États-Unis. Amnesty International demande le réexamen de l’affaire des « Cuban Five »

DÉCLARATION PUBLIQUE

13 octobre 2010

ÉFAI - Index AI : AMR 51/096/2010

Dans un rapport envoyé au gouvernement des États-Unis et rendu public ce mercredi 13 octobre, Amnesty International expose ses préoccupations au sujet de l’équité du procès de cinq hommes déclarés coupables en 2001 d’avoir, entre autres, agi comme agents de renseignement pour le compte du gouvernement cubain. Ces hommes purgent des peines allant de 15 ans d’emprisonnement à la réclusion à perpétuité dans des prisons fédérales américaines.

Les cinq hommes – les Cubains Fernando González, Gerardo Hernández et Ramón Labañino, et les Américains Antonio Guerrero et René González – ont été jugés à Miami et déclarés coupables de plusieurs chefs, notamment d’avoir agi et conspiré en vue de mener des activités en tant qu’agents non enregistrés de la République de Cuba, de fraude et utilisation abusive de documents d’identité et, pour trois des accusés, de conspiration en vue de fournir des informations relatives à la défense nationale. Gerardo Hernández a en outre été déclaré coupable de collusion en vue de commettre des meurtres en raison de son rôle présumé dans la destruction par Cuba, en 1996, de deux avions opérés par l’organisation américaine anticastriste Brothers to the Rescue, attaque qui avait causé la mort de quatre personnes.

Dans une lettre qu’elle a envoyée le 4 octobre au ministre de la Justice des États-Unis, Eric Holder, en y joignant son rapport The Case of the ‘Cuban Five’ (index AI : AMR 51/093/2010), Amnesty International indique que si elle ne prend pas position au sujet de l’innocence ou de la culpabilité des cinq hommes elle estime toutefois que l’équité et l’impartialité du procès sont douteuses et que ces doutes n’ont pas pu être levés en appel.

L’un des principaux motifs de préoccupation est lié à la question de savoir s’il était équitable de tenir ce procès à Miami compte tenu de l’hostilité généralisée à l’égard du gouvernement cubain dans cette région et dans les médias, et des événements qui se sont produits avant et pendant le procès. Comme l’explique le rapport d’Amnesty International, certains éléments incitent à penser qu’il était impossible dans ces circonstances de garantir la totale impartialité du jury.

Parmi les autres motifs de préoccupation figurent les incertitudes quant à la valeur des preuves présentées à l’appui des accusations de collusion en vue de commettre des meurtres dans le cas de Gerardo Hernández, et les conditions dans lesquelles s’est déroulée la détention provisoire des cinq hommes, durant laquelle ils n’ont eu qu’un accès restreint à leurs avocats et aux documents utiles, ce qui a peut-être porté atteinte à leur droit à une défense efficace.

Amnesty International a appelé le gouvernement à réexaminer cette affaire et à modérer toute éventuelle injustice par le biais de la procédure de grâce ou par tout autre moyen au cas où les autres recours seraient inefficaces.

Amnesty International a également rappelé qu’elle était préoccupée par le fait que le gouvernement des États-Unis a refusé à plusieurs reprises de délivrer aux épouses cubaines de deux des détenus, René González et Gerardo Hernández, des visas temporaires leur permettant de rendre visite à ces derniers. L’organisation s’inquiète de ce que cette interdiction permanente des visites des épouses représente une sanction supplémentaire et est contraire aux dispositions des normes internationales relatives au respect de la dignité humaine des détenus et à l’obligation qu’ont les États de protéger la vie de famille. Amnesty International continue d’exhorter le gouvernement à accorder aux épouses des visas temporaires pour des raisons humanitaires.

Informations complémentaires

Les cinq détenus ont été arrêtés à Miami en 1998. Ils n’ont pas nié agir en tant qu’agents du gouvernement cubain, mais ont nié les accusations les plus graves portées contre eux et affirment que leur rôle était centré sur les groupes d’exilés cubains à Miami responsables d’actes hostiles à l’égard de Cuba et ne consistait pas à porter atteinte à la sécurité nationale de États-Unis. Aucun élément de preuve n’a été produit lors du procès montrant que les accusés avaient effectivement traité ou transmis des informations secrètes.

En mai 2005, le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a rendu un avis sur cette affaire ; il a estimé que le gouvernement des États-Unis n’avait pas garanti un procès équitable pour les cinq Cubains aux termes de l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Cet organe a fondé son avis sur un certain nombre d’éléments, notamment sur les conséquences préjudiciables de la tenue d’un procès à Miami. Il a également estimé que les conditions de la détention préventive des accusés et la décision initiale de classer « secrets » tous les documents liés à cette affaire ont réduit les possibilités d’une défense efficace et compromis l’équilibre des forces entre l’accusation et la défense.

En août 2005, un collège de trois juges de la cour d’appel fédérale du onzième circuit a infirmé à l’unanimité les déclarations de culpabilité rendues contre les cinq hommes, au motif que les préjugés contre le gouvernement castriste très répandus au sein de la population à Miami avaient, associés à d’autres facteurs, porté atteinte à leur droit à un procès équitable. Le gouvernement américain a formé un recours contre cette décision qui a par la suite été à son tour infirmée par la cour d’appel réunie en session plénière, avec une majorité de 10 voix contre deux. Les déclarations de culpabilité ont été confirmées par la cour d’appel en juin 2008, mais les peines de réclusion à perpétuité prononcées contre deux des accusés ont été ultérieurement annulées puis remplacées par des peines moins lourdes. Gerardo Hernández est le seul parmi les cinq hommes à être toujours sous le coup d’une peine de réclusion à perpétuité (il a été condamné à deux peines de réclusion à perpétuité). En juin 2009 la Cour suprême des États-Unis a rejeté sans aucune explication la demande de révision du procès des cinq hommes.
En juin 2010, un nouveau recours a été formé devant le tribunal de district fondé, en partie, sur de nouveaux éléments de preuve indiquant que des journalistes qui avaient écrit à l’époque du procès des articles préjudiciables au sujet de cette affaire travaillaient pour des organes de presse anticastristes, sur le territoire américain, où ils étaient employés et payés par le gouvernement des États-Unis. L’audience d’examen de ce recours n’a pas encore eu lieu.

Pour de plus amples informations, veuillez consulter USA : The Case of the ‘Cuban Five’, index AI : 51/193/2010, http://www.amnesty.org/fr/library/info/AMR51/093/2010/en

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