IRAN - Amnesty International condamne la violence contre des manifestantes

Index AI : MDE 13/024/2006

DÉCLARATION PUBLIQUE

Amnesty International condamne l’intervention violente de la police iranienne, des pasdaran (gardiens de la révolution) et d’autres forces de sécurité pour disperser de force environ un millier de manifestantes qui s’étaient rassemblées pacifiquement à Téhéran à l’occasion de la Journée internationale de la femme, le 8 mars 2006. Des dizaines de femmes auraient été frappées par les policiers et les membres des forces de sécurité qui les aidaient.

Ces femmes s’étaient rassemblées dans le parc Daneshjou (parc des Étudiants), où elles s’étaient assises pacifiquement et avaient déployé des banderoles portant des slogans tels que « La discrimination contre les femmes est une atteinte aux droits humains », « Les femmes veulent le respect de leurs droits fondamentaux » ou « Les femmes iraniennes demandent la paix ». Au départ, une centaine de policiers étaient présents, mais au fur et à mesure sont arrivés des bus entiers de policiers, de bassidji (miliciens volontaires en civil) et de membres des forces spéciales antiémeutes des gardiens de la révolution. Après avoir filmé et photographié les manifestantes, ils leur ont donné l’ordre de se disperser au motif que la manifestation n’était pas officiellement autorisée.

Les femmes n’ont pas obtempéré et, à 16 h 20, après la lecture par l’une d’entre elles d’une déclaration demandant davantage de droits pour les femmes, les forces de sécurité ont chargé et s’en sont pris aux manifestantes. Beaucoup ont été frappées à coups de matraque, parfois par plusieurs hommes à la fois. Par exemple, Simin Behbehani, poétesse âgée et malvoyante, a reçu plusieurs coups de matraque et coups de pied donnés par des membres des forces de sécurité. Les journalistes présents qui avaient filmé la manifestation auraient été arrêtés puis libérés après confiscation de leurs films et de leurs photos.

Amnesty International appelle le gouvernement iranien à ouvrir immédiatement une enquête sur ce recours abusif à la force par la police et les autres forces de sécurité, et à veiller à ce que les responsables des coups et des violences contre les manifestantes soient traduits en justice dans les plus brefs délais et de façon équitable. L’organisation appelle aussi les autorités iraniennes à respecter le droit à la liberté de réunion et d’expression, conformément aux obligations de l’Iran aux termes du droit international.

Elle leur rappelle le contenu de l’article 12 de la Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et protéger les droits de l’homme et les libertés fondamentales universellement reconnus (Déclaration sur les défenseurs des droits de l’homme). Cet article dispose en effet que : « chacun a le droit [...] de participer à des activités pacifiques pour lutter contre les violations des droits de l’homme et des libertés fondamentales ». Il demande aux États de prendre « toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne [...] de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration ».

Complément d’information

Comme le montre le récent rapport de la rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la violence contre les femmes, Yakin Ertuk, les femmes iraniennes sont victimes de discrimination en droit, dans le Code civil et le Code pénal et dans l’administration de la justice. Elles n’ont pas le droit de postuler à la présidence du pays ; elles n’ont pas les mêmes droits au divorce que les hommes ; après un divorce, elles ne peuvent conserver la garde de leurs enfants que jusqu’à l’âge de sept ans ; et le prix du sang pour une femme assassinée est moitié moindre que celui d’un homme. Sous la précédente législature, des femmes parlementaires ont fait pression pour une réforme des lois discriminatoires et ont déposé 33 propositions de lois, dont beaucoup ont été rejetées par le Conseil des gardiens de la révolution au motif qu’elles étaient incompatibles avec la charia (loi islamique). Cela a été le cas notamment pour une proposition de ratification de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.

En Iran, le travail des défenseurs des droits humains est extrêmement difficile. La loi iranienne limite sévèrement la liberté d’expression et d’association, et les défenseurs des droits humains sont souvent victimes de représailles sous la forme de harcèlement, d’intimidations, d’attaques, d’arrestations, d’emprisonnements et de torture. Beaucoup sont soumis à une interdiction de voyager qui les empêche de quitter le pays. Les procédures d’enregistrement des organisations non gouvernementales (ONG) indépendantes, par exemple des organisations de défense des droits humains - telles que le Centre pour la défense des droits humains, dirigé par la lauréate du prix Nobel de la paix Shirin Ebadi - sont très complexes et se soldent souvent par un refus, contraignant les ONG à une fermeture forcée.

Pour toute information complémentaire, voir le rapport Iran. New government fails to address dire human rights situation (index AI : MDE 13/010/2006, 16 février 2006), accessible sur le site d’AIBF.

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