Iran. Amnesty International est préoccupée par le harcèlement dont ne cessent d’être victimes les journalistes et les personnes qui militent en faveur des droits des femmes

Déclaration publique

MDE 13/015/2007

Amnesty International s’inquiète de ce que les journalistes et les personnes militant en faveur des droits des femmes sont de plus en plus souvent harcelés par des responsables des forces de sécurité.

Récemment, le 26 janvier 2007, quinze femmes journalistes ont été retenues à Téhéran pour être interrogées par des responsables du ministère du Renseignement alors qu’elles s’apprêtaient à prendre l’avion pour suivre un atelier de formation sur le journalisme en Inde. Les agents de l’État ont libéré 12 des femmes au bout de quelques heures tout en leur enjoignant de ne pas assister à cet atelier si elles ne voulaient pas subir « certaines » conséquences à leur retour en Iran.

Trois autres femmes - Farnaz Seyfi, Mansoureh Shojaie et Talaat Taghiniya - ont été conduites à la Section 209 de la prison d’Evin, qui dépend du ministère du Renseignement, où elles ont été détenues pendant vingt-quatre heures puis libérées. Selon certaines informations, ces femmes risquent d’être jugées en avril pour « activités contre la sécurité de l’État » pour avoir prévu de participer à cet atelier de formation en Inde. Pendant qu’elles étaient détenues, des membres des forces de sécurité ont fouillé leur domicile et emporté certains de leurs biens personnels tels que des ordinateurs et des carnets de notes ; depuis leur libération elles n’ont pas pu travailler.

Amnesty International demande aux autorités iraniennes d’abandonner immédiatement les charges retenues contre ces trois femmes journalistes et de cesser de les harceler pour avoir simplement exercé de manière pacifique leur droit, internationalement reconnu, à la liberté d’expression. Si une de ces femmes devait être condamnée et emprisonnée uniquement sur la base de telles charges, Amnesty International la considèrerait comme une prisonnière d’opinion et demanderait sa libération immédiate et inconditionnelle.

Farnaz Seyfi est une journaliste indépendante de vingt-trois ans qui a écrit des articles pour le site d’information sur les droits des femmes Zanestan (http://www.herlandmag.com). L’adresse électronique de son propre blog est la suivante : http://www.farnaaz.com. Âgée de quarante-huit ans, Mansoureh Shojaie écrit des articles de fond, et Talaat Taghiniya, qui a soixante et un an, milite au sein du mouvement pour les droits des femmes depuis plus de trente ans. Elle a écrit des articles pour Zanestan et pour Shahrzad News (www.shahrzadnews.org), agence de presse de langue persane dont le siège est aux Pays-Bas. Ces trois femmes sont membres du Centre culturel des Iraniennes, qui gère le site de Zanestan sur Internet et a organisé des événements pour promouvoir les droits des femmes, comme la manifestation de juin 2006 pour demander la fin de la discrimination légale contre les femmes ; cette manifestation avait été dispersée violemment par les forces de sécurité, qui avaient procédé à l’arrestation de dizaines de participants. Le Centre a également ouvert une bibliothèque pour les femmes.

Les 13 femmes journalistes prévoyaient de se rendre en Inde pour participer à un atelier organisé par Shahrzad News. La formation abordait des points tels que l’organisation d’une conférence de presse et les différences entre les médias traditionnels et Internet.

Dans une affaire distincte, la journaliste et militante des droits des femmes Zhila Bani Yaqoub a été acquittée le 4 février 2007 du chef d’accusation d’« agissement contre la sécurité d’État », notamment, qui pesait sur elle pour avoir participé à une manifestation en faveur des droits des femmes.

Amnesty International a exprimé à de nombreuses reprises sa préoccupation au sujet du harcèlement de personnes défendant les droits humains, dont un grand nombre de journalistes. Ce harcèlement prend la forme de restrictions frappant les déplacements à l’intérieur du pays et vers l’étranger, tandis que d’autres personnes ont été interrogées et menacées à leur retour de l’étranger. Par exemple, en janvier 2007, Taghi Rahmani, écrivain et journaliste prisonnier d’opinion pendant quatorze ans, n’a pas pu se rendre à la conférence annuelle de la branche danoise de l’organisation internationale d’écrivains PEN où il devait faire un discours et recevoir un prix. En février 2007, des agents des forces de sécurité en civil ont empêché l’universitaire et ancien prisonnier d’opinion Hashem Aghajari, et Abdollah Momeni, dirigeant étudiant et ancien prisonnier politique, de prendre l’avion pour les États-Unis et leur ont donné soixante-douze heures pour se présenter aux services des passeports du bureau présidentiel. Les deux hommes devaient participer à un séminaire à l‘Institut de technologie du Massachusetts où Hashem Aghajari devait faire une intervention.

Voici d’autres exemples de harcèlement de journalistes et de personnes défendant les droits des femmes :

 plus de 20 journalistes, qui avaient assisté à un séminaire de formation aux Pays-Bas en novembre 2006, ont été arrêtés à leur retour en Iran et interrogés pendant trois heures à l’aéroport de Mehrabad à Téhéran par des responsables des forces de sécurité qui leur ont confisqué des biens personnels avant de les libérer.

 Ali Farahbakhsh, journaliste des quotidiens désormais interdits Yas-e No et Sharq, a été arrêté le 27 novembre 2006 après avoir assisté à une conférence en Thaïlande qui portait sur les médias. Il serait détenu à la section 209 de la prison d’Evin.

 Ezzatollah Sahabi, intellectuel associé aux partisans d’une réforme politique, Melli Mazhabi (Alliance nationale religieuse), n’a pas pu prononcer le discours qu’il devait donner dans une mosquée d’Esfahan en février 2007.

La législation internationale garantit le droit à la liberté d’information et la libre circulation des idées à travers les frontières. L’Iran a l’obligation spécifique, aux termes de l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), de garantir le droit à la liberté d’expression. Des restrictions légitimes peuvent être appliquées à ce droit dans des circonstances bien précises, mais Amnesty International est préoccupée par le fait que les restrictions imposées par les autorités iraniennes vont bien au-delà de ce que permet le droit international relatif aux droits humains. L’organisation exhorte les autorités iraniennes à lever toutes les restrictions à la liberté de mouvement qui frappent des personnes n’ayant fait qu’exercer de manière pacifique leur droit à la liberté d’expression et d’association.

Amnesty International appelle l’Iran à prendre toutes les mesures législatives, administratives et autres nécessaires pour garantir les droits et libertés inscrits dans la Déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l’homme (1998).

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