Communiqué de presse

Irak : il faut que les tirs de l’armée sur des manifestants antigouvernementaux fassent l’objet d’une enquête

Une enquête conforme aux normes internationales doit être immédiatement menée sur les homicides dont ont été victimes des manifestants, a déclaré Amnesty International vendredi 25 janvier. Plusieurs personnes sont mortes à Falloujah lorsque l’armée a tiré sur des manifestants, qui auraient lancé des pierres dans leur direction.?

Plusieurs autres personnes auraient été blessées lors de la manifestation de vendredi, qui s’inscrit dans le cadre d’un mouvement plus vaste de protestation pacifique contre le gouvernement et la manière dont il traite les détenus.

« Les autorités irakiennes doivent veiller à ce que les investigations sur ces homicides soient indépendantes et impartiales, et qu’elles rendent publics la méthode utilisée pour cette enquête et les résultats obtenus, a déclaré Ann Harrison, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International. Toute personne dont l’enquête révélera qu’elle est responsable de violences, y compris de l’utilisation d’une force excessive contre les manifestants, devra être déférée à la justice. »

« Les autorités doivent également veiller à ce que les forces de sécurité bénéficient d’un équipement et d’une formation adaptés aux opérations de maintien de l’ordre lors de manifestations afin qu’elles puissent faire face à ces événements dans le respect des droits fondamentaux, y compris lorsque certains manifestants deviennent violents.
 »

Il y a eu des informations contradictoires quant à ce qui a provoqué les tirs des soldats irakiens. Par la suite, d’autres affrontements ont éclaté et des véhicules de l’armée ont été incendiés. Des personnes ont affirmé que des soldats irakiens avaient aussi été blessés à cette occasion.

Le Code de conduite pour les responsables de l’application des lois [ONU] et les Principes de base sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois [ONU] établissent des normes précises en ce qui concerne les opérations de maintien de l’ordre lors des manifestations, y compris pour les forces armées.

Depuis décembre dernier, des dizaines de milliers d’Irakiens, principalement sunnites, manifestent leur mécontentement à l’égard du gouvernement du Premier ministre Nouri al Maliki, lui-même chiite, et protestent contre la discrimination dont ils se sentent victimes en Irak. Ces manifestations quotidiennes, et dans la grande majorité des cas pacifiques, ont lieu principalement dans les provinces à majorité sunnites, Anbar, Mossoul et Salah al Din.

Le mouvement de protestation a été déclenché par l’arrestation, sous l’accusation d’actes de terrorisme, de plusieurs gardes du corps du ministre des Finances Rafie al Issawi, dirigeant politique sunnite. De nombreux sunnites ont considéré que ces arrestations avaient un caractère politique. Il est à craindre que les tensions interconfessionnelles ne donnent lieu à de nouvelles violences.

Les attentats à l’explosif de groupes armés contre des civils sont encore fréquents. Des dizaines de personnes qui célébraient la fête religieuse chiite d’Arbaeen ont été tuées à la fin du mois dernier ; cette semaine des attentats à la voiture piégée ont fait plusieurs morts à Bagdad et plus de 20 personnes ont été tuées par un kamikase dans une mosquée chiite à Touz Khourmatou.

Les manifestants demandent des mesures législatives - notamment l’adoption d’une loi d’amnistie et la révision de la législation antiterroriste - et qu’il soit mis fin aux violations des droits humains contre les prisonniers et les détenus en Irak.

Cela fait des années qu’Amnesty International recense des cas de personnes torturées alors qu’elles sont détenues au secret ; de décès en détention dûs vraisemblablement à des actes de torture ; de détenus contraints à « avouer » sous la torture, et de procès iniques se soldant dans certains cas par des condamnations à mort.

Quelques jours avant le début des manifestations, Amnesty International avait soumis au gouvernement irakien des dizaines de cas de violations des droits humains à l’encontre de détenus et de prisonniers. L’organisation n’a toujours pas reçu de réponse du gouvernement à ce sujet.

L’un des cas soumis aux autorités par l’organisation est celui de quatre hommes torturés alors qu’ils étaient détenus au secret pendant plusieurs semaines à la Direction de la lutte contre le terrorisme à Ramadi, dans la province d’Anbar, avant d’être finalement libérés en avril 2012. Leurs « aveux » ont ensuite été diffusés sur une chaîne de télévision locale.

Lors de leur procès devant le tribunal d’Anbar, les quatre hommes ont indiqué que ces « aveux » avaient été obtenus sous la torture. Le compte rendu médical fourni au tribunal pour l’un des accusés faisait état de marques de coups et de brûlures confirmant ses allégations.

« À notre connaissance, aucune enquête officielle n’a été menée sur ces allégations de torture », a déclaré Ann Harrison.

« Il est impératif que ce cas et les dizaines d’autres que nous avons soumis aux autorités irakiennes fassent l’objet d’investigations sans tarder, et ceci est d’autant plus urgent que ces hommes ont été condamnés à mort. »

« Les auteurs d’actes de torture doivent savoir qu’ils devront faire face aux conséquences de leurs actes ; les victimes ont le droit à la vérité, à la justice et aux réparations. »

Les quatre hommes ont été condamnés à mort le 3 décembre 2012, en application de la Loi antiterroriste irakienne.

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