Communiqué de presse

France. Les autorités évacuent de force 150 personnes, dont 60 enfants, à Bobigny

Les évacuations de campements de Roms par les autorités françaises continuent de bafouer le droit international un an après la publication de la circulaire interministérielle sur la question, a déclaré Amnesty International après avoir assisté à l’expulsion forcée de 150 personnes mardi 27 août au matin, à Bobigny.

La chercheuse sur la France d’Amnesty International a été témoin de l’expulsion tôt le matin de familles roms, parmi lesquelles 60 enfants, d’un campement informel à Bobigny où certaines familles vivaient depuis trois ans. La moitié des enfants du campement étaient scolarisés, et ils se sont retrouvés sans abri à une semaine de la rentrée scolaire.

Cette expulsion est la dernière d’une série d’expulsions forcées effectuées par les autorités locales en France, à la suite desquelles des centaines de personnes se sont retrouvées à la rue.

« Je me suis réveillé à 6 heures, la police est venue, ça nous a fait peur. Moi, je savais qu’on allait devoir partir, ma mère nous l’avait dit. Je ne sais pas où on va aller avec ma famille. On ne sait pas si on va pouvoir aller à l’école, mais nous on veut vraiment y aller. Aujourd’hui je devais aller au stage de remise à niveau, avant ma rentrée en 6ème au collège, mais là je ne peux pas aller au stage », a témoigné David, âgé de 12 ans.

C’est la cinquième fois que David et sa famille - cinq filles et cinq garçons de 4 à 28 ans - sont expulsés.

Nadka, une Bulgare âgée de 46 ans qui habite en France depuis 10 ans, a été expulsée de sa baraque de fortune ce matin avec son mari et sa fille de 16 ans.

Elle pleurait et elle avait très peur ; sa maison étant située sur la partie du terrain pour laquelle il n’y avait pas d’ordonnance d’expulsion, elle ne savait pas si elle allait pouvoir rentrer chez elle ce soir ni si elle pourrait récupérer ses affaires. Elle a expliqué qu’elle avait de l’asthme et qu’aucune solution d’hébergement alternatif ne lui avait été proposée. Elle attendait avec les autres habitants devant le campement informel pour voir si elle allait pouvoir regagner sa maison, ne sachant pas ce qui allait lui arriver.

Le campement informel qui a été évacué à Bobigny ce matin était situé sur un terrain qui appartient à trois propriétaires différents. Des décisions d’expulsion ont été rendues pour deux des trois parcelles de terrain, mais c’est néanmoins l’ensemble des habitants du campement qui a été évacué. Les personnes n’ont pas été notifiées ni informées de façon adéquate, aucune consultation n’a eu lieu, et seules trois familles ont reçu des propositions d’hébergement temporaire. Le reste des habitants se sont retrouvés sans abri.

L’expulsion d’aujourd’hui intervient un après la publication de la circulaire interministérielle « relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites », le 26 août 2012, donnant des instructions non contraignantes pour les opérations d’évacuation.

Le préfet de la Seine-Saint-Denis a déclaré aujourd’hui : « Nous travaillons strictement dans le respect de la circulaire. Dans le [département du] 93, on fait des évacuations chaque mardi ».

« Ce matin, j’ai vu des familles entières se retrouver sans abri et forcées de laisser tout ce qu’elles possédaient derrière elles. Les gens ne savaient pas quoi faire ni où aller. Les évènements de ce matin démontrent clairement que la circulaire d’août 2012 est insuffisante pour protéger les personnes contre les expulsions forcées », a déclaré Marion Cadier, chercheuse d’Amnesty International sur la France.

« Il est inacceptable qu’un an après la publication de la circulaire interministérielle, on fasse subir ce sort à des centaines de familles roms à travers le territoire. Il est temps que la France cesse d’expulser de force des personnes et qu’elle respecte le droit international relatif aux droits humains », a-t-elle ajouté.

Amnesty International a effectué des recherches de terrain sur la question des expulsions forcées en Ile-de-France et dans d’autres régions de France. Aux termes du droit international, les expulsions peuvent être mises en œuvre uniquement si des garanties sont respectées, telles qu’un logement alternatif et l’indemnisation des personnes déplacées.

Le rapport « Chassés de toutes parts : Les expulsions forcées de Roms en Ile-de-France », publié en 2012, examinait les expulsions forcées à répétition dont sont victimes les Roms en banlieue parisienne. Le 26 septembre prochain, un second rapport étudiant la question des expulsions forcées dans les agglomérations de Lille et Lyon sera publié.

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