Irak. Cinq années de carnage et de désespoir

Cinq ans après le renversement du régime de Saddam Hussein par la coalition conduite par les États-Unis, l’Irak demeure l’un des pays les plus dangereux au monde, a déclaré Amnesty International ce lundi 17 mars 2008.

Dans son nouveau rapport, Carnage and Despair, l’organisation affirme que les attaques et les homicides motivés par l’intolérance religieuse et perpétrés par les groupes armés, la torture et les mauvais traitements imputables aux forces gouvernementales irakiennes et la détention prolongée de milliers de suspects par les forces américaines et irakiennes ont eu des conséquences tragiques, forçant plus de quatre millions d’Irakiens à fuir leur foyer. Nombre de prisonniers sont détenus sans inculpation ni jugement, parfois pendant des années.

Des millions de dollars ont été dépensés pour la sécurité. Pourtant, aujourd’hui, deux Irakiens sur trois n’ont toujours pas accès à l’eau potable et près d’un sur trois – quelque huit millions de personnes – survit grâce à l’aide d’urgence.

« Le régime de Saddam Hussein était synonyme de violations des droits humains, a déclaré Malcolm Smart, directeur du programme Moyen-orient et Afrique du Nord d’Amnesty International, mais son renversement n’a apporté absolument aucun répit au peuple irakien. »

Des milliers de personnes ont été tuées ou mutilées et les communautés qui vivaient autrefois en relative harmonie se retrouvent en conflit ouvert. Ce sont les civils qui paient le plus lourd tribut à cette situation. Pour de nombreuses femmes, désormais exposées aux violences des militants religieux, les conditions de vie se sont détériorées depuis l’époque de Saddam Hussein.

D’après le rapport, même dans la région kurde du nord de l’Irak, relativement pacifique, la croissance économique n’a pas été accompagnée d’un plus grand respect des droits humains.

« Des arrestations et des détentions arbitraires, ainsi que des actes de torture, continuent d’être signalés, même dans les provinces kurdes, a indiqué Malcolm Smart. L’opposition politique pacifique n’est guère tolérée. Les opposants politiques sont maintenus en détention sans jugement et les prétendus crimes " d’honneur " – lorsque des femmes sont tuées par des membres de leurs familles – demeurent un fléau bien ancré que les autorités dénoncent mais ne s’attachent pas à combattre comme il se doit. »

Nul ne sait exactement combien de personnes ont été tuées en Irak depuis l’invasion conduite par les États-Unis en mars 2003. Selon la plus grande enquête, menée conjointement par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et le gouvernement irakien et publiée en janvier 2008, plus de 150 000 personnes ont été tuées entre mars 2003 et juin 2006. D’après les Nations unies, près de 35 000 personnes ont trouvé la mort en 2006, dernière année pour laquelle des chiffres sont disponibles.

Le problème persistant de l’insécurité a miné les initiatives visant à rétablir l’ordre. Toutefois, lorsque les autorités irakiennes ont été en mesure de faire respecter les droits humains, elles n’ont guère marqué d’empressement en la matière. Les procès iniques sont monnaie courante, des condamnations étant prononcées sur la base d’éléments de preuve extorqués sous la torture, et des centaines de personnes ont été condamnées à mort.

« C’est l’un des aspects les plus inquiétants pour l’avenir, a conclu Malcolm Smart. Même confrontées à des preuves accablantes de torture perpétrée sous leur surveillance, les autorités irakiennes n’ont pas traduit les auteurs de ces agissements en justice – et les États-Unis et leurs alliés se sont abstenus de l’exiger. »

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