GRÈCE : Violation des droits des objecteurs de conscience sous la présidence de la Grèce

Index AI : EUR 25/001/2003

À la veille de la réunion informelle des ministres européens de la défense à
Athènes les 14 et 15 mars, Amnesty International a adressé une lettre à
Monsieur Kostas Simitis, Premier ministre de Grèce et actuel président de
l’Union européenne, afin d’attirer son attention sur les graves
préoccupations des organisations de défense des droits humains au sujet de
certaines dispositions, à caractère punitif et discriminatoire, de la Loi
2510/1997. Cette loi concerne le droit à l’objection de conscience au
service militaire et à un service civil de remplacement.

Amnesty International salue les récentes informations reçues, selon
lesquelles la durée du service civil de remplacement serait réduite à
l’avenir (parallèlement à la réduction de la durée du service militaire, qui
est passé de quatorze à douze mois au 1er janvier 2003). Amnesty
International reste toutefois préoccupée par le fait que le service civil
conserve un caractère punitif du fait de sa durée, presque le double de
celle du service militaire.

Amnesty International a également soulevé le cas de plusieurs objecteurs de
conscience qui risquent des peines de prison après avoir perdu leur droit à
l’objection de conscience, du fait de l’absence de véritables dispositions
permettant d’effectuer un service civil de replacement et en raison du
caractère punitif et discriminatoire de ce dernier. Il s’agit de : Lazaros
Petromelidis, Giannis Chryssovergis, Ioannis Glarnetatzis, Dimitrios
Tsouchlis, Kyriakos Iosifidis, Panayiotis Makris, Dimitrios Sotiropoulos,
Christos Gountinakos, , Ioannis Ioannidis, Evangelos Michailidis, Georgios
Skouros, Georgios Tsogas, Nikolaos Poulos, Nikolaos Theodorakopoulos, Paris
Tsiranidis, Anastasios Batas, Nikolaos Tsakonas, Dimitris Pakkidis, Antonis
Apergis, Dimitris Pitsikalis, Christos Tsaknakis, Christos Kiourktsidis,
Filippos Goutzis, Ioannis Pantoulias, Alexandros Evtousenko et Petros
Sotiropoulos. Amnesty International a particulièrement attiré l’attention
sur le dossier d’Alexandros Evtousenko, inculpé pour refus d’obéissance et
actuellement en détention provisoire, et sur celui de Lazaros Petromelidis,
dont le procès devrait intervenir sous peu et qui est accusé
d’insubordination.

Amnesty International considère Alexandros Evtousenko comme un prisonnier
d’opinion et appelle les autorités grecques à le remettre en liberté
immédiatement et sans condition. Tout homme de la liste ci-dessus qui serait
mis en prison serait considéré par Amnesty International comme prisonnier
d’opinion, dont l’organisation demanderait la remise en liberté immédiate et
sans condition.

Amnesty International a exprimé en détail ses préoccupations concernant le
service civil de remplacement en Grèce dans un rapport intitulé Greece : no
satisfaction : the failures of alternative cvilian service publié en juillet
1999 (Index AI : EUR 25/03/99). Des préoccupations similaires, accompagnées
de recommandations appropriées, ont également été exprimées par le médiateur
grec et la Commission nationale grecque des droits humains.

Bien qu’Amnesty International ne remette pas en question le droit des
gouvernements à appeler sous les drapeaux une partie de leur population,
l’organisation fait campagne pour le droit de ceux qui sont concernés par la
conscription de pouvoir effectuer un service civil de remplacement dans des
conditions conformes aux normes et recommandations internationales. Amnesty
International considère que les dispositions actuelles du service civil de
remplacement ne sont pas conformes à ces normes et recommandations.

L’organisation demande donc que la révision en cours des dispositions
relatives à la conscription apporte des modifications à la Loi 2510/1997, de
façon à ce que : le service civil de remplacement ne soit pas d’une durée à
caractère punitif et discriminatoire, qu’il passe sous l’entière autorité
de personnes civiles (y compris pour la partie d’examen des demandes pour
être considéré objecteur de conscience), que les objecteurs de conscience
aient le droit de revendiquer leur statut d’objecteur de conscience à tout
moment (avant leur service militaire et après l’avoir commencé) et que le
droit d’effectuer un service civil de remplacement ne souffre aucune
dérogation, y compris en temps de guerre. Amnesty International demande
également que soit prévu un amendement aux dispositions actuelles qui
prévoient la révocation du droit à effectuer un service civil de
remplacement ou un service militaire non-armé pour les objecteurs de
conscience qui exerceraient des activités syndicales ou participeraient à
une grève pendant leur service civil de remplacement.

Complément d’information
Alexandros Evtousenko est né en Tchétchénie. Il n’a pas pu demander à
effectuer un service civil de remplacement, la Loi 2510/1997 privant du
droit au statut d’objecteur de conscience tous ceux qui ont déjà commencé
leur service militaire. Alexandros Evtousenko a servi vingt-quatre mois dans
les rangs de l’armée russe (il n’était pas à l’époque témoin de Jéhovah mais
s’est converti plus tard). Après avoir obtenu la nationalité grecque, il a
été appelé pour trois mois sous les drapeaux par la Grèce. Le 28 mars 2002,
il a été dispensé de toute obligation militaire pendant un an pour raisons
de santé. Rappelé le 24 février 2003, il devait se présenter au régiment
d’Haidari. Accusé de désobéissance, il a été placé en détention provisoire
où il se trouve toujours. La date de son procès a été fixée au 14 mars 2003.
Amnesty International considère qu’Alexandros Evtousenko est un prisonnier
d’opinion et appelle les autorités grecques à le remettre en liberté
immédiate et sans condition.
Lazaros Petromelidis a été appelé sous les drapeaux en mars 1992. Il a alors
adressé au bureau de recrutement du Pirée un courrier, dans lequel il
déclarait son objection de conscience au service militaire et son refus de
se présenter à la caserne. Le 20 juillet 1992, il a été accusé
d’insubordination, on lui a interdit de quitter le pays. Reconnu comme
objecteur de conscience en novembre 1998, il a été envoyé au centre de
santé de Kilkis, à 550 kilomètres de chez lui, pour y effectuer son service
civil. Selon les dispositions de l’époque, le service militaire pour un
homme de son âge, dans sa situation familiale (marié et père d’un enfant)
aurait été de quatre mois dans les faits (si l’on tient compte du droit
d’achat d’exemption pour huit mois sur un total de douze mois de service) et
se serait déroulé près de chez lui. Il a refusé d’effectuer ce service qu’il
jugeait d’une durée à caractère punitif et a perdu son droit à l’objection
de conscience le 10 février 1999. Le 15 avril 1999, le tribunal maritime du
Pirée l’a reconnu coupable d’insubordination en temps de mobilisation
générale pour son insubordination de 1992 et l’a condamné à quatre ans de
prison. Le 17 septembre 2002, alors que son procès en appel concernant son
insubordination de 1992, était repoussé, il a été arrêté pour
insubordination pour ne s’être pas présenté à Kilkis pour y effectuer son
service civil de remplacement.
Lazaros Petromelidis a immédiatement fait appel de cette deuxième
accusation. Le procureur du tribunal maritime du Pirée a ordonné la mise en
détention provisoire de Lazaros Petromelidis à la prison Korydallos en
attendant le procès en appel. Remis en liberté sous caution trois jours plus
tard, après que son dossier eut été examiné par le tribunal naval de
Salonique, il reste soumis à des mesures de restriction (obligation de se
présenter deux fois par mois au commissariat local de la police sous peine
d’emprisonnement). Amnesty International demande que les poursuites à son
encontre soient suspendues en attendant la révision des dispositions
relatives au service civil de remplacement.

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