Communiqué de presse

Indonésie. Des villageois chiites risquent d’être expulsés sur fond d’atteinte à la liberté de religion

La menace de réinstallation forcée visant des chiites qui bénéficient actuellement d’une mesure d’hébergement provisoire dans la province de Java-Est est une preuve supplémentaire de la discrimination perpétuelle dont sont victimes les minorités religieuses en Indonésie, a déclaré Amnesty International.

Selon les estimations, 165 chiites, dont 48 enfants, vivent dans des conditions précaires dans un complexe sportif du district de Sampang, sur l’île de Madura, depuis août 2012. Ils ont été déplacés après l’attaque de leur village par une foule.

Des sources locales dignes de foi ont indiqué à Amnesty International que les autorités avaient donné aux villageois concernés jusqu’en mars pour se convertir au sunnisme, courant islamique majoritaire dans le pays, s’ils souhaitaient rentrer chez eux.

« Les autorités indonésiennes doivent permettre à ces chiites, dans le respect de leurs souhaits, de rentrer chez eux en toute sécurité, de manière volontaire et avec dignité, et les aider à reconstruire les maisons endommagées ou détruites
, a expliqué Isabelle Arradon, du programme Asie et Pacifique d’Amnesty International.

« Elles doivent aussi mettre fin aux discriminations dont sont victimes les minorités religieuses dans le pays et enquêter sur les allégations selon lesquelles les autorités locales et provinciales obligeraient les chiites à renoncer à leur foi afin de pouvoir rentrer chez eux.

« Les auteurs présumés de l’attaque perpétrée en août doivent être traduits en justice dans le cadre de procédures conformes aux normes internationales d’équité, sans encourir la peine de mort. »

En outre, les conditions de vie des villageois déplacés sur leur lieu d’hébergement temporaire n’ont cessé de se détériorer.

Depuis le 1er janvier, la police de la province de Java-Est a démobilisé les agents qui assuraient leur protection.

Fin décembre, les autorités locales ont arrêté l’approvisionnement en vivres et la prestation de services médicaux. Elles avaient déjà suspendu l’approvisionnement en denrées alimentaires le 22 novembre, avant de le rétablir le 4 décembre. Plusieurs enfants sont tombés malades ces dernières semaines.

« Les autorités indonésiennes doivent veiller à ce que les villageois aient immédiatement accès aux biens et services de première nécessité comme les denrées alimentaires et les soins de santé. En particulier, elles doivent faire le nécessaire pour que les enfants malades puissent bénéficier des soins médicaux dont ils ont besoin », a ajouté Isabelle Arradon.

Les personnes concernées sont des habitants du village de Karang Gayam, dans le district de Sampang. Elles ont été déplacées en août 2012, lorsque quelque 500 personnes hostiles au chiisme les ont attaquées à coups d’armes tranchantes et de pierres.

Ces événements ont fait un mort et des dizaines de blessés. Les assaillants ont également incendié 35 maisons appartenant à des villageois chiites. Pour l’instant, cinq personnes ont été inculpées dans le cadre de cette affaire.

En mai 2012, à l’occasion de l’Examen périodique universel devant le Conseil des droits de l’homme, le gouvernement indonésien a réitéré son engagement à protéger la liberté de religion et à traiter les affaires d’intolérance religieuse.

Pourtant, les groupes religieux minoritaires en Indonésie, notamment les communautés chiite, ahmadie et chrétienne, sont toujours victimes de harcèlement, de manœuvres d’intimidation et d’agressions. Plusieurs de leurs membres ont été déplacés à la suite d’attaques et les personnes qui commettent des actes de violence à leur encontre sont rarement punies.

Ainsi à Lombok, dans la province de Nusa Tenggara Timur (Petites Îles de la Sonde orientales), des membres de la communauté ahmadie vivent depuis six ans dans des logements précaires car leurs habitations ont été incendiées par une foule en février 2006. Les autorités n’ont pas résolu leur problème ni traduit en justice les responsables présumés de l’attaque.

Le droit à la liberté de religion ou de croyance est garanti par l’article 18(1) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), auquel l’Indonésie est partie.

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