Indonésie. Des obstacles empêchent les femmes d’avoir pleinement accès à la santé en matière de procréation

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

ÉFAI

4 novembre 2010

Embargo : 4 novembre 2010, 10 h 00 heure de Djakarta (03 h 00 TU)

Selon un nouveau rapport d’Amnesty International, de nombreuses Indonésiennes, en particulier celles issues de milieux pauvres et marginalisés, ont du mal à accéder à la santé en matière de procréation en raison de lois, de politiques et de pratiques discriminatoires.
Intitulé Left Without a Choice, ce rapport décrit comment les restrictions imposées par les autorités et les traditions discriminatoires menacent la vie de nombreuses femmes et jeunes filles indonésiennes en les empêchant d’accéder aux services de santé reproductive.
« Le gouvernement indonésien s’est engagé à accroître l’égalité entre hommes et femmes, mais de nombreuses Indonésiennes ont toujours du mal à obtenir un traitement équitable et égal, a déclaré Salil Shetty, secrétaire général d’Amnesty International. Une association d’attitudes sociales non remises en cause, de lois inéquitables et de rôles stéréotypés liés au genre relègue souvent les femmes à un statut de seconde classe. »

Les recherches effectuées par Amnesty International montrent comment des pratiques discriminatoires et des lois problématiques restreignent l’accès à la contraception pour les femmes et les jeunes filles non mariées et autorisent le mariage précoce de filles âgées de moins de 16 ans. La législation oblige en outre les femmes à obtenir l’accord de leur mari pour accéder à certaines méthodes contraceptives, ou à un avortement si leur vie est en jeu.

Par ailleurs, Amnesty International a constaté que les professionnels de santé refusent fréquemment l’ensemble des services contraceptifs légalement disponibles aux femmes non mariées, ou mariées sans enfants.
Même si le gouvernement a pris des mesures pour améliorer la protection des femmes victimes de violence, il ne fait pas le nécessaire pour que celles ayant subi un viol puissent accéder à l’information et aux services liés à la santé. Bien que l’avortement soit légal pour les femmes et les jeunes filles qui tombent enceintes à la suite d’un viol, peu de personnes le savent, même parmi les professionnels de santé, et les victimes de viol peuvent être confrontées à des obstacles de taille pour accéder à des services d’interruption de grossesse sans danger.

Des entretiens avec plusieurs dizaines d’Indonésiennes, ainsi qu’avec des professionnels de santé, ont fait apparaître que ces restrictions augmentent les grossesses non désirées et forcent de nombreuses femmes et jeunes filles à se marier jeunes ou à abandonner leur scolarité. Beaucoup d’autres choisissent d’avorter illégalement. On estime que 2 millions d’interruptions de grossesse sont pratiquées en Indonésie chaque année, la plupart du temps dans des conditions dangereuses. D’après les chiffres officiels fournis par les autorités, les avortements à risque sont à l’origine de 5 à 11 % des décès liés à la maternité dans le pays.
Le cas de Sharifah est un exemple typique. Quand elle est tombée enceinte à 17 ans, son petit ami l’a quittée et son établissement scolaire l’a renvoyée. Des guérisseuses de son village l’ont fait avorter, mais elle a rapidement souffert de complications. Au bout de deux jours, elle est morte d’une hémorragie.
« Les restrictions des droits en matière de sexualité et de procréation représentent des obstacles graves et potentiellement fatals dans la façon dont nombre de femmes et de jeunes filles peuvent accéder à l’information et aux services liés à la santé reproductive, a souligné Salil Shetty. Les Indonésiens doivent faire davantage d’efforts pour que les anciens stéréotypes et mentalités soient remplacés par une reconnaissance plus progressiste des problèmes et des besoins que connaissent leurs épouses, leurs sœurs et leurs filles. »

Amnesty International s’est aperçue que certains groupes de femmes et de jeunes filles sont confrontés à des menaces supplémentaires pour leurs droits en matière de sexualité et de procréation car l’État ne les protège pas dans des situations de vulnérabilité. Les employées de maison, par exemple, encourent des risques spécifiques de violence car elles ne sont pas pleinement protégées par la loi en tant que travailleuses, alors que leurs conditions de travail les exposent à un risque accru de violence et de harcèlement sexuels, et elles risquent d’être maltraitées lorsqu’elles sont enceintes.

« Le gouvernement indonésien a fait beaucoup d’efforts pour honorer son engagement vis-à-vis des Objectifs du millénaire pour le développement, notamment en matière d’égalité des genres et de santé maternelle, a ajouté Salil Shetty. Avec ce rapport, nous avons mis en évidence les domaines primordiaux dans lesquels la législation doit être réformée, ou beaucoup mieux appliquée, afin de venir à bout des pratiques et des normes sociales discriminatoires qui rendent les femmes impuissantes et mettent leur santé en péril. »

Amnesty International milite pour les droits des personnes à la santé en matière de sexualité et de procréation et pour leur autonomie – en Indonésie et partout dans le monde – dans le cadre de sa campagne Exigeons la dignité. Cette campagne appelle notamment les gouvernements à faire en sorte que toute personne puisse accéder à l’information et aux services liés à la santé en matière de sexualité et de procréation sans discrimination, sans contrainte et sans menace de poursuites pénales.

Amnesty International engage les autorités indonésiennes à adopter les mesures suivantes en priorité :

 ? abroger toutes les lois et règlements, tant au niveau central que local, qui bafouent les droits en matière de sexualité et de procréation, en veillant à ce que les femmes et les jeunes filles puissent jouir de leurs droits sans subir de discrimination, de contrainte ou de menace de poursuites pénales ;

 ? dépénaliser l’avortement en toutes circonstances afin de lutter contre le nombre élevé d’avortements illégaux et dangereux, en garantissant l’accès à des services d’avortement sûrs en cas de grossesse non désirée à la suite d’un viol ou quand une grossesse menace la vie ou la santé d’une femme ou d’une jeune fille ;

 ? adopter une loi relative aux employés de maison qui soit conforme aux normes internationales, en s’assurant que les femmes et les jeunes filles exerçant cette profession bénéficient du même niveau de protection que les autres travailleurs en Indonésie et que des dispositions portant sur les besoins spécifiques des femmes, notamment sur la maternité, soient incluses dans cette loi.

Toutes les infos
Toutes les actions
2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit