ESPAGNE : L’occasion d’un nouveau début sur la question des droits humains

Amnesty International soumet un plan d’action en faveur des droits humains

Les engagements en matière de politique étrangère doivent trouver un écho au
niveau national

Index AI : EUR 41/007/2004

Vendredi 11 juin 2004

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

(Madrid) Au moment où le gouvernement espagnol s’apprête à passer le cap de
ses cinquante premiers jours au pouvoir, Amnesty International a soumis aux
autorités un certain nombre de suggestions concrètes pour un plan d’action
national en faveur des droits humains.

Le rapport contenant les recommandations d’Amnesty International, intitulé
en anglais Spain : The necessary commitment - AI recommendations for a human
rights action plan, identifie les principaux défis auxquels se trouve
confrontée l’Espagne en matière de droits humains, trace la voie à suivre
pour mettre en place des changements et établit une liste de 15 indicateurs
permettant de mesurer la réussite du gouvernement à l’aune de ses promesses.

« Les changements en matière de droits humains doivent être substantiels et
non rhétoriques, a déclaré Irene Khan, secrétaire générale d’Amnesty
International à l’issue de sa première visite en Espagne. Nous jugerons le
gouvernement, non sur la base de ses promesses mais sur les actions qu’il
aura menées, à l’aide de ces indicateurs. »

Amnesty International demande que le plan établi soit :

 conforme aux lois et obligations internationales ;

 cohérent - qu’il fasse preuve du même engagement à l’égard des
droits humains au niveau national et international ;

 concret - qu’il fasse en sorte que les promesses ne restent pas sur
le papier mais trouvent une application pratique.

Au niveau international, Amnesty International appelle l’Espagne à respecter
et promouvoir les droits humains internationaux au Conseil de sécurité des
Nations unies, auprès du Comité anti-terrorisme des Nations unies et dans
ses relations bilatérales avec Cuba, la Colombie, le Maroc et le Sahara
occidental .

« La nouvelle approche en matière de politique étrangère de ce gouvernement
a donné à l’Espagne un rôle décisif lors des votes aux Nations unies ;
l’Espagne doit en user pour faire réellement changer les choses au niveau
des droits humains dans le monde » a déclaré Irene Khan.

Amnesty International a favorablement accueilli les déclarations du
gouvernement qui a réaffirmé son soutien aux institutions internationales et
au droit international et relatif aux droits humains. L’organisation a
également salué l’intention du gouvernement de ratifier un certain nombre de
traités internationaux tels que les Protocoles 4, 7 et 12 de la Convention
européenne des droits de l’homme et le Protocole facultatif se rapportant à
la Convention des Nations unies contre la torture.

« La prolifération et l’utilisation abusive d’armes de petit calibre au
niveau international a de sérieuses conséquences sur la protection des
droits humains ; nous sommes donc heureux de savoir que le président
Rodriguez Zapatero est d’accord pour soutenir notre campagne en faveur du
contrôle des armes de petit calibre et envisager la possibilité de parrainer
un traité international sur le commerce des armes, a déclaré Irene Khan.

« Toutefois, le gouvernement ne sera crédible au niveau international sur la
question des droits humains que s’il parvient à traiter le problème au
niveau national », a-t-elle ajouté.

Le rapport d’Amnesty International pour l’Espagne concernant les engagements
à respecter en matière de droits humains réitère les préoccupations de
l’organisation face aux actes de torture, aux mauvais traitements, au
racisme, aux restrictions du droit des réfugiés, demandeurs d’asile et
travailleurs migrants, ainsi qu’aux actes de violence contre les femmes dans
ce pays.

« Nous reconnaissons qu’il est du devoir du gouvernement de protéger les
personnes de toute menace de violence, des homicides et actes d’intimidation
par des groupes armés. Nous condamnons sans équivoque les actions violentes
de l’ETA ou d’autres groupes. L’attentat du 11 mars était un crime contre
l’humanité. Les auteurs doivent être traduits en justice - mais la justice
doit s’appliquer en accord avec les normes internationales relatives aux
droits humains, a déclaré Irene Khan.

« Sacrifier les droits humains au nom de la sécurité est une politique à
courte vue qui est contre-productive , selon Irene Khan, qui a interpellé le
gouvernement à propos du régime de détention au secret appliqué à certaines
personnes. Elle a également demandé au gouvernement d’enquêter sur les
allégations d’actes de torture et mauvais traitements et de s’opposer à
toute restriction des droits des migrants.

Amnesty International, les Nations unies et le Comité européen de prévention
de la torture enregistrent régulièrement de graves allégations de torture et
mauvais traitements en Espagne, liées notamment à l’origine raciale des
personnes.

« Dans le passé, le déni des faits a alimenté le cycle de la torture et des
mauvais traitements. Le gouvernement doit maintenant faire face à ses
obligations, mener des enquêtes approfondies sur ces allégations et faire
comprendre clairement qu’il appliquera une politique de tolérance zéro pour
les actes de torture, a déclaré Irene Khan.

« Nous appelons le gouvernement à examiner attentivement les recommandations
faites par les organes internationaux d’experts pour la prévention de la
torture. Les garanties prévues constituent la meilleure protection des
droits des détenus et de la réputation des agents responsables de
l’application des lois en cas de fausses allégations. »

Amnesty International a noté la persistance du racisme et de la xénophobie
dans certaines régions d’Espagne. Le document qu’elle publie s’efforce
d’obtenir des engagements pour lutter contre la discrimination ethnique et
raciale et s’assurer que les immigrants sont traités dignement dans le
respect des droits humains.

Amnesty International salue la décision du gouvernement de donner la
priorité à la lutte contre la violence à l’égard des femmes.

« C’est une initiative positive. Nous espérons que la proposition de loi
accordera la même protection à toutes les femmes en Espagne - qu’elles
soient espagnoles ou étrangères, qu’elles vivent en ville ou à la campagne,
a déclaré Irene Khan.

« Le gouvernement ne doit pas oublier les autres victimes. Il doit
réhabiliter la mémoire, la dignité et les dépouilles des victimes oubliées
de la guerre civile et du régime de Franco. »

Lors de rencontres avec les présidents de Catalogne et du Pays basque,
Amnesty International a également proposé un plan régional au sujet des
droits humains, en complément du plan national. Irene Khan a déclaré : « 
Nous saluons la réaction positive des autorités basques et catalanes à notre
proposition.

« Il y a quelques points sur lesquels nous sommes en accord total, d’autres
sur lesquels nous différons. Notre document doit aider au dialogue pour
permettre de résoudre les points difficiles de manière constructive, a
déclaré Irene Khan.

« Nous apprécions l’ouverture d’esprit du gouvernement central et des
gouvernements autonomes régionaux de la Catalogne et du Pays basque ainsi
que du principal parti d’opposition politique, qui nous ont écouté, se sont
montrés prêts à engager le dialogue avec nous et à prendre en considération
nos recommandations. Maintenant le véritable test va être de voir comment
ces promesses sont traduites en action, concrètement, de façon cohérente et
logique. »

Complément d’information

Une délégation d’Amnesty International dirigée par Irene Khan, secrétaire
générale de l’organisation, est en Espagne depuis le 5 juin. Ses membres se
sont rendus à Madrid, Barcelone et Vitoria, où ils ont rencontré des
représentants de la société civile et des membres du gouvernement. Ils ont
rencontré Rodriguez Zapatero, chef du gouvernement, les ministres de la
Justice et des Affaires étrangères, le président du Conseil du pouvoir
judiciaire, le président du gouvernement autonome de Catalogne, le président
du Pays basque, le vice-président du parlement catalan, le président du
parlement basque, la Commission des droits de l’homme du parlement basque et
le chef du Parti populaire. Le 11 juin, Irene Khan rencontrera le chef du
parti Izquierda Unida. Elle remettra également le même jour à ses
interlocuteurs des messages de solidarité parvenus du monde entier aux
victimes des attentats du 11 mars.

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