Communiqué de presse

Etats Unis. Plus des trois quarts des entreprises américaines étudiées ne respectent pas les obligations de la loi historique sur les minerais provenant de zones de conflit

Près de 80 % des sociétés cotées en bourse aux États-Unis dont les rapports ont été analysés par Amnesty International et Global Witness ne vérifient pas correctement si leurs produits contiennent des minerais provenant de zones de conflit en Afrique centrale et ne donnent pas d’informations suffisantes à ce sujet, révèle un rapport publié mercredi 22 avril 2015 par les deux organisations de défense des droits humains.

Ce rapport, intitulé Une mine de transparence ?, analyse 100 rapports sur les minerais en provenance de zones de conflit établis par des entreprises telles que Apple, Boeing et Tiffany & Co au titre de l’article 1502 de la loi Dodd-Frank, ou loi relative aux minerais provenant de zones de conflit. Les conclusions de ce rapport dénoncent des lacunes inquiétantes dans la transparence dont font preuve les entreprises aux États-Unis.

En vertu de la loi Dodd-Frank, plus d’un millier d’entreprises cotées en bourse aux États-Unis susceptibles de s’approvisionner en minerais provenant d’Afrique centrale ont remis en 2014 un rapport à la Securities and Exchange Commission (SEC), l’autorité américaine de contrôle des marchés. C’était la première année qu’elles avaient l’obligation légale de produire un tel rapport. L’article 1502 de la loi Dodd-Frank vise à réduire le risque que les achats de minerais d’Afrique centrale ne contribuent à alimenter des conflits ou des atteintes aux droits humains.

« La loi relative aux minerais provenant de zones de conflit est une bonne occasion d’assainir les chaînes d’approvisionnement mondiales en minerais. Toutefois, nos recherches montrent que la plupart des entreprises semblent préférer poursuivre leurs affaires comme si de rien n’était plutôt que de se préoccuper du risque que leurs achats de minerais financent des groupes armés à l’étranger », a déclaré Carly Oboth, conseillère stratégique à Global Witness.

« C’est très inquiétant. De riches groupes industriels ont combattu à chaque étape la loi relative aux minerais provenant de zones de conflit. Si elles avaient plutôt mis tous ces moyens dans des enquêtes et des rapports approfondis sur leurs chaînes d’approvisionnement, leurs clients auraient davantage confiance en leurs produits et en l’absence de liens entre ceux-ci et le conflit. »

La République démocratique du Congo (RDC) est un lieu important d’approvisionnement en minerais – notamment l’or, l’étain, le tungstène et le tantale – pour les entreprises du monde entier. Ces minerais sont indispensables à la fabrication d’appareils électroniques, tels que les smartphones et les ordinateurs portables. Depuis plus de 15 ans, les groupes armés de RDC ont jeté leur dévolu sur le secteur minier pour financer leurs opérations, avec des conséquences dévastatrices, notamment de graves atteintes aux droits humains.

Les principales conclusions du rapport sont les suivantes :

• Parmi les entreprises dont les rapports ont été analysés, 79 % ne remplissent pas les obligations minimales de la loi américaine relative aux minerais provenant de zones de conflit.

• La plupart des entreprises de cet échantillon ne prennent pas de mesures suffisantes pour établir clairement la chaîne d’approvisionnement des minerais qu’elles achètent. Seules 16 % ne se sont pas contentées de démarches auprès de leurs fournisseurs directs et ont pris contact, ou tenté de prendre contact, avec les fonderies ou les affineries qui transforment les minerais qu’elles utilisent.

• Plus de la moitié des entreprises examinées ne signalent même pas aux cadres supérieurs de la société les risques qu’elles identifient dans leur chaîne d’approvisionnement.

L’analyse de Global Witness et d’Amnesty International montre également qu’une entreprise de l’échantillon sur cinq a bien respecté les obligations de la loi, ce qui écarte l’argument selon lequel la mise en œuvre de ce texte est trop compliquée et trop coûteuse. Les entreprises n’ont aucune excuse pour ne pas enquêter correctement sur leurs chaînes d’approvisionnement.

« Les consommateurs veulent savoir ce qui se cache derrière les logos. Les entreprises sont soumises à une forte pression : elles doivent montrer qu’elles font tout leur possible pour garantir qu’aucune histoire terrible de conflit ou d’atteintes aux droits humains ne se cache derrière les produits qu’elles mettent en rayon. Il ne suffira pas de cocher des cases pour faire retomber cette pression », a déclaré James Lynch, responsable de l’équipe Responsabilité des entreprises en matière de droits humains à Amnesty International.

« Les entreprises qui font toute la lumière sur leurs chaînes d’approvisionnement contribuent à empêcher un commerce néfaste des minerais qui alimente un conflit dévastateur pour l’Afrique centrale. »
Denis Mukwege, chirurgien congolais renommé engagé dans l’humanitaire, a déclaré : « Les entreprises doivent prendre davantage de mesures pour déterminer comment les minerais qu’elles achètent sont produits et vendus […] En juin, lorsqu’elles rendront leurs deuxièmes Rapports sur les minerais provenant de zones de conflit, elles devront prouver qu’elles ont fait le nécessaire en ce sens. »

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