« Depuis août 2015, l’Inde n’avait procédé à aucune exécution et il est déplorable que quatre hommes aient été mis à mort aujourd’hui au nom de la lutte contre les violences faites aux femmes. Bien trop souvent, les législateurs indiens brandissent la peine de mort comme le symbole de leur détermination à lutter contre la criminalité. Pourtant, ce dont le pays a réellement besoin, ce sont des solutions efficaces, à long terme, qui consisteraient par exemple à mettre en place des mécanismes de prévention et de protection afin de réduire les violences fondées sur le genre, et à améliorer les méthodes d’enquête, les procédures judiciaires et l’accompagnement des familles des victimes. Pour l’heure, ce sont des réformes en profondeur des procédures et des institutions dont l’Inde a besoin, a déclaré Avinash Kumar, directeur d’Amnesty International Inde.
« Bien trop souvent, les législateurs indiens brandissent la peine de mort comme le symbole de leur détermination à lutter contre la criminalité. Pourtant, ce dont le pays a réellement besoin, ce sont des solutions efficaces, à long terme »
« La peine de mort n’est jamais la solution et la reprise des exécutions vient assombrir un peu plus le bilan de l’Inde en termes de droits humains. Les tribunaux indiens ont à plusieurs reprises statué qu’elle était appliquée de manière arbitraire et incohérente. La Commission Verma (du nom du juge la présidant), dont les recommandations devaient permettre de modifier la législation relative aux agressions sexuelles et au viol après l’affaire Nirbhaya, s’était elle aussi opposée à la peine de mort dans les affaires de viol. L’Inde fait partie de la minorité de pays qui maintiennent la peine capitale. En effet, plus des deux tiers des pays du globe, soit 140, l’ont abolie en droit ou en pratique. »
L’affaire du viol collectif de 2012 de New Delhi porte sur un viol et une agression mortelle qui ont eu lieu le 16 décembre 2012, à New Delhi. La victime, une femme de 23 ans, a été battue, soumise à un viol en réunion et torturée alors qu’elle se trouvait à bord d’un bus privé avec son ami.
Cette affaire a fait l’objet d’une large médiatisation nationale et internationale. La législation indienne n’autorisant pas la presse à révéler l’identité des victimes de viol, la jeune femme était généralement désignée par le pseudonyme de Nirbhaya.
En décembre 2012, en réponse aux nombreux appels de la population en faveur de mesures de sécurité renforcées pour les femmes, une commission judiciaire a été mise en place pour étudier et recueillir les propositions de la population quant aux améliorations législatives à apporter afin d’accélérer les enquêtes et les poursuites contre les délinquants sexuels présumés. Après avoir examiné quelque 80 000 propositions, la commission a présenté un rapport qui concluait que les défaillances des autorités et de la police étaient la cause profonde des infractions visant les femmes. Ce document présentait des recommandations sur toute une série de questions ayant des répercussions sur la sécurité des femmes et sur la discrimination fondée sur le genre, allant des lois sur la violence à l’égard des femmes, sur les violences sexuelles envers les enfants et sur les « crimes d’honneur », jusqu’aux principes de détermination des peines, en passant par la mise en œuvre de mesures de sécurité adéquates pour les femmes, d’une réforme de la police et d’une réforme électorale. Le rapport s’opposait au recours à la peine capitale pour sanctionner les viols.
« Nous appelons le gouvernement indien à instaurer immédiatement un moratoire sur les exécutions et à commuer toutes les condamnations à mort, à titre de premières mesures vers l’abolition du châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit », a déclaré Avinash Kumar.
Amnesty International s’oppose en toutes circonstances et sans aucune exception à la peine de mort, quelles que soient la nature et les circonstances du crime commis, la culpabilité ou l’innocence ou toute autre situation du condamné, ou la méthode utilisée pour procéder à l’exécution.