Irak. « Aveux » télévisés, actes de torture et procès inéquitables en toile de fond des exécutions perpétrées dans ce pays, quatrième dans le monde en termes d’application de la peine capitale

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

MDE 14/020/2007

Les autorités irakiennes imposent de plus en plus souvent la peine capitale, y compris après des « aveux » télévisés faits avant procès, en l’absence de toute enquête sur des allégations de torture ou à l’issue de procès inéquitables, selon un nouveau rapport d’Amnesty International.

Avec l’exécution d’au moins 65 personnes l’année dernière, l’Irak est devenu le quatrième pays où la peine capitale est la plus appliquée, après la Chine, l’Iran et le Pakistan.

Depuis le rétablissement de la peine de mort au milieu de l’année 2004, plus de 270 personnes ont été condamnées à mort et une centaine au moins ont été exécutées. La diffusion des « aveux » télévisés a cessé fin 2005, mais beaucoup de ceux qui sont apparus lors de ces émissions sont en attente de leur exécution ou ont été exécutés.

« L’augmentation dramatique de la fréquence du recours à ce châtiment cruel, inhumain et dégradant représente un retour dangereux aux erreurs brutales du passé, notamment parce que tant d’exécutions ont lieu après des procès inéquitables , des « aveux » télévisés et sans qu’il y ait eu enquête sur les allégations de torture, a déclaré Malcolm Smart, directeur du programme Afrique du Nord et Moyen Orient d’Amnesty International. En dépit des justifications officielles présentant la peine de mort comme dissuasive, l’augmentation de la violence dans les rues irakiennes laisse supposer que le rétablissement de la peine capitale n’a fait que contribuer à rendre plus brutale encore la société irakienne. »

Le rapport intitulé Unjust and unfair : the death penalty in Iraq s’appuie sur l’examen par Amnesty International de centaines de condamnations prononcées par le Tribunal pénal central d’Irak et des témoignages des familles des personnes condamnées, ainsi que de leurs avocats. Il comprend également une analyse détaillée des lois irakiennes qui mettent en péril le droit à un procès équitable.

Parmi les principales conclusions du rapport, on peut citer :
  des enquêtes insuffisantes ou inexistantes sur les allégations de torture en dépit d’un recours fréquent aux « aveux » faits en détention afin d’obtenir des condamnations pour des infractions punies de la peine de mort ;
  des « aveux » télévisés avant procès et la prise en compte lors des procès d’éléments de preuve désignant les accusés fournis par des témoins ayant vu les « aveux » télévisés ;
  l’absence de possibilité pour les avocats de la défense de rencontrer leurs clients librement et les actes d’intimidation à l’égard des avocats, notamment sous forme de menaces et d’agressions ;
  une définition vague et beaucoup trop générale des infractions passibles de la peine capitale en droit irakien, lesquelles incluent notamment les enlèvements sans assassinat et les dommages aux biens publics dans le but de porter atteinte à la sécurité ou à la stabilité.

Amnesty International s’oppose à la peine de mort en toutes circonstances parce qu’elle constitue une violation du droit à la vie et le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit. Au niveau international, le rétablissement de la peine de mort en Irak représente également un sérieux retour en arrière. Début 2007, pas moins de 128 pays avaient pris la décision importante d’abolir la peine capitale en droit ou en pratique, ce qui représente en moyenne plus de trois pays par an au cours des dix dernières années.

« La façon choquante dont s’est déroulée l’exécution de Saddam Hussein a mis au jour la cruauté grotesque de la peine capitale en Irak, pourtant il ne s’agissait là que de l’une des 65 exécutions au moins qui se sont produites l’année dernière et dont le nombre ne cesse d’augmenter, a déclaré Malcolm Smart. Amnesty International appelle le gouvernement irakien à décréter immédiatement un moratoire sur les exécutions, à commuer toutes les peines capitales déjà prononcées et à veiller à ce que les normes les plus rigoureuses en matière d’équité des procès soient appliquées et respectées. Sans une action de ce type, l’Irak continuera d’être soumis à l’héritage brutal de son passé. »

Une copie du rapport Unjust and unfair : the death penalty in Iraq est disponible sur le site http://web.amnesty.org/library/index/engmde140142007

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