Égypte. Le ministre de l’Intérieur doit immédiatement remettre en liberté le blogueur égyptien Hani Nazeer

Déclaration publique

Index AI : MDE 12/002/2010 (Public)-
ÉFAI-
13 janvier 2010

Amnesty International appelle le ministre de l’Intérieur à se conformer à la décision de justice rendue dimanche 10 janvier et à libérer immédiatement sans condition Hani Nazeer, prisonnier d’opinion détenu uniquement pour avoir exprimé son opinion de façon pacifique.

Hani Nazeer, chrétien copte et blogueur de Qina en Haute-Égypte, est toujours détenu à la prison de Borg al-Arab, près d’Alexandrie, en dépit de quatre ordonnances de justice en faveur de sa libération obtenues par des avocats du Réseau arabe d’information pour les droits humains ; la décision la plus récente, le 10 janvier, a été rendue par la Cour suprême de sûreté de l’État (instaurée par la législation d’exception), qui a confirmé une ordonnance antérieure de remise en liberté.

Hani Nazeer est détenu depuis octobre 2008, en vertu d’une succession d’ordres de détention administrative émis par le ministère de l’Intérieur au titre des pouvoirs que lui confère l’état d’urgence, en vigueur depuis de nombreuses années en Égypte. Ces ordres successifs, émis pour remplacer ceux jugés invalides par le tribunal, témoignent du mépris avec lequel sont traités les tribunaux égyptiens et minent la valeur de toute surveillance ou contrôle judiciaire.

Les ordres de détention administrative concernant Hani Nazeer ont été émis après son arrestation, survenue après sa reddition à la police de Nagaa Hammadi qui avait arrêté ses frères et menaçait de placer en détention ses sœurs pour l’obliger à se rendre. Dénoncé par des habitants de Qina pour avoir mis en ligne sur son blog la couverture d’un livre réputé insultant pour les musulmans, il n’avait eu d’autre choix que de passer dans la clandestinité. Le livre, qui était une réponse à un autre livre considéré comme insultant pour les chrétiens, représentait en couverture une chèvre sur le toit de la Kaaba, le lieu le plus sacré de la Mecque, en Arabie saoudite. Quelques jours après son arrestation, Hani Nazeer a été transféré à la prison de Borg al Arab, près d’Alexandrie, à quelque 700 kilomètres de sa famille.

Pendant son séjour en prison, Hani Nazeer aurait subi des pressions de la part des officiers de sécurité pour se convertir à l’islam. En outre, ses avocats ont été empêchés de lui rendre visite à deux reprises au moins en 2009. On s’attend à ce que Hani Nazeer reste dans la prison de Borg al Arab jusqu’à ce qu’un nouvel ordre de détention administrative le concernant soit émis, comme cela se passe depuis son arrestation fin 2008.

Amnesty International demande instamment au ministre de l’Intérieur de respecter la décision de justice ordonnant de libérer Hani Nazeer et d’ordonner immédiatement la remise en liberté de toutes les personnes placées en détention administrative en vertu de la Loi d’urgence et pour lesquelles des ordres de remise en liberté ont été prononcés. Le ministre doit également cesser d’abuser des pouvoirs que lui confère la législation d’urgence pour restreindre le droit à la liberté d’expression.

L’organisation répète une nouvelle fois que nul ne devrait être placé en détention par les autorités égyptiennes pour avoir exercé de faon pacifique son droit à la liberté d’expression, garanti par l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques auquel l’Égypte est État partie.

Complément d’information

Les ordonnances de placement en détention administrative sont émises par le ministère de l’Intérieur en vertu de la Loi relative à l’état d’urgence. Les détenus ont le droit de déposer plainte contre leur détention devant la Cour suprême de sûreté de l’État (instaurée par la législation d’urgence) qui peut ordonner leur remise en liberté ; cette décision est susceptible d’appel par le ministre de l’Intérieur. En cas d’appel du ministère de l’Intérieur, la plainte est examinée par une autre Cour suprême de sûreté de l’État. Si cette autre Cour ordonne également la remise en liberté du détenu, le ministère de l’Intérieur doit s’incliner et libérer le détenu.

Toutefois, dans la pratique, lorsque ces ordres de libération sont émis par des tribunaux, les autorités chargées de la détention transfèrent secrètement le détenu vers d’autres lieux de détention, par exemple des commissariats de police ou des locaux du Service de renseignement de la sûreté de l’État au Caire ou ailleurs. Le détenu y est alors maintenu au secret le temps de faire l’objet d’une nouvelle ordonnance de mise en détention administrative émanant du ministre de l’Intérieur, au motif fallacieux qu’après sa remise en liberté il s’est immédiatement livré à des activités délictueuses ou terroristes et, de ce fait, a été de nouveau arrêté.

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