ÎLES SALOMON : Les femmes vivent dans la peur, les violeurs n’étant pas poursuivis

Index AI : ASA 43/002/2004
ÉFAI

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

« J’avais quatorze ans alors. Monsieur N. [membre de la Police Joint
Operation] est venu un soir vers 22 heures chez moi, il a pointé un revolver
sur moi et m’a donné l’ordre de le suivre pour aller voir d’autres hommes.
Ils m’attendaient déjà. Ils m’ont obligée à aller chercher des feuilles de
betelnut [une drogue populaire locale], puis m’ont interrogée et m’ont dit
qu’ils allaient envoyer le commandant pour me voir. Le commandant, c’était
Monsieur [...]. Il a braqué son arme sur moi et m’a violée. J’ai eu mal et
j’ai saigné et je n’ai pas pu me faire soigner. » Une écolière de seize ans
à Guadalcanal.

Des centaines d’affaires de viols, torture et autres violences dans les îles
Salomon restent sans suite parce que les victimes craignent pour leur
sécurité si elles signalaient les faits à la police. Des femmes et des
jeunes filles sont traumatisées par leur expérience des années de guerre
civile dans ces îles du Pacifique sud.

Un rapport d’Amnesty International sur la violence faite aux femmes dans les
îles Salomon révèle l’étendue et les conséquences des violences à
l’encontre des femmes durant les cinq années qu’a duré le conflit. Pour
citer un exemple, sur 55 femmes interrogées par Amnesty International en
avril 2004 et vivant dans la région de Weathercoast, 19 avaient été violées
par des troupes ayant occupé leur village ou y ayant fait des incursions.
Treize étaient des adolescentes, dont la plus jeune n’était âgée que de onze
ans.

« Les auteurs de violences contre des femmes - qu’il s’agisse de policiers,
de membres de groupes armés ou de personnes agissant à titre individuel -
sont rarement poursuivis en justice pour ces crimes . À notre connaissance,
très peu, parmi les viols cités dans le rapport, ont fait l’objet de
poursuites en justice, a déclaré Heinz Schurmann-Zeggel, chercheur auprès
d’Amnesty International pour la région Pacifique.

« Témoins et victimes portent rarement plainte, d’abord parce qu’elles n’ont
pas l’occasion de le faire, ensuite parce qu’elles craignent des
représailles . Dans les affaires de viol, ce sont souvent les hommes de leur
famille qui dissuadent les femmes de porter plainte auprès de la police ou
de coopérer avec les magistrats », a expliqué Heinz Schurmann-Zeggel.

Aujourd’hui encore, alors que le conflit est terminé, la violence contre les
femmes continue - la violence domestique en particulier. Près de deux cents
viols ont été signalés au cours des six premiers mois de l’année, « un
record affligeant » selon le directeur de la police pour les îles Salomon.
La police manque d’argent pour former son personnel à réagir face à ce type
de violence et le gouvernement s’est montré incapable de fournir aux
policiers un minimum d’équipements.

La discrimination à l’encontre des femmes exacerbe la violence. Les femmes
sont très peu représentées dans la police et dans le domaine du droit ou de
la politique. Trop souvent l’aide étrangère pour la reconstruction du pays
offre aux hommes des possibilités économiques accrues tandis que les besoins
des femmes ne sont pas pris en compte.

« les femmes des îles Salomon souffrent d’une double invisibilité - d’abord
en tant que victimes du conflit et maintenant en tant que participantes
potentielles au processus de rétablissement de la paix et des droits humains
 », a déclaré Heinz Schurmann-Zeggel ;

Amnesty International appelle le gouvernement des îles Salomon à :

 élaborer et mettre en place un plan national d’action visant à
éradiquer la violence contre les femmes ;

 solliciter l’aide internationale afin de s’assurer que ce plan
respecte les normes internationales et est appliqué selon ces mêmes règles ;

 mettre en place une équipe de policiers spécifiquement en charge des
problèmes de violence envers les femmes et les enfants, qui travailleraient
en collaboration avec les services de santé ;

 amener les femmes, à égalité avec les hommes, à participer aux
initiatives de développement.

Pour consulter le rapport (en anglais) Solomon Islands : Women confronting
violence, veuillez vous reporter au site
http://web.amnesty.org/library/index/engasa430012004

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