En novembre 2019, un tribunal pénal de la province de l’Azerbaïdjan occidental a déclaré Hadi Rostami coupable de vol à l’issue d’un procès manifestement inéquitable, entaché par des « aveux » extorqués sous la torture, et l’a condamné à l’amputation de quatre doigts. Fin 2020, alors qu’il se trouvait en détention, cet homme a été condamné à 60 coups de fouet et huit mois d’emprisonnement pour « trouble à l’ordre au sein de la prison ». Il n’avait fait que manifester pacifiquement – notamment en observant une grève de la faim – contre ses conditions de détention inhumaines et les menaces, proférées à plusieurs reprises au cours des deux mois précédents, selon lesquelles sa peine serait appliquée sous peu. Il souffre actuellement de graves complications médicales à la suite de deux tentatives de suicide récentes.
« La flagellation d’un prisonnier suicidaire et en mauvaise santé est un acte cruel qui nous rappelle une nouvelle fois l’inhumanité du système judiciaire iranien, dans lequel la torture et les autres formes de mauvais traitements sont légalisées. Les autorités iraniennes se rendent coupables de torture en maintenant Hadi Rostami dans la peur constante d’être amputé et en le privant délibérément des soins médicaux urgents dont il a besoin en raisondes complications qui font suite à ses récentes tentatives de suicide, a déclaré Diana Eltahawy, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord à Amnesty International.
« Nous appelons les autorités iraniennes à annuler immédiatement la déclaration de culpabilité et la peine d’amputation prononcées à l’encontre d’Hadi Rostami et à le faire rejuger dans le respect des normes d’équité, sans recourir aux châtiments corporels. En outre, il faut qu’elles lui permettent de bénéficier sans délai, à l’extérieur de la prison, des soins de santé physique et mentale spécialisés dont il a besoin. »
« La flagellation d’un prisonnier suicidaire et en mauvaise santé est un acte cruel qui nous rappelle une nouvelle fois l’inhumanité du système judiciaire iranien »
Au cours des derniers mois, des agents de l’administration pénitentiaire, des services de renseignement et du ministère public ont convoqué Hadi Rostami à maintes reprises au sein de la prison d’Ourmia ; ils lui reprochaient d’attirer l’attention des médias sur les affaires de plusieurs détenus qui risquaient une amputation et l’ont menacé d’une application imminente de sa peine d’amputation.
Ces agissements ont porté gravement atteinte à sa santé mentale, ce qui l’a amené à attenter à ses jours à deux reprises – la seconde fois, le 18 janvier 2021, il a avalé des morceaux de verre.
Selon les informations obtenues par Amnesty International auprès d’une source bien informée, Hadi Rostami souffre encore de douleurs intenses et d’une hémorragie interne et continue à vomir du sang à cause des morceaux de verre restés dans son système digestif. L’administration pénitentiaire et le ministère public refusent son transfert dans un établissement médical à l’extérieur de la prison, où il pourrait recevoir les soins médicaux spécialisés dont il a besoin. Bien qu’il envisage de s’automutiler et soit traversé par des idées suicidaires, il ne bénéficie d’aucun soin de santé mentale.
Les services de santé proposés par les infirmeries des prisons iraniennes se limitent à des actes très rudimentaires, comme la mesure de la pression artérielle, l’administration de liquides par voie intraveineuse et la prescription de médicaments. Les personnes détenues qui ont besoin de traitements plus poussés doivent être transférées dans des établissements médicaux situés à l’extérieur de la prison.
« Nous appelons les autorités iraniennes à cesser immédiatement ces actes de mutilation aussi cruels que choquants, et à respecter la dignité de toutes les personnes détenues. Il faut que la communauté internationale fasse pression de toute urgence sur les autorités pour qu’elles respectent les droits humains et renoncent à appliquer les peines d’amputation infligées à Hadi Rostami et à d’autres personnes détenues à la prison d’Ourmia. Le monde doit condamner avec la plus grande fermeté le recours aux châtiments corporels par les autorités iraniennes », a déclaré Diana Eltahawy.
Complément d’information
En septembre 2020, Amnesty International a dénoncé le fait que la Cour suprême iranienne avait confirmé les peines d’amputation prononcées à l’encontre de quatre hommes, dont Hadi Rostami, qui avaient été déclarés coupables de vol à l’issue de procès inéquitables. En décembre 2020, l’organisation a publié des informations indiquant que le ministère public et l’administration pénitentiaire s’apprêtaient à faire installer une guillotine à la prison d’Ourmia pour appliquer les peines d’amputation concernant jusqu’à six hommes, mais il semble que ce projet ne se soit pas encore concrétisé. Les six hommes en danger sont Hadi Rostami, Mehdi Sharfian, Mehdi Shahivand, Kasra Karami, Shahab Teimouri Ayeneh et Mehrdad Teimouri Ayeneh.
Les châtiments cruels et inhumains comme la flagellation et l’amputation sont des actes de torture, qui constituent à ce titre des crimes de droit international et sont interdits par l’article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), auquel l’Iran est partie.
D’après les informations recueillies par le Centre Abdorrahman Boroumand, les autorités iraniennes ont amputé des doigts et/ou des orteils à 129 personnes au moins entre 2000 et 2020, soit en moyenne une personne tous les deux mois.