ÉTATS-UNIS : La Journée des droits de l’homme devrait être l’occasion d’une réflexion

Index AI : AMR 51/181/02

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

« Avec deux exécutions prévues aux États-Unis le 10 décembre, date de 54e Journée internationale des droits de l’homme, les hommes politiques américains devraient réfléchir sur la manière sélective dont leur pays considère les normes internationales de justice et de décence », a déclaré aujourd’hui (lundi 9 décembre 2002) Amnesty International, faisant remarquer que pas moins de cinq autres hommes pourraient aussi être exécutés aux États-Unis cette semaine.

« Plus de la moitié des pays du monde ont tourné le dos à la peine capitale, reconnaissant son incompatibilité avec la dignité humaine, son absence de caractère dissuasif particulier et le risque d’erreur irrémédiable qu’elle comporte », a souligné l’organisation.

« À l’inverse, les États-Unis, qui prétendent souvent être la force de défense des droits humains la plus progressiste du monde, ont mis à mort plus de 600 hommes et femmes au cours de ces dix dernières années, dont beaucoup en violation des normes internationales spécifiques », a-t-elle ajouté. Elle a fait observer que, plus tôt dans l’année, le président Bush avait promis que « l’Amérique défendrait toujours avec fermeté les revendications non négociables en matière de dignité humaine ». De même, le secrétaire d’État Colin Powell avait déclaré : « nous ne relâcherons pas notre engagement en faveur de la cause des droits humains ».

Or, pendant la seule année 2002, plus de 60 personnes ont été exécutées aux États-Unis. Parmi elles figuraient un homme atteint de troubles mentaux, plusieurs personnes n’ayant pas bénéficié d’une assistance juridique appropriée, des prisonniers dont la culpabilité n’avait pas été formellement prouvée, un ressortissant mexicain qui avait été privé de ses droits consulaires et un ressortissant pakistanais enlevé au Pakistan par des agents des États-Unis au mépris des garanties relatives aux droits humains.

C’est aussi aux États-Unis qu’ont eu lieu les trois seules exécutions connues de mineurs délinquants (âgés de moins dix-huit ans au moment des faits) dans le monde en 2002. Or, les exécutions de mineurs délinquants, que les États-Unis sont pour ainsi dire les seuls à continuer de pratiquer, violent le droit international et ont été condamnées énergiquement par la communauté internationale. Par exemple, en octobre, la Commission interaméricaine des droits de l’homme a fait observer que l’interdiction de telles exécutions était une norme qui ne souffrait aucune dérogation, qui « dépassait les frontières politiques et idéologiques » et qui faisait partie « des normes en vigueur en matière de décence ».

« Quand un État quel qu’il soit, et à plus forte raison un pays aussi puissant que les États-Unis, insiste sur son droit d’adopter une approche sélective des normes internationales, l’intégrité de ces normes s’en trouve inévitablement mise à mal », a poursuivi Amnesty International. « Pourquoi les autres États ne pourraient-ils pas alors s’arroger eux aussi le droit de n’adhérer qu’aux dispositions du droit international relatif aux droits humains qui les arrangent ? »

En outre, cette année, l’attitude des États-Unis à l’égard du système de protection internationale des droits humains n’a cessé d’être source de préoccupation dans des domaines autres que la peine de mort :
• en 2002, les États-Unis ont effectué des démarches auprès d’autres gouvernements pour leur demander de conclure avec eux des accords par lesquels ils s’engageaient à ne pas remettre à la nouvelle Cour pénale internationale les ressortissants américains accusés de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre. Dans de nombreux cas, ils ont menacé les pays de leur retirer leur aide militaire s’ils refusaient de signer ces accords.
• Plus de 600 personnes détenues à la base navale américaine de Guantánamo Bay n’ont toujours pas de statut juridique, et ne peuvent donc ni accéder aux tribunaux, ni rencontrer des avocats. Certaines sont détenues depuis presque un an sans aucune perspective de libération ni de procès. D’autres risquent d’être jugées par des commissions militaires, en violation des normes internationales relatives à l’équité des procès. Leurs conditions de détention - les détenus sont enfermés jusqu’à vingt-quatre heures par jour dans des petites cellules, avec très peu de possibilités de faire de l’exercice - peuvent s’apparenter à un traitement cruel, inhumain et dégradant et soulèvent de graves préoccupations quant à leur bien-être.

• Le 8 novembre, Amnesty International a écrit au gouvernement des États-Unis pour lui exprimer sa préoccupation au sujet de l’exécution extrajudiciaire présumée de six hommes au Yémen, dont la voiture aurait été prise pour cible par un drone Predator contrôlé par la Central Intelligence Agency (CIA, les services de renseignements des États-Unis).

L’année dernière, à la même époque, le président George Bush avait proclamé le 10 décembre Journée des droits de l’homme aux États-Unis, insistant sur l’importance de promouvoir les droits humains dans le monde entier et soulignant l’engagement des États-Unis en faveur de la justice et de la dignité humaine.

« Un an après, ces mots sonnent creux tandis que le train-train habituel des exécutions se poursuit et que les États-Unis ont toujours une approche aussi sélective des normes internationales », a déclaré Amnesty International, ajoutant que les États-Unis devraient reconnaître le danger d’une telle approche pour la progression des droits humains à travers le monde, ainsi que le tort qu’elle cause à leur propre réputation à l’étranger.

Les deux personnes qui risquent l’exécution le 10 décembre sont Jerry McCracken dans l’Oklahoma et Desmond Carter en Caroline du Nord. Linroy Bottoson pourrait être exécuté aujourd’hui (9 décembre) en Floride si un juge le déclare mentalement apte à être tué. James Collier et Jessie Williams doivent être mis à mort le 11 décembre, respectivement au Texas et au Mississippi. Enfin, Anthony Johnson et Jay Neill doivent recevoir une injection létale jeudi 12 décembre, l’un en Alabama et l’autre dans l’Oklahoma.

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