IRAK - Les poursuites judiciaires menacent la liberté d’expression dans le nord de l’Irak

Index AI : MDE 14/016/2006

DÉCLARATION PUBLIQUE

Amnesty International est très préoccupée par les poursuites engagées contre deux auteurs de critiques visant les autorités kurdes dans le nord de l’Irak et la menace que représentent ces poursuites pour la liberté d’expression dans cette région kurde semi-autonome.

Kamal Sayid Qadir, ressortissant autrichien d’origine kurde, est emprisonné depuis octobre 2005, prétendument pour avoir diffamé des dirigeants politiques kurdes, tandis que Hawez Hawezi, professeur de l’enseignement secondaire et journaliste, risque des poursuites, également pour diffamation.

Kamal Sayid Qadir avait été jugé une première fois en décembre 2005 par le second tribunal pénal d’Arbil. Il était inculpé de diffamation, après la diffusion sur internet de deux articles dans lesquels il critiquait avec force la direction du Parti démocratique du Kurdistan (PDK), l’un des deux partis aux commandes de cette région à dominante kurde, dans le nord de l’Irak. Le procès, à l’issue duquel Kamal Sayid Qadir avait été condamné, s’était déroulé dans des conditions non conformes aux normes internationales d’équité. Kamal Sayid Qadir avait nié les charges pesant contre lui ; il aurait présenté des preuves à l’appui de ses critiques des dirigeants du Parti démocratique du Kurdistan (PDK). Il avait malgré tout été condamné à la peine extraordinairement lourde de trente années de réclusion. Sa condamnation avait ensuite été annulée par la Cour de cassation et le dossier renvoyé devant un tribunal pénal d’Arbil pour un nouveau procès. Le 26 mars 2006, le tribunal a condamné Kamal Sayid Qadir à dix-huit mois d’emprisonnement.

Lors de sa période de détention précédant le procès de décembre 2005, Kamal Sayid Qadir aurait été détenu au secret et maintenu à l’isolement pendant trois jours, au cours desquels on lui aurait refusé toute nourriture ou boisson, le privant également d’accès aux toilettes. Selon ses dires, des agents des services de renseignements kurdes l’auraient contraint à signer une déclaration en rapport avec les accusations de diffamation portées contre lui. Il craindrait également pour sa sécurité en raison des menaces proférées contre lui par des agents des services de renseignements kurdes et des partisans des dirigeants kurdes.

Amnesty International n’est pas en possession de tous les détails concernant ce dossier mais craint que Kamal Sayid Qadir ne soit un prisonnier d’opinion qui devrait être remis en liberté immédiatement et sans condition. L’organisation demande que soit menée, sans délai, une enquête indépendante sur les mauvais traitements qu’il aurait eu à subir lors de la période précédant son procès ; Amnesty International demande également que les agents de l’État présumés responsables de ces mauvais traitements et autres violences aient à rendre des comptes.

Hawez Hawezi, trente et un ans, professeur de l’enseignement secondaire et journaliste, a été arrêté le 17 mars 2006 par des membres des forces de sécurité affiliées à l’Union patriotique du Kurdistan (UPK), l’autre parti principal de cette région kurde semi-autonome de l’Irak. Remis en liberté sous caution deux jours plus tard, il doit également répondre de diffamation pour un article récent, publié dans l’hebdomadaire kurde Hawlati, critiquant les autorités locales kurdes. Il aurait été malmené par des responsables de la sécurité affiliés à l’UPK lors de son transfert vers le centre de détention de Sulaimaniya après son arrestation.

Amnesty International appelle le gouvernement irakien et les autorités locales kurdes à faire en sorte que les charges pesant contre Hawez Hawezi soient abandonnées immédiatement et sans condition ; l’organisation leur demande également de veiller à ce que les allégations d’Hawez Hawezi concernant les violences auxquelles il aurait été soumis par les responsables de l’UPK fassent l’objet d’une enquête dans les meilleurs délais et que les auteurs présumés de ces actes soient amenés à rendre des comptes.

Amnesty International appelle enfin le gouvernement irakien et les autorités kurdes du nord de l’Irak à assurer la protection du droit à la liberté d’expression et à revoir et modifier les lois existantes rendant passible de poursuites l’exercice pacifique du droit à la liberté d’expression.

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