IRAN - Affaire Zahra Kazemi - justice doit être rendue. Amnesty International salue l’annonce d’une nouvelle enquête, mais réitère ses appels en faveur d’une enquête pleinement indépendante

Index AI : MDE 13/070/2005

DÉCLARATION PUBLIQUE

Amnesty International réitère son appel en faveur de l’ouverture d’une enquête publique et indépendante sur la mort en détention de la photojournaliste Zahra Kazemi, après l’annonce mercredi, par la Cour d’appel, du maintien de l’acquittement d’un agent du ministère du Renseignement iranien d’abord accusé du crime.

Le 16 novembre, la Cour d’appel a annoncé qu’elle maintenait le verdict d’acquittement de Mohammad Reza Aghdam. Son avocat a déclaré à la presse que les autorités judiciaires étaient parvenues à la conclusion que l’enquête sur la mort en détention de Zahra Kazemi en juillet 2003 présentait des lacunes et qu’elles avaient ordonné le renvoi de l’affaire devant le Tribunal général et révolutionnaire aux fins d’une nouvelle enquête.

Amnesty International salue cette annonce d’une nouvelle enquête ; l’organisation demande instamment qu’elle soit menée de manière approfondie et indépendante, afin que soient établies les circonstances de la mort violente de Zahra Kazemi le 12 juillet 2003 et que justice soit rendue. Les enquêteurs devront avoir tout pouvoir pour :

 assigner des témoins à comparaître, y compris des membres du bureau du procureur général de Téhéran ;

 ordonner la communication de documents ;

 assurer la protection des témoins contre tout acte de harcèlement ou d’intimidation ;

 élaborer des mécanismes à même d’empêcher que de telles violations des droits humains ne se reproduisent à l’avenir.

Complément d’information

Le 23 juin 2003, une journaliste et photographe possédant la double nationalité canadienne et iranienne, Zahra Kazemi, cinquante-trois ans, était arrêtée pour avoir pris des photos à l’extérieur de la prison d’Evin. Selon une commission d’enquête gouvernementale, Zahra Kazemi est décédée des suites d’un coup reçu au crâne, alors qu’elle se trouvait en garde à vue à l’hôpital de Baghiyetollah (ou Baghiyetazam) à Téhéran le 12 juillet 2003. Le rapport de cette commission préconisait que l’affaire soit examinée par un « enquêteur spécial indépendant » issu de la magistrature et que ses conclusions soient rendues publiques « rapidement ».

Le 29 juillet 2003, des représentants de l’appareil judiciaire confirmaient que cinq personnes avaient été arrêtées dans le cadre de cette affaire ; trois faisaient partie des autorités judiciaires de Téhéran et deux étaient membres du ministère du Renseignement. Le 30 juillet 2003, un porte-parole du gouvernement déclarait que Zahra Kazemi avait été assassinée. Malgré cela, quatre des cinq personnes placées en détention dans un premier temps étaient remises en liberté et seul Mohammad Reza Aghdam, agent des services du Renseignement, était inculpé dans le cadre de l’affaire concernant la mort de Zahra Kazemi. Il a comparu le 2 octobre 2003 mais a été acquitté le 24 juillet 2004. Au cours de son procès, les avocats représentant la famille Kazemi ont affirmé qu’un responsable judiciaire qui n’avait pas été inculpé était responsable de la mort de Zahra Kazemi, non l’accusé.

Après l’acquittement, les avocats de la famille Kazemi avaient interjeté appel auprès de la Cour suprême, invoquant une « procédure préliminaire incomplète » en première instance et la nécessité de requalifier cette mort en meurtre. Les avocats demandaient à la Cour de rouvrir l’enquête sur la mort de Zahra Kazemi et de citer Ali Yunesi, ministre du Renseignement à l’époque et Saïd Mortazavi, procureur général de Téhéran à comparaître.

La première audience du procès en appel s’est tenue devant la Cour d’appel de Téhéran le 16 mai 2005 et n’a duré qu’une heure, au cours de laquelle ni les avocats ni la famille n’ont pu s’exprimer. Les journalistes avaient été expulsés de la salle d’audience. La seconde audience du procès en appel s’est tenue le 27 juillet 2005.

Quelques jours seulement après la fin du procès, l’un des membres de l’équipe juridique représentant la famille de Zahra Kazemi, Abdolfattah Soltani, avocat et défenseur reconnu des droits humains, a été arrêté. Il est détenu depuis sans avoir pu consulter d’avocat et avec des contacts très limités avec sa famille. Selon le journal Kayhan connu pour ses liens étroits avec le pouvoir judiciaire, le dernier jour du procès en appel intenté par la famille de Zahra Kazemi, Abdolfattah Soltani aurait ouvertement laissé entendre que l’État pourrait être responsable de la mort de Zahra Kazemi ; selon le journal, ces propos avaient appelé sur lui de manière inévitable un « châtiment prompt et mérité ». D’après les déclarations de certains responsables judiciaires, il aurait été interpellé en lien avec la diffusion d’informations classées secrètes, obtenues dans le cadre d’un procès impliquant certains de ses clients accusés d’espionner le programme nucléaire iranien.

Pour Amnesty International, le maintien en détention, apparemment sans inculpation, d’Abdolfattah Soltani obéit à des motifs politiques ; il vise à lui faire interdire l’exercice de sa profession, tout en servant d’avertissement aux autres défenseurs des droits humains tentés par des poursuites dans des affaires d’impunité ou la défense de dossiers politiques. Si tel est le cas, Abdolfattah Soltani doit être remis en liberté sans délai et sans condition ; il doit, au minimum, être autorisé à entrer en contact avec sa famille et ses avocats au plus vite et de manière régulière et se voir accorder au plus tôt la possibilité de se défendre contre toute charge que les autorités iraniennes feraient peser contre lui.

Pour plus d’informations concernant la mort en détention de Zahra Kazemi, merci de vous reporter aux documents suivants :

Iran. Il faut ouvrir une enquête indépendante sur la mort de Zahra Kazemi, index AI : MDE 13/022/2005, du 15 juillet 2003 http://web.amnesty.org/library/index/framde130222003.

Iran. Seul un organisme d’enquête indépendant pourra servi la justice et les droits humains, index AI : MDE 13/026/2003, du 1er août 2003 http://web.amnesty.org/library/index/framde130262003.

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