Égypte, Tournant inquiétant dans l’affaire Ahmed Samir Santawy

Egypte Ahmed Samir Santawy

Ahmed Samir Santawy comparaît aujourd’hui devant la Cour de sûreté de l’État en Égypte. Un tournant inquiétant dans l’affaire qui le concerne, puisqu’une décision de cette Cour ne peut faire l’objet d’un recours en appel. Dans un message vidéo, Souheila Yildiz, sa fiancée originaire de Gand, appelle à l’aide afin de ramener Ahmed chez lui.

Ahmed Samir poursuit des études en anthropologie à l’Université d’Europe centrale de Vienne (Autriche). En tant qu’étudiant, il a mené des recherches sur les droits sexuels et reproductifs en Égypte. Des recherches qui lui valent aujourd’hui d’être détenu depuis quatre mois à la prison de Tora, en Égypte, dans le cadre d’une enquête sur des « affaires liées au terrorisme ».

Le ministère public égyptien a convoqué Ahmed devant la Cour de sûreté de l’État pour « diffusion à l’étranger de fausses nouvelles sur la situation interne de l’Égypte ». La première audience a lieu aujourd’hui au Caire. Ses avocats n’ont pas pu étudier les charges retenues contre lui dans le dossier.

Les tribunaux pour la sûreté de l’État sont des instances spéciales qui ne fonctionnent que pendant l’état d’urgence et traitent les crimes les plus graves liés à la sûreté de l’État. Les décisions de ces tribunaux ne sont pas susceptibles d’appel et ne peuvent être approuvées ou désapprouvées que par le Président.

« Depuis plusieurs années, les chercheurs, les militant·e·s et les journalistes qui osent porter une voix critique sur le régime, sont systématiquement arrêté·e·s par les autorités pour des accusations de "terrorisme" »

« Depuis plusieurs années, les chercheurs, les militant·e·s et les journalistes qui osent porter une voix critique sur le régime, sont systématiquement arrêté·e·s par les autorités pour des accusations de "terrorisme". Il·elle·s sont torturé·e·s, maltraité·e·s et souvent maintenu·e·s en détention provisoire pendant de longues périodes, alors qu’une soi-disant enquête se poursuit », explique Philippe Hensmans, directeur de la section belge francophone d’Amnesty International.

« Ces attaques répétées contre les universitaires et les chercheurs ne font qu’affaiblir la liberté académique déjà limitée dans le pays ».

Ahmed Samir Santawy est considéré comme prisonnier d’opinion, détenu en raison de ses travaux universitaires. Amnesty International a lancé une pétition en faveur d’Ahmed Samir afin de demander sa libération immédiate aux autorités égyptiennes.

Complément d’information

Le 15 décembre 2020, Ahmed a quitté l’Autriche pour se rendre en Égypte, afin d’y passer des vacances avec ses ami·e·s et sa famille. Devant suivre ses cours en ligne en raison de la pandémie de COVID-19, il a décidé de prolonger son séjour. Le 23 janvier 2021, au milieu de la nuit, des agents masqués et lourdement armés ont fait irruption au domicile de ses parents, sans mandat de perquisition. Ahmed n’était pas présent à ce moment-là. Son père et son frère ont été interrogés et il a été ordonné à Ahmed de se présenter au poste de police.

Le 1er février, Ahmed s’est présenté de lui-même à la police. Son père, qui l’accompagnait, ne l’a jamais vu ressortir du poste et aucune information ne lui a été communiquée. Ce n’est que le 6 février qu’Ahmed est réapparu, lorsqu’il a dû comparaître devant le service du procureur général de la sûreté de l’État, qui a ordonné son placement en détention jusqu’à la fin de l’enquête ouverte pour terrorisme.

Ahmed a été victime de disparition forcée pendant 5 jours, période durant laquelle il dit avoir été battu lors de séances d’interrogatoire. Les autorités l’ont principalement interrogé sur ses travaux de recherche universitaire sur l’islam, les droits des femmes et l’avortement. Ils l’ont également interrogé sur un groupe Facebook critiquant le gouvernement égyptien.

Ahmed et sa compagne, Souheila, envisageaient de s’installer prochainement à Gand et de s’y marier. Ils ont fait connaissance en Égypte, lorsque Souheila y vivait avec sa mère et ses sœurs. Souheila a étudié l’arabe et l’islamologie à l’UGent. Elle prévoit de réaliser un doctorat à la Vrije Universiteit Brussel, mais ses projets sont maintenant en suspens, tout comme sa vie avec Ahmed.

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