« Les autorités locales de la province de l’Aceh doivent immédiatement renoncer à tout projet d’instauration de la décapitation comme méthode d’exécution et doivent abolir la peine de mort. L’argument des autorités de l’Aceh selon lequel la décapitation pourrait empêcher les homicides est sans fondement et inacceptable. Il n’existe aucun élément prouvant que la peine de mort ait un effet dissuasif particulier sur la criminalité, aussi choquante soit la méthode d’exécution » a déclaré Usman Hamid, directeur d’Amnesty International Indonésie.
« Les autorités de l’Aceh ne peuvent pas utiliser le statut autonome particulier de la province pour mettre en place des lois et des politiques qui bafouent de façon flagrante les droits humains. Les autorités doivent se concentrer sur les causes profondes des infractions, ouvrir un débat éclairé sur la peine de mort en tant que violation des droits humains et prendre rapidement des mesures pour abolir ce châtiment cruel, inhumain et dégradant ».
« Le gouvernement central indonésien doit intervenir et demander, ou ordonner si nécessaire, aux autorités de l’Aceh de renoncer à ce projet. L’Aceh, et plus largement l’Indonésie, doivent instaurer immédiatement un moratoire sur la peine de mort en vue de l’abolir définitivement. »
Complément d’information
Jeudi 15 mars, les autorités de la province de l’Aceh ont annoncé envisager d’instaurer la décapitation comme châtiment pour les homicides. Elles affirment que ce châtiment pourrait réduire le nombre d’homicides en Aceh, voire les empêcher. Les autorités locales ont déclaré qu’elles mèneraient des recherches cette année pour sonder l’opinion publique dans la province à propos de ce projet. Si une majorité de la population de l’Aceh soutient ce projet, il sera mis en œuvre, d’après les autorités. Le gouvernement local a déclaré vouloir suivre les traces de plusieurs pays dans le monde, notamment l’Arabie saoudite, qui ont « réduit le nombre d’homicides » en instaurant la décapitation comme châtiment.
La province conservatrice de l’Aceh est également connue pour infliger des châtiments cruels, inhumains et dégradants, qui souvent s’apparentent à de la torture, comme la fustigation en public pour jeux d’argent ou adultère. Deux hommes arrêtés le 28 mars 2017 et inculpés de relations sexuelles consenties entre personnes du même sexe (liwath) au titre du Code pénal islamique de l’Aceh ont été condamnés à recevoir 83 coups de bâton chacun en public après avoir été déclarés coupables par le tribunal islamique de Banda Aceh. Des règlements régissant l’application de la charia sont en vigueur en Aceh depuis l’adoption de la Loi spéciale relative à l’autonomie en 2001 et sont appliqués par des tribunaux islamiques. C’est la première fois que des hommes homosexuels reçoivent ce châtiment au titre de la charia dans la province. Les relations sexuelles consenties entre personnes du même sexe ne sont pas érigées en infraction dans le Code pénal indonésien, sauf en Aceh.
Amnesty International s’oppose à la peine de mort en toutes circonstances et sans aucune exception, indépendamment de la nature et des circonstances de l’infraction commise, de la situation du condamné, de sa culpabilité ou de son innocence, ou encore de la méthode utilisée pour procéder à l’exécution. À ce jour, 106 pays ont aboli la peine capitale pour toutes les infractions, et plus des deux tiers des pays du monde sont abolitionnistes en droit ou en pratique.