais purger le reste de leur peine. Parmi ces cinq personnes figure Khairat al Shatir, numéro trois du mouvement condamné à une peine de sept ans d’emprisonnement.

Le 17 novembre, la Haute Cour d’appel militaire a rejeté les appels interjetés par les 18 accusés, déclarés coupables et condamnés à des peines d’emprisonnement le 15 février 2008 au terme d’un procès inique devant la Haute Cour militaire de Haykstep, dans le nord du Caire. Sept autres personnes qui n’avaient pu être arrêtées ont été jugées par contumace et condamnées à des peines d’emprisonnement allant jusqu’à dix ans.

« Faire comparaître des civils devant une juridiction militaire, dont les juges sont des membres des forces armées en service actif, est intrinsèquement injuste et contraire aux normes internationales d’équité des procès, que les accusés disposent ou non d’un droit d’appel », a indiqué Malcolm Smart.

Au total, 25 accusés ont été condamnés pour terrorisme et blanchiment d’argent, en lien avec leur appartenance aux Frères musulmans, tandis que 15 autres étaient acquittés. Tous ont nié les faits qui leur étaient reprochés. Leur procès s’est ouvert le 26 avril 2007, le président Hosni Moubarak ayant ordonné en février qu’ils soient jugés devant un tribunal militaire. Un tribunal civil avait précédemment rejeté les charges pesant sur 17 d’entre eux.

Les autorités égyptiennes n’ont pas autorisé les observateurs internationaux envoyés entre autres par Amnesty International à assister aux audiences.

L’arrêt de la Haute Cour d’appel militaire a été rendu un mois après la publication par Martin Scheinin, éminent expert des Nations unies sur les droits humains et la lutte contre le terrorisme, d’un rapport accablant qui engageait les autorités égyptiennes à ne plus juger de civils devant des instances militaires.

En outre, le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire, a conclu en 2008 que la détention de 26 membres des Frères musulmans arrêtés entre décembre 2006 et janvier 2007 était arbitraire et a exhorté les autorités à les remettre en liberté. Quatorze de ces 26 personnes comptaient parmi les accusés dont les appels ont été rejetés le 17 novembre.

Amnesty International a appelé à maintes reprises le gouvernement égyptien à cesser de traduire des civils devant des tribunaux militaires. La procédure qui prévaut dans ces tribunaux bafoue le droit de tout accusé à un procès public équitable devant un tribunal compétent, indépendant et impartial, établi par la loi.

En effet, le droit de faire appel auprès d’une instance supérieure se limite à comparaître devant la Haute Cour d’appel militaire. Composée exclusivement de militaires, elle examine uniquement la loi, son interprétation et les questions de forme, sans se prononcer sur les preuves ni le fondement factuel des inculpations.

« Toutes les personnes encore incarcérées après avoir été condamnées au terme de ces procès iniques en première instance et en appel doivent être rejugées sans délai par une juridiction civile qui respecte les normes internationales d’équité, ou être remises en liberté », a conclu Malcolm Smart.

Note :

Les Frères musulmans sont largement considérés comme le premier groupe d’opposition en Égypte. Bien que ce mouvement soit officiellement interdit, 88 de ses membres et partisans siègent au Parlement égyptien en tant que députés « indépendants ». Les dirigeants et les partisans du groupe sont soumis à de fréquentes mesures de harcèlement et vagues d’arrestations de la part des autorités.

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