Emprisonnés pour un tweet

Les autorités bahreïnites doivent libérer immédiatement et sans condition le militant des droits humains Nabeel Rajab et le dirigeant de l’opposition Fadhel Abbas, deux prisonniers d’opinion qui encourent de lourdes peines d’emprisonnement parce qu’ils ont utilisé Twitter pour faire part de leurs préoccupations quant aux violations des droits humains perpétrées dans le cadre du conflit au Yémen, a déclaré Amnesty International mardi 25 octobre 2016.

Les deux hommes ont dénoncé l’homicide de civils au Yémen par la coalition que dirige l’Arabie saoudite, dont fait partie Bahreïn. Incarcérés à tort depuis des mois, ils attendent leurs jugements respectifs la semaine prochaine.

«  Il est honteux que Nabeel Rajab et Fadhel Abbas aient passé ne serait-ce qu’une minute en prison. Les autorités de Bahreïn ne peuvent pas réduire au silence toutes les voix critiques en les jetant derrière les barreaux. Elles doivent abandonner toutes les charges retenues contre Nabeel Rajab et annuler la condamnation à cinq ans de prison prononcée contre Fadhel Abbas, et cesser sans délai de réprimer la liberté d’expression, a déclaré Samah Hadid, directrice adjointe des campagnes au bureau régional d’Amnesty International à Beyrouth.

« Dans un climat d’hostilité croissante à l’égard de toute forme de dissidence, Bahreïn a plus que jamais besoin de voix indépendantes comme celles de Nabeel Rajab et de Fadhel Abbas. Ils devraient être applaudis et protégés, et non sanctionnés, pour leurs tentatives courageuses d’exprimer des préoccupations relatives aux droits humains. »

Nabeel Rajab, défenseur des droits humains bien connu, fait des allers-retours en prison depuis 2012. Il est détenu depuis juin 2016 pour « outrage aux autorités publiques », « outrage à un pays étranger » et « diffusion de fausses rumeurs en temps de guerre ». Ces charges sont liées à des commentaires qu’il a publiés sur Twitter, au sujet d’allégations de torture perpétrée dans la prison de Jaww et de la conduite de la coalition dirigée par l’Arabie saoudite dans le cadre du conflit au Yémen. Son jugement doit être rendu le 31 octobre et il encourt jusqu’à 15 ans de prison.

Nabeel Rajab est inculpé dans le cadre d’une autre affaire d’« atteinte au prestige de l’État », en lien avec un article publié en son nom dans le New York Times en septembre, dans lequel il décrivait les conditions de sa détention actuelle. On ignore quand il sera jugé pour cette inculpation.

Fadhel Abbas est l’ancien secrétaire général du parti d’opposition al Wahdawi (Rassemblement unitaire national démocratique). En juin 2015, il a été condamné à cinq ans de prison pour « diffusion de fausses informations qui pourraient compromettre des opérations militaires de Bahreïn et de ses alliés et appel à la résistance » : son parti politique avait posté un tweet déclarant que les frappes aériennes au Yémen constituaient une violation du droit international. Le jugement de son appel est attendu pour le 26 octobre.

Amnesty International considère Nabeel Rajab et Fadhel Abbas comme des prisonniers d’opinion, jugés uniquement pour avoir exercé sans violence leur droit à la liberté d’expression.

« Nous demandons la libération immédiate et sans condition de ces deux hommes, et exhortons les autorités à abroger ou à modifier les lois qui érigent en infraction l’exercice pacifique du droit à la liberté d’expression, conformément aux obligations de Bahreïn au titre du droit international », a déclaré Samah Hadid.

Complément d’information

Depuis mai 2016, les autorités de Bahreïn intensifient leur répression contre l’exercice des droits à la liberté d’expression, de réunion pacifique, d’association et de circulation, et visent en particulier les membres de l’opposition, les défenseurs des droits humains et les personnes qui critiquent l’action gouvernementale.

L’article 133 du Code pénal bahreïnite prévoit jusqu’à 10 ans d’emprisonnement pour quiconque « diffuse délibérément, en temps de guerre, des nouvelles, des déclarations ou des rumeurs fausses ou malveillantes ou lance des campagnes d’information défavorables afin de compromettre la préparation militaire visant à défendre Bahreïn ou les opérations militaires des forces armées, de semer la panique parmi la population ou de saper la persévérance de la nation ».

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