ÉTATS-UNIS : Amnesty International envoie un observateur à l’audience préliminaire prévue aujourd’hui dans l’affaire d’un soldat taliban américain

Index AI : AMR 51/114/02

Un observateur d’Amnesty International va assister à l’audience préliminaire prévue aujourd’hui (lundi 15 juillet 2002) dans l’affaire de John Walker Lindh, homme de nationalité américaine arrêté en Afghanistan et inculpé aux États-Unis de complot avec intention de donner la mort à des ressortissants américains, et de soutien à Al Qaida (La Base) et aux talibans.

La cour fédérale de district d’Alexandria, en Virginie, va examiner une requête demandant que les déclarations faites par John Walker Lindh pendant sa détention par les États-Unis en Afghanistan ne soient pas retenues à titre de preuve dans son futur procès, au motif qu’elles ont été obtenues dans des " conditions proches de la torture " et qu’elles n’étaient donc pas librement consenties. Pendant son interrogatoire dans une base américaine près de Kandahar, en décembre dernier, l’accusé aurait en effet été enchaîné nu et les yeux bandés dans un conteneur métallique destiné au transport maritime. En outre, pendant toute la période où il a été interrogé en Afghanistan, cet homme n’a jamais été autorisé à consulter un avocat.

" Les traitements que M. Lindh affirme avoir subis sont profondément choquants et soulèvent de graves questions au regard du droit américain et du droit international ", a déclaré Amnesty International. " Le droit international stipule que les informations arrachées sous la torture, les mauvais traitements ou la contrainte ne doivent pas être retenues à titre de preuve par un tribunal. En outre, les magistrats du parquet devraient refuser toute preuve ainsi entachée de suspicion ". Amnesty International va donc examiner avec soin les éléments de preuve présentés par les deux parties dans cette affaire.

L’observateur qu’elle a envoyé sur place est David Marshall, ressortissant canadien, membre des barreaux de Londres, de New York, de la cour fédérale de district du nord du Texas, et de la Cour suprême des États-Unis. De février 2000 à août 2001, il a dirigé le service de supervision du système judiciaire de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), dans le cadre de la mission des Nations unies au Kosovo. David Marshall rendra compte de ses observations au Secrétariat international d’Amnesty International, à Londres.

Complément d’information

John Walker Lindh fait semble-t-il partie des talibans qui se sont rendus au Front islamique uni pour le salut de l’Afghanistan (Front uni, généralement connu sous le nom d’Alliance du Nord) à Kunduz, en Afghanistan, en novembre 2001. Il a alors été incarcéré au fort de Qala-i-Janghi, à la périphérie de Mazar-e Sharif. Fin novembre 2001, un soulèvement aurait éclaté dans cette prison, entraînant le massacre de centaines de détenus. Amnesty International a appelé les forces alliées à mener une enquête exhaustive sur cette affaire. Peu avant ces événements, la télévision avait montré des images de John Walker Lindh, les mains liées derrière le dos, en train d’être interrogé dans l’enceinte du fort par deux agents américains, dont l’un a été tué pendant le soulèvement. Lindh se serait caché pendant plusieurs jours dans un sous-sol du fort de Qala-i-Janghi, où de nombreux détenus se seraient retrouvés pris au piège et seraient morts bombardés de grenades et de roquettes et aspergés de carburant enflammé et d’eau glacée par les troupes de l’Alliance du Nord. Sorti blessé des décombres le 1er décembre, avec d’autres survivants, John Walker Lindh a été remis aux troupes américaines.

Il a été renvoyé aux États-Unis en janvier 2002 et a été inculpé de 10 chefs d’accusation, dont ceux de complot avec intention de donner la mort à des ressortissants américains, de soutien matériel et autre à Al Qaida et aux talibans, et d’usage d’armes à feu dans des crimes violents. Il est passible de la réclusion à perpétuité. Son procès doit s’ouvrir le 26 août 2002.

Les préoccupations générales d’Amnesty International sur le traitement des prisonniers détenus par les États-Unis en Afghanistan et sur la base de Guantánamo Bay – dont beaucoup ont été privés des garanties élémentaires prévues par le droit international – sont décrites dans un rapport publié en avril dernier. Ce rapport, non traduit en français, s’intitule USA : Memorandum to the US Government on the rights of people in US custody in Afghanistan and Guantánamo Bay [États-Unis. Note au gouvernement américain à propos des droits des personnes détenues par les États-Unis en Afghanistan et à Guantánamo Bay] (index AI : AMR 51/053/02). À ce jour, le gouvernement américain n’a tenu aucun compte de cette note. Il est également resté sourd aux demandes d’Amnesty International de se rendre à Guantánamo Bay, où plus de 500 ressortissants de pays autres que les États-Unis sont détenus dans des circonstances incertaines, sans pouvoir consulter d’avocat et sans que leur statut n’ait été déterminé par un tribunal compétent, comme l’exige le droit international.

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