INDONÉSIE - Acquittements pour homicide et torture témoignent d’un échec de la justice

Index AI : ASA 21/018/2005

L’acquittement ce jeudi 8 septembre 2005 de deux hauts responsables de la police accusés d’avoir autorisé un homicide sur la personne de trois étudiants papous et des actes de torture à l’encontre de centaines d’autres, montre de manière préoccupante qu’une fois encore les forces de sécurité indonésiennes échappent à la justice.

L’affaire remonte au 7 décembre 2000 : des agents sous le commandement de deux policiers de haut rang, Johny Wainal Usman et Daud Sihombing, font une descente dans une résidence universitaire à Abepura, dans la province indonésienne de Papouasie. Un étudiant est abattu lors du raid et plus d’une centaine d’autres, parmi lesquels se trouvent une femme enceinte et des enfants dont certains n’ont pas plus de sept ans, sont arrêtés et torturés. Deux étudiants meurent sous la torture, un autre reste paralysé à vie.

« La décision de justice rendue aujourd’hui signifie que pas un seul membre des forces de sécurité indonésiennes n’a été reconnu coupable de ces crimes atroces après quasiment cinq ans d’enquête et de procédure, a déclaré Natalie Hill, directrice adjointe du programme Asie-Pacifique d’Amnesty International. Ce jugement prive aussi les victimes de toute indemnisation. »

« Le message que cette décision envoie aux victimes de graves atteintes aux droits humains est contraire à la volonté de réforme affichée par le gouvernement et à la mise en place de tribunaux spécialisés dans les droits humains. »

De nombreuses irrégularités ont été signalées au sujet de l’enquête et du procès qui ont débouché sur cet acquittement :

 lors de l’enquête préliminaire de la Commission nationale des droits humains (Komnas HAM), les policiers n’ont pas coopéré avec les enquêteurs ;

 l’équipe d’enquêteurs de la Komnas HAM a regretté publiquement que des témoins aient été intimidés par la police et que des policiers aient refusé de répondre correctement à ses questions ;

 deux enquêteurs ont par la suite été convoqués pour interrogatoire par la police, ce qui a été généralement interprété comme une mesure destinée à les intimider ;

 le rapport des enquêteurs citait 25 suspects mais seules deux de ces personnes ont été inculpées par le bureau du procureur général, sans plus d’explications ;

 les suspects sont restés libres et en service actif pendant le procès ;

 alors que la loi requiert que les procès devant le tribunal chargé des droits humains ne durent pas plus de six mois, celui-ci a subi de nombreux reports et duré seize mois au total, prolongeant ainsi la détresse des victimes et des témoins.
Depuis leur création il y a cinq ans, les tribunaux chargés des droits humains n’ont pas rendu justice pour les graves violations des droits humains.

Le tribunal spécial des droits humains pour le Timor oriental a acquitté 17 des 18 personnes inculpées des crimes contre l’humanité commis en 1999, et la seule personne poursuivie reste libre en attendant qu’il soit statué sur son appel.

Plus tôt dans l’année, la cour d’appel indonésienne a acquitté 12 soldats de toute implication dans le massacre de « Tanjung Priok » : nul n’a donc été reconnu coupable dans cette affaire où les forces de sécurité ont tué au moins 33 civils.

« Ces dénis de justice et cette persistance de l’impunité montrent les défaillances de l’appareil judiciaire et le manque de volonté politique ; ils créent un précédent préoccupant pour les autres cas de violations graves des droits humains faisant l’objet d’enquêtes », a conclu Natalie Hill.

« L’arrêt d’aujourd’hui risque de donner aux forces de sécurité indonésiennes le feu vert pour de futures violations des droits humains. »

D’autres documents sur le même sujet se trouvent sur le site de l’organisation :

 Indonésie (Papouasie). Quatre ans exactement après les raids d’Abepura, l’impunité persiste en Papouasie (index AI : ASA 21/052/2004) ;

 Indonésie. Cinq organisations internationales appellent les Nations unies à résoudre la question de la justice pour les violations commises au Timor oriental (index AI : ASA 21/023/2004)

 Indonésie. Des mesures urgentes sont nécessaires pour rendre justice aux victimes d’atteintes aux droits humains en Papouasie (index AI : ASA 21/017/2004)

 Indonésie / Timor-Leste. Justice pour le Timor-Leste : les Nations unies traînent des pieds tandis que les coupables sont en liberté (index AI : ASA 21/013/2004).

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