ÉTATS-UNIS : Nouvel homicide judiciaire : le président Bush donne son aval

Index AI : AMR 51/041/2003

« Tandis qu’il prépare les États-Unis à la guerre contre l’Irak, le président George Bush maintient son soutien à l’homicide judiciaire dans son pays », a déclaré Amnesty International après que l’ancien soldat Louis Jones a été exécuté par des fonctionnaires fédéraux dans l’Indiana, ce mardi 18 mars.

« Nous déplorons vivement qu’une fois de plus le président ne se soit pas engagé en faveur de la cause des droits humains sur cette question fondamentale, a avancé Amnesty International. Ses affirmations répétées selon lesquelles les États-Unis défendraient toujours avec fermeté " les revendications non négociables en matière de dignité humaine " ont été vidées de leur sens lorsque des employés du gouvernement sont allés chercher Louis Jones dans sa cellule et lui ont injecté un poison mortel. »

Vétéran de la Guerre du Golfe de 1990-1991, Louis Jones a été condamné à mort en 1995 pour le meurtre de Tracie Joy McBride, femme soldat de l’armée américaine. Sa demande de grâce avait été rejetée par le président Bush.

Elle mettait en avant des éléments de preuve selon lesquels ce soldat décoré pour ses faits d’armes souffrait du « syndrome de la guerre du Golfe » et de troubles de la personnalité liés à des lésions cérébrales, à la suite de son exposition à des toxines au cours de la guerre. Louis Jones a toujours exprimé des remords au sujet de ce meurtre et reconnu sa responsabilité. Dans son recours en grâce, il sollicitait une commutation de sa sentence capitale en une peine de réclusion à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle.

« Nous rappelons au président Bush qu’il avait promis lors de son investiture de se faire le porte-parole d’une " plus grande justice et compassion " », a indiqué Amnesty International. Reconnaissant les souffrances causées par le meurtre de Tracie McBride, l’organisation a également noté que les jurés eux-mêmes, lors du procès de 1995, ont estimé que la fille de Louis Jones souffrirait d’un traumatisme émotionnel si son père était exécuté.

Louis Jones a été la première personne condamnée à mort au titre d’une loi promulguée en 1994, qui a grandement étendu le champ d’application de la peine capitale au niveau fédéral. Cette loi allait à contre-courant des normes internationales en matière de droits humains, qui s’efforcent de limiter progressivement le champ d’application de cette peine.

« Plus de 100 pays à travers le monde ont tourné le dos à ce châtiment cruel et irrévocable, a poursuivi Amnesty International. En procédant aujourd’hui à une exécution, le gouvernement américain accentue son isolement face à ces nations nettement majoritaires. »

Louis Jones a été condamné à la peine capitale par un jury composé de 11 Blancs et d’une femme noire, devant un tribunal fédéral du Texas. Il était Afro-Américain et Tracy McBride était blanche.

Après le procès, deux femmes qui avaient fait partie du jury ont déclaré que la confusion avait régné dans la salle de délibération des jurés, du fait d’indications erronées que le juge leur avait communiquées concernant les peines. Ces informations avaient amené certains jurés à penser, à tort, que s’ils ne parvenaient pas à opter à l’unanimité en faveur de la peine capitale ou de la réclusion à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle, le juge prononcerait une peine moins lourde. L’une des deux femmes, seul membre afro-américain du jury, a subi des pressions particulièrement fortes de la part de la majorité des jurés pour voter en faveur de la peine capitale. Quatre juges de la Cour suprême fédérale - la majorité étant fixée à cinq - ont estimé qu’au vu de l’erreur commise par le juge, Louis Jones devait bénéficier d’une nouvelle audience afin de fixer sa peine.

« La condamnation à mort de Louis Jones a survécu à toutes les voies de recours, et ce en dépit du fait que tous les juges d’appel ayant révisé cette affaire ont convenu que le juge de première instance n’avait pas informé correctement le jury des peines qu’il pouvait prononcer, a ajouté Amnesty International.

« Nous regrettons que le président Bush n’ait apparemment pas compris que la grâce présidentielle a été instituée précisément pour contrebalancer la rigidité du système judiciaire. »

Complément d’information
Pendant les cinq années du mandat de gouverneur du Texas de George W. Bush, 152 exécutions ont eu lieu dans cet État. Une fois entré en fonctions à la Maison Blanche, il a autorisé la reprise des exécutions de prisonniers fédéraux en 2001, après presque quarante ans d’interruption, en dépit de l’incapacité de son administration à expliquer les fréquentes disparités géographiques et raciales qui caractérisent les condamnations à mort des contrevenants aux lois fédérales. Aucune explication n’a été fournie à ce jour. Louis Jones est le troisième condamné fédéral exécuté sous la présidence de George Bush.
Pour en savoir plus sur l’affaire Louis Jones, veuillez consulter le document référencé Index AI : AMR 51/020/2003.

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