Éthiopie. Le gouvernement doit révéler le sort réservé aux prisonniers politiques

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Ce mardi 5 mai 2009, Amnesty International a engagé le gouvernement éthiopien à révéler immédiatement les noms, ainsi que les lieux de détention, d’au moins 35 personnes qui seraient incarcérées aux mains des forces de sécurité depuis le 24 avril pour des motifs politiques.

De nouvelles arrestations auraient eu lieu au cours des derniers jours et, selon certaines sources dans le pays, il faut s’attendre à d’autres interpellations.

Ces 35 personnes seraient pour la plupart maintenues en détention parce qu’elles seraient impliquées dans la préparation d’une attaque déjouée contre le gouvernement. Cependant, d’autres semblent avoir été arrêtées parce qu’elles-mêmes ou des membres de leur famille s’opposent de manière pacifique à la politique gouvernementale. C’est le cas d’un homme âgé de quatre-vingts ans qui a besoin de soins médicaux de toute urgence.

« Nous sommes vivement préoccupés par le sort réservé aux prisonniers, a indiqué Michelle Kagari, directrice adjointe du programme Afrique d’Amnesty International.

« Plusieurs seraient placés en détention uniquement en raison de leurs liens de parenté avec des hommes qui ont exprimé leur opposition politique au gouvernement. Ils doivent être libérés immédiatement. Les autres doivent être inculpés d’infractions prévues par la loi ou remis en liberté. Tous doivent être autorisés à recevoir sans délai des visites de leurs proches et d’avocats, et à bénéficier de tous les soins médicaux dont ils pourraient avoir besoin. »

Selon Amnesty International, si la protection de la sécurité nationale est une responsabilité à laquelle les gouvernements accordent de manière légitime une haute priorité, elle ne saurait servir à justifier des violations des droits humains.

L’organisation pense que plusieurs détenus ont été arrêtés uniquement en raison de leurs liens de parenté avec des membres de Ginbot 7, groupe d’opposition fondé au lendemain des élections controversées de 2005.

Outre le général Tefera Mamo et d’autres anciens membres de l’armée appréhendés récemment, Amnesty International confirme qu’au moins un membre de l’opposition et plusieurs proches de responsables de partis d’opposition ont été placés en détention – dont Getu Worku, cousin de Berhanu Nega, figure de l’opposition, et Tsige Habte-Mariam, âgé de quatre-vingts ans, père d’Andargachew Tsige, autre responsable bien connu de l’opposition et ancien prisonnier d’opinion actuellement en exil. Diabétique, Tsige Habte-Mariam a subi il y a peu une opération du cœur. Il a besoin de recevoir des soins médicaux de toute urgence.

Ato Melaku Teferra a lui aussi été incarcéré. Ancien membre de la Coalition pour l’unité et la démocratie (CUD) ayant purgé une peine de vingt mois à la prison de Kaliti, il est actuellement membre de l’Unité pour la démocratie et la justice (UDJ), parti de Birtukan Mideksa, prisonnière d’opinion soutenue par Amnesty International.

La plupart voire toutes les personnes arrêtées récemment seraient détenues à la prison de Maekalawi, à Addis-Abeba. Toutefois, le gouvernement n’a pas encore confirmé cette information. À la connaissance d’Amnesty International, il n’a fourni aucune information particulière aux familles concernant le lieu ou les conditions de détention de leurs proches.

En raison du secret qui entoure leur détention, ces personnes risquent de subir des actes de torture ou d’autres mauvais traitements.

Après avoir comparu devant les tribunaux fin avril, elles ont été renvoyées en détention provisoire pour quatorze jours supplémentaires, afin de permettre la tenue de nouvelles investigations et l’engagement de poursuites judiciaires. Selon Amnesty International, elles devraient comparaître une deuxième fois en justice autour du 12 mai 2009.

« S’opposer de manière pacifique au gouvernement n’est pas un crime, pas plus que d’appartenir à la famille d’un opposant au gouvernement. Les autorités éthiopiennes ne doivent pas placer en détention, harceler ni intimider des membres de l’opposition ni leurs proches dans le cadre des opérations de sécurité qu’elles mènent actuellement. Cela ne servira qu’à envenimer le climat politique déjà tendu qui règne dans le pays », a conclu Michelle Kagari.

Note :

Le bilan de l’Éthiopie en matière de droits humains s’est détérioré après les élections controversées de 2005 : au moins 187 manifestants ont été tués, tandis que des membres de la Coalition pour l’unité et la démocratie (CUD), parti politique d’opposition, des journalistes et des militants de la société civile étaient arrêtés et jugés pour trahison. Si certains des accusés ont été acquittés, d’autres ont été libérés et graciés en 2007 et 2008, après avoir signé des lettres d’excuses. En décembre 2008, Birtukan Mideksa, à la tête de l’Unité pour la démocratie et la justice (UDJ), a été une nouvelle fois arrêtée et sa condamnation à la réclusion à perpétuité a été rétablie, après qu’elle se soit exprimée sur le processus ayant conduit à sa grâce lors d’une réunion publique en Suède.

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