Émirats arabes unis (EAU). Un membre de la famille régnante est impliqué dans une vidéo montrant des actes de « torture »

Déclaration publique

Amnesty International a fait part de sa très grande inquiétude aux autorités des Émirats arabes unis (EAU) à propos de leur manque manifeste de détermination à enquêter sur des violences graves qui auraient été perpétrées par un membre de la famille régnante à Abou Dhabi sur un homme avec lequel il se serait violemment disputé à propos d’affaires. Des preuves de cette agression, qui aurait eu lieu en 2004, ont récemment circulé sous forme d’un film vidéo de six minutes dans lequel on peut voir le cheikh Issa Ibn Zayed al Nahyan, frère du cheikh Khalifa bin Zayed al Nahyan président des Émirats arabes unis, battre un homme sans défense avec une planche de laquelle un clou dépasse, mettre le feu à ses poils pubiens, lui verser du sable dans la gorge et lui passer sur le corps au volant d’un véhicule, lui brisant ainsi les jambes. On voit également deux autres personnes assister à la scène, dont un policier en uniforme. Cette vidéo ferait partie d’une séquence plus longue d’un film de la même agression et serait l’un des nombreux films en circulation montrant des violences perpétrées par le cheikh Issa bin Zayed al Nahyan sur plusieurs personnes à Abou Dhabi.

Selon les informations dont nous disposons, les autorités des Émirats arabes unis connaissent depuis longtemps l’existence des preuves de cette agression mais n’ont pas prononcé d’inculpation. Selon une déclaration du ministère de l’Intérieur des EAU, communiquée à la chaîne américaine ABC News, l’affaire aurait été « résolue de façon privée » entre le cheikh et l’homme agressé ; celui-ci serait un Afghan du nom de Mohammad Shah Poor et aucun des deux hommes n’aurait souhaité porter plainte contre l’autre. Selon cette déclaration, « toutes les règles, politiques et procédures ont été suivies correctement par les services de police » ; toutefois aucun détail n’est fourni sur l’enquête officielle et aucune explication n’est donnée sur la raison pour laquelle les autorités ont considéré qu’il ne s’agissait pas d’une infraction pénale, ce qui fait craindre que le cheikh n’ait pas eu à rendre de comptes du fait de sa position et de son influence en tant que membre de la famille régnante d’Abou Dhabi.

Dans sa lettre au cheikh Khalifa bin Zayed Al Nahyan, Amnesty International demande instamment l’ouverture immédiate d’une enquête approfondie et indépendante et appelle le gouvernement à dire clairement publiquement quelles mesures il a prises, si tant est qu’il y en ait eu, pour enquêter sur cette affaire et sur les autres allégations de violences perpétrées par le cheikh Issa bin Zayed al Nahyan ; l’organisation demande également que des enquêtes soient menées sur l’implication et la complicité de membres des forces de police des EAU et peut-être d’autres fonctionnaires, qui auraient aidé à commettre de tels actes ou à les couvrir pour permettre à leurs auteurs d’échapper à la justice. Selon Amnesty International, même si la victime de cette agression était d’accord pour résoudre l’affaire « de façon privée » comme l’affirme la déclaration du ministère de l’Intérieur, cela ne dispense en aucune manière les autorités des EAU de leur responsabilité d’enquêter sur ce qui apparaît clairement comme des voies de fait graves et de demander aux auteurs présumés de répondre de leurs actes conformément à la loi des EAU.

Réagissant à la publicité faite autour de la diffusion de cette vidéo et aux inquiétudes exprimées par la communauté internationale, les autorités des EAU ont annoncé l’ouverture d’une enquête, déclarant le 29 avril que le gouvernement d’Abou Dhabi « condamne sans équivoque les actes montrés dans la vidéo » , que « les actes montrés dans la vidéo représentent manifestement une violation des droits humains » et doivent « en tant que tels faire l’objet d’un réexamen ». L’incertitude demeure toutefois concernant l’éventuelle arrestation ou inculpation de cheikh Issa bin Zayed al Nahyan ou d’autres personnes en lien avec les violences filmées subies par Mohammad Shah Poor. On ne sait rien du sort de ce dernier.

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