INDE:Des manifestants pacifiques à nouveau pris pour cible dans la vallée de la Narmada

Index AI : ASA 20/015/2003

Jeudi 5 juin 2003

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Amnesty International a appris avec inquiétude que le 4 juin 2003 des
manifestants pacifiques, membres pour la plupart de la communauté adivasi
(aborigène) avaient encore une fois fait l’objet d’arrestations arbitraires
par la police dans la vallée de la Narmada. L’organisation demande que les
poursuites engagées contre les manifestants soient immédiatement
abandonnées, que l’action de la police de Maharashtra fasse l’objet d’une
enquête impartiale dans les meilleurs délais et que des mesures appropriées
soient prises à l’encontre des fonctionnaires responsables.

Dans l’après-midi du 4 juin, 186 sympathisants du Narmada Bachao Andolan
(NBA, Mouvement de sauvegarde de la Narmada) ont été interpellés et détenus
pendant plusieurs heures par la police de Maharashtra pour avoir participé à
une manifestation pacifique (dharna) devant le bureau du Commissioner de
Nashik dans le Maharashtra. Ils demandaient l’arrêt des travaux du barrage
de Sardar Sarovar jusqu’à ce que le programme d’attribution de nouvelles
terres aux familles affectées par le projet soit achevé.

Selon les informations qui nous sont parvenues, les manifestants ont opposé
une résistance pacifique aux tentatives de la police qui voulait emmener à
l’hôpital Medha Patkar - dirigeante du mouvement, en grève de la faim
illimitée depuis le 30 mai 2003. Cent quatre-vint six manifestants ont été
interpellés, mis en garde à vue puis libérés sous caution au cours de la
nuit. Tous ont maintenant à répondre d’incitation à l’émeute, rassemblement
illégal et actions préjudiciables au maintien de l’harmonie. Medha Patkar a
été hospitalisée de force ; elle est actuellement sous perfusion. Malgré
tout, la manifestation pacifique se poursuit, la grève de la faim aussi.

Amnesty International pense que la police de Maharashtra a agi en violation
flagrante du droit à la liberté d’expression et de réunion des 186
manifestants et de leur dirigeante Medha Patkar. Elle a en outre agi
arbitrairement, aucune lien n’ayant été établi entre les manifestants et les
accusations portées contre eux. Les arrestations qui ont eu lieu
s’inscrivent dans une politique d’autoritarisme déjà observée à plusieurs
reprises lors d’opérations policières visant à contrôler des manifestations
pacifiques dans la vallée de la Narmada.

Le droit à la liberté d’expression et de réunion est clairement énoncé dans
la Constitution indienne et dans le Pacte international relatif aux droits
civiques et politiques, auquel l’Inde est partie. La Déclaration des Nations
unies sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de
la société de promouvoir et protéger les droits de l’homme et les libertés
fondamentales universellement reconnus affirme en outre que « Chacun a le
droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la
protection et la réalisation des droits de l’homme et des libertés
fondamentales » et reconnaît que chaque État a la responsabilité de rendre
effectifs ces droits.

Complément d’information

Le Narmada Bachao Andolan est un mouvement populaire qui demande que des
mesures de réhabilitation et de réadaptation équitables soient prises en
faveur des familles que la construction de 30 grands barrages sur le fleuve
Narmada, en Inde centrale, a contraintes au départ, et notamment que des
terres leur soient octroyées. Le mouvement s’oppose actuellement à la
décision prise le 15 mai 2003 par la Narmada Control Authority (NCA) de
faire passer à 100 mètres, au lieu de 95, la hauteur du barrage de Sardar
Sarovar, augmentant ainsi la surface des terres qui seront inondées. Cette
décision survient alors que s’accumulent les preuves montrant que les
demandes les plus élémentaires en matière de réhabilitation et de
réadaptation équitables n’ont pas été prises en compte, même dans le cadre
du projet initial qui prévoyait une hauteur de barrage de 95 mètres. Le
Justice Dam Committee formé à l’initiative du gouvernement et un groupe
d’étude conjoint l’ont confirmé. Les directives du Narmada Water Disputes
Tribunal (NWDT, Tribunal en charge des litiges concernant l’eau de la
Narmada), confirmées par la Cour suprême en 2000, stipulent que les mesures
de réimplantation doivent intervenir au moins six mois avant la submersion
des terres.

Le Mouvement de sauvegarde de la Narmada (NBA) estime qu’au moins trois
mille familles du Maharashtra et douze mille familles du Madhya Pradesh
verront leur droit à la vie et leur droit de disposer de moyens d’existence
bafoués lors de la prochaine mousson ; leurs terres seront inondées du fait
de l’augmentation de la hauteur du barrage, aucune mesure de réhabilitation
équitable n’aura été prise en leur faveur.

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