Irak. Le projet de résolution des Nations unies ne s’emploie pas à résoudre la crise humanitaire ni à restaurer les droits humains


COMMUNIQUÉ DE PRESSE

MDE 14/038/2007

Amnesty International a exprimé ce vendredi 3 août sa vive préoccupation quant au fait que le projet de résolution soumis au Conseil de sécurité pour la prolongation du mandat de la Mission d’assistance des Nations unies pour l’Irak (MANUI) ne tient pas compte de la crise humanitaire et de la situation catastrophique des droits humains en Irak, que les plus hauts responsables des Nations unies ont pourtant mis en évidence, et qu’il n’y apporte donc pas de solution digne de ce nom.

En juin, le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon a mis l’accent sur l’augmentation considérable du nombre de personnes placées en détention à l’issue des opérations intensives de sécurité, et le responsable des opérations humanitaires de l’ONU a insisté sur le fait que l’Irak était confronté désormais au plus grand déplacement de population enregistré au Moyen-Orient au cours des dernières années.

« Le projet de résolution ne fait aucune allusion aux graves atteintes aux droits humains commises quotidiennement en Irak ni à l’aggravation de la crise humanitaire dans le pays, a déclaré Irene Khan, secrétaire générale d’Amnesty International.

« Il faut que le Conseil de sécurité renforce le texte de la résolution et exprime son inquiétude face aux atteintes aux droits humains qui ne cessent d’être commises et à leurs conséquences désastreuses sur la situation humanitaire dans le pays. Le Conseil de sécurité doit prendre en considération les homicides motivés ou non par l’intolérance religieuse dont se rendent coupables les groupes armés et les forces gouvernementales contre des civils ; le maintien en détention sans inculpation ni jugement de milliers d’Irakiens par les forces de sécurité irakiennes et la Force multinationale conduite par les États-Unis ; les nombreuses informations faisant état d’actes de torture ; l’accroissement considérable du nombre de condamnations à mort et les autres violations manifestes des droits humains les plus élémentaires.

« Le minimum que le Conseil de sécurité puisse faire est de demander à toutes les parties concernées de mettre fin à ces violations et d’empêcher qu’elles ne se reproduisent, de protéger les civils, y compris les personnes déplacées à l’intérieur du pays et les autres personnes vulnérables, et de mettre fin à l’impunité dans le pays. Nous appelons le Conseil de sécurité à renforcer le mandat et les ressources de la MANUI afin qu’elle soit en mesure de surveiller, promouvoir et protéger les droits de la personne. Formulées dans des termes vagues et inadaptées à la situation, les dispositions relatives aux droits humains qui figurent dans le projet de résolution actuel doivent être revues et donner à la MANUI un mandat sans équivoque lui permettant de surveiller la situation des droits humains en Irak, de l’analyser, d’en faire état publiquement et de contribuer à la protection de ces droits dans tout le pays.

« Le Conseil de sécurité doit également prendre en compte le problème des réfugiés et la nécessité de fournir de toute urgence une aide humanitaire aux plus de deux millions de personnes déplacées à l’intérieur du pays. »

Complément d’information

Le Conseil de sécurité est en train d’examiner un projet de résolution sur la MANUI, dont le mandat prend fin le 9 août 2007 ; il est prévu que la mission fasse désormais la promotion du dialogue et de la réconciliation nationale, qu’elle apporte son soutien à une réforme constitutionnelle et qu’elle facilite le dialogue dans la région sur les questions de sécurité et la situation des réfugiés.

Le projet de résolution ne fait pas état de la situation humanitaire et des droits humains dans le pays, ni ne mentionne la nécessité de protéger les civils ; il propose que la mission ait pour mandat d’aider au retour des réfugiés et des personnes déplacées dans des bonnes conditions, mais n’évoque pas la nécessité de contribuer à leur protection. Le projet donne également pour mandat à la MANUI, dans des termes aussi vagues que dans la résolution 1546 du Conseil de sécurité, de « promouvoir la protection des droits de l’homme, la réconciliation nationale et la réforme judiciaire et juridique en vue de renforcer l’état de droit en Irak ». Dans son dernier rapport au Conseil de sécurité au sujet de l’Irak, en juin 2007 (S/2007/330), le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon mettait en évidence « un certain nombre de préoccupations urgentes dans le domaine des droits de l’homme », dont l’augmentation du nombre de personnes détenues sans inculpation ni jugement pour des raisons de sécurité à la suite de l’intensification des opérations de sécurité. Ce serait un des effets directs du déploiement supplémentaire de soldats de l’armée américaine dans la région de Bagdad décidé dans le cadre de l’accroissement des opérations militaires dans les zones considérées comme des bastions d’extrémistes religieux.

Pour le secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, John Holmes, la situation en Irak constitue l’une des crises humanitaires les plus importantes et qui se répandent le plus vite ; le pays est le théâtre du plus grand déplacement de population au Moyen-Orient des dernières années : un Irakien sur sept a fui son domicile.

Amnesty International a souligné le risque que n’éclate une nouvelle crise humanitaire pouvant entraîner, événement sans précédent, le déplacement de force de trois millions d’Irakiens. La guerre interconfessionnelle entre Irakiens chiites et sunnites a contraint plus de deux millions d’Irakiens à fuir le pays, principalement vers la Syrie et la Jordanie, et a fait passer à plus de deux millions le nombre de personnes déplacées de force à l’intérieur du pays.

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