ÉTATS-UNIS - Exécution des personnes malades mentales : faillite d’un système plus prompt à tuer qu’à apporter une aide

Index AI : AMR 51/018/2006

Des centaines de délinquants présentant une maladie mentale grave se retrouvent dans une situation dramatique, entre un système de soins trop lent à réagir pour leur être utile et un système judiciaire trop prompt à les condamner à mort, déclare Amnesty International dans un important rapport publié ce mardi31 janvier 2006.

Ce rapport traite du recours à la peine de mort contre les personnes ayant une maladie mentale et souligne les problèmes systémiques auxquels sont confrontés ces personnes. Il rapporte aussi les cas de 100 délinquants malades mentaux exécutés depuis 1977, soit un dixième de toutes les exécutions ayant eu lieu depuis cette date.

Ce document fait le point sur les carences du système de soins comme du système judiciaire et attire l’attention sur le triste sort réservé aux personnes présentant une maladie mentale et incarcérées dans les couloirs de la mort des prisons américaines. Selon l’Association nationale de santé mentale, elles seraient au nombre de 3 400, soit 5 à 10 % des condamnés à mort.

« L’exécution de personnes ayant une maladie mentale grave est une mesure cruelle et inhumaine, qui a été passée trop longtemps sous silence, a déclaré Susan Lee, directrice du programme Amériques d’Amnesty International. Les préjugés et l’ignorance engendrent la peur et beaucoup de gens trouvent plus simple de condamner une personne malade mentale que de trouver un traitement à sa maladie. »

Le cas de Scott Panetti est exemplaire à cet égard. Il a été condamné à mort en 1995, au Texas, pour le meurtre de ses beaux-parents en 1992. Il avait à de nombreuses reprises été hospitalisé pour des troubles mentaux, dus notamment à une schizophrénie provoquant chez lui des hallucinations visuelles et auditives.

Pendant son procès, Scott Panetti, qui assurait lui-même sa défense déguisé en cow-boy, a affirmé que des démons s’étaient moqué de lui alors qu’il quittait la scène du crime.

L’un des médecins présents à l’audience a par la suite déclaré : « Scott Panetti ne se rendait pas du tout compte de l’effet de ses actes et de ses déclarations sur les membres du jury ; ils fixaient avec une hostilité mêlée d’incrédulité cet homme qui leur tenait un discours sans queue ni tête. »

Scott est aujourd’hui dans le couloir de la mort.

En juin 2002, la Cour suprême des États-Unis a interdit l’application de la peine de mort aux personnes présentant un retard mental (terme qui désigne aux États-Unis les troubles ou difficultés d’apprentissage). Elle a estimé que le retard mental atténuait la culpabilité personnelle de l’accusé et qu’il était difficile d’utiliser l’argument selon lequel la peine de mort pouvait avoir dans ce cas un effet dissuasif.

« Le retard mental et la maladie mentale sont des phénomènes différents, mais ils peuvent se traduire par des symptômes similaires et avoir des conséquences semblables. Les idées fausses d’une personne malade mentale peuvent l’entraîner à faire de raisonnements incohérents et à agir sous l’influence de ses pulsions. Il est tout à fait inconséquent d’exempter les personnes ayant un retard mental de la peine de mort et d’y recourir pour celles qui présentent une maladie mentale grave », a affirmé Susan Lee.

« La peine capitale est un thème très politisé. Depuis trop longtemps, les politiciens se dérobent à leur devoir en ne présentant pas à leur électorat des données susceptibles de démontrer que l’homicide judiciaire permet de lutter efficacement contre les crimes de sang - en particulier s’ils sont commis par des délinquants malades mentaux. »

Selon le rapport d’Amnesty International, le cas de Scott Panetti est révélateur des circonstances qui entourent la condamnation à mort et l’exécution des personnes malades mentales.

Dans de nombreux cas, ces personnes ne comprennent pas ce qui leur est reproché ou la gravité du crime qu’elles ont commis. Dans d’autres cas, elles sont sous l’effet de médicaments très puissants au moment du procès et semblent dépourvues de tout remords aux yeux du jury. L’absence de remords est considérée comme une circonstance aggravante majeure et pèse de tout son poids sur la décision des jurés.

Enfin, certains accusés sont contraints, contre leur volonté, de prendre des médicaments qui les rendent « aptes » à être exécutés

Amnesty International demande aux autorités américaines d’interdire immédiatement le recours à la peine de mort pour les personnes présentant une maladie mentale, et de mettre un terme définitif à ce type de châtiment aujourd’hui en recul. D’autre part, les représentants de l’État, à tous les niveaux, doivent faire en sorte que les demandes de ceux et celles qui ont une maladie mentale soient entendues et que des soins adéquats soient fournis à ceux qui en ont le plus besoin.

Le rapport et son résumé se trouvent sur le site de l’organisation :

 Rapport complet USA : The execution of mentally ill offenders (index AI : AMR 51/003/2006), à l’adresse suivante : http://www.amnestyinternational.be/doc/IMG/pdf/mentaldoc.pdf

Pour de plus amples informations sur la campagne d’Amnesty International contre la peine de mort, vous pouvez consulter le site Peine de mort de l’organisation à l’adresse suivante : http://www.amnestyinternational.be/doc/rubrique315.html

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