Lors d’une descente dans un sauna de Djakarta le 6 octobre à 20 h 00, la police a interpellé 51 personnes pour leur participation à une présumée partie fine homosexuelle. Après avoir libéré la plupart d’entre elles, la police a accusé cinq employés du sauna et son propriétaire - qui n’a, lui, pas été arrêté - de pornographie et de prostitution. Ces chefs d’inculpation sont prévus par les articles 4 et 30 de la Loi de 2008 relative à la pornographie et par l’article 296 du Code pénal, relatif à la prostitution.
La Loi relative à la pornographie définit ce terme de manière très large, comme englobant tout matériel qui « enfreint les normes de la moralité de la communauté », et prévoit une peine d’emprisonnement pouvant aller de quatre à quinze ans pour les personnes qui produisent, diffusent, financent ou utilisent ce matériel, ou qui fournissent des services à caractère pornographique. Des lois formulées en termes ambigus sur la pornographie sont souvent exploitées pour s’en prendre délibérément aux personnes LGBTI, les privant du droit fondamental à la vie privée et du droit d’avoir des relations sexuelles consenties.
L’homosexualité n’est pas illégale aux termes du droit national indonésien, sauf dans la province de l’Aceh, qui applique le Code pénal islamique (Qanun Jinayat). En mai 2017, deux hommes de cette région ont reçu 83 coups de bâton après avoir été maintenus en détention pendant deux mois. C’est la première fois que des hommes homosexuels ont reçu ce châtiment en application des dispositions du Qanun Jinayat relatives à la sodomie (liwat) dans la province. En mai, néanmoins, 141 hommes ont été arrêtés à Djakarta après avoir participé à ce que la police a décrit comme une « partie fine homosexuelle ». Au moins trois descentes de police ont visé les personnes LGBTI en Indonésie cette année.
Amnesty International s’inquiète également de la progression de la discrimination dont souffrent les personnes LGBTI sous l’effet d’une série de restrictions et de déclarations acharnées, incendiaires et inexactes dont les représentants de l’État sont responsables depuis deux ans sous le prétexte de « défendre la moralité publique ».
En février 2016, la police a dispersé les participants à un atelier organisé à Djakarta par une ONG de premier plan œuvrant à la défense des droits des personnes LGBTI, et a empêché un rassemblement pacifique pro-LGBTI de se tenir à Yogyakarta. Le même mois, la Commission indonésienne de l’audiovisuel a publié une lettre recommandant à toutes les chaînes de télévision et stations de radio d’interdire les programmes faisant la promotion des activités LGBTI, dans le but de « protéger les enfants ». Toujours en février, alors que les discours anti-LGBTI s’intensifiaient, l’école islamique Al Fatah pour les personnes transgenres, à Yogyakarta, a été forcée de fermer après avoir fait l’objet de menaces et de manœuvres d’intimidation de la part du Front islamique djihadiste.
Amnesty International demande instamment aux autorités indonésiennes de mettre un terme aux pratiques discriminatoires à l’encontre des personnes LGBTI.
En septembre 2017, à l’occasion de l’Examen périodique universel de l’Indonésie au Conseil des droits de l’homme des Nations unies, le gouvernement a accepté les recommandations suivantes :
– « veiller à ce que les dispositions juridiques et constitutionnelles protégeant les droits de l’homme [...] soient pleinement mises en œuvre à l’échelle nationale ;
– abroger les arrêtés locaux discriminatoires contraires à la Constitution indonésienne ; -
– accorder un rang de priorité élevé aux questions d’égalité et de non-discrimination, y compris en ce qui concerne les lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres ».
Après une telle avancée, le gouvernement indonésien devrait garantir la protection des personnes LGBTI et mettre en place un environnement favorisant davantage leur intégration.