Communiqué de presse

Iran. La répression de la dissidence s’intensifie à l’approche des élections

Amnesty International est préoccupée par l’intensification manifeste de la répression des autorités iraniennes envers la dissidence à l’approche de la prochaine élection présidentielle du pays, qui se tiendra le 14 juin 2013.

Parmi les personnes visées figurent des militants politiques, des journalistes et d’autres professionnels des médias, des syndicalistes, des défenseurs de l’élargissement des droits pour les minorités religieuses et ethniques iraniennes, des étudiants et d’autres personnes. Dans de nombreux cas, les raisons détaillées des arrestations et des détentions ne sont pas connues, dans d’autres, les personnes arrêtées ont comparu devant les tribunaux sur la base d’accusations larges et vagues, puis reconnues coupables et condamnées à des peines de prison. Dans d’autres cas encore, les individus qui ont été condamnés au cours des années précédentes, mais étaient en sursis ou en liberté provisoire pour des raisons médicales, ont été convoqués à une prison pour purger le reste de leur peine. Les autorités cherchent manifestement à prévenir les protestations lors de l’élection présidentielle.

Depuis longtemps, les autorités iraniennes répriment et punissent la dissidence et la défense d’opinions ou de politiques qu’elles désapprouvent. La répression actuelle n’est que la plus récente parmi de nombreux épisodes similaires. L’un de ces épisodes, parmi les plus graves, est survenu après la dernière élection présidentielle de 2009. Des manifestations de masse ont éclaté dans tout le pays quand les autorités ont annoncé que le président sortant, Mahmoud Ahmadinejad, avait remporté la victoire avec une grande marge, ce qui avait provoqué des allégations de fraude électorale.

Aujourd’hui, des dizaines de prisonniers politiques, dont des prisonniers d’opinion, condamnés après des procès inéquitables liées aux manifestations de 2009, sont toujours en prison. Mehdi Karroubi et Mir Hossein Moussavi, ainsi que son épouse, Zahra Rahnavard, les principaux dirigeants de l’opposition lors de la contestation de l’élection présidentielle de 2009, continuent d’être assignés à résidence sans limitation de durée depuis février 2011. Cette situation perdure malgré des appels répétés des Nations unies concernant leur libération, et notamment un appel conjoint de février 2013 de trois experts des droits humains, les rapporteurs spéciaux sur la situation des droits de l’homme en Iran et sur les droits à la liberté de réunion pacifique et d’association, ainsi que le Président rapporteur du Groupe de travail sur la détention arbitraire. Le 29 août 2012, le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a estimé que l’assignation à résidence de Mir Hossein Moussavi, Zahra Rahnavard et Mehdi Karroubi équivalait à une détention arbitraire, et donc contrevenait à la fois à la législation nationale iranienne et au droit international. Malgré cela, ces personnes sont restées en résidence surveillée.

Lors de la répression gouvernementale de l’après-2009, les forces de sécurité ont commis des violations flagrantes des droits humains, notamment des homicides illégaux et des actes de torture. À ce jour, cependant, les autorités n’ont pas traduit en justice les responsables de ces violations. Elles ont même pris des mesures contre les victimes et les proches de victimes qui osent réclamer justice et réparation. Amnesty International a salué l’ouverture récente d’une enquête sur la mort d’au moins quatre personnes en garde à vue au centre de détention de Kahrizak, à Téhéran, après l’élection présidentielle de 2009. Les procès se sont toutefois déroulés à huis clos, ce qui soulève des questions quant à leur équité.

Depuis l’année dernière, Amnesty International a constaté une nouvelle poussée de répression, qui se traduit par de nouveaux cas d’arrestations et de détentions arbitraires, des procès inéquitables de suspects politiques et l’incarcération de prisonniers d’opinion (des personnes détenues uniquement en raison de leurs opinions ou de croyances politiques, et qui n’ont pas utilisé ou prôné la violence).

Cette dernière vague de répression semble destinée, au moins en partie, à étouffer le débat et à dissuader les critiques envers les autorités dans le cadre des préparatifs de l’élection, qui verra l’un des candidats autorisés (seulement sept à l’heure actuelle) remplacer le président Ahmadinejad pour un mandat de quatre ans.

Amnesty International appelle les autorités iraniennes à mettre un terme à ces mesures répressives qui sont contraires aux obligations de l’Iran au regard du droit international relatif aux droits humains et des traités auxquels le pays est partie, et à respecter et à protéger les droits humains comme la liberté d’opinion, d’expression, de réunion et d’association.

Amnesty International a produit le présent document sur la base des informations obtenues à partir d’un large éventail de sources, y compris iraniennes, bien que les autorités du pays n’aient pas autorisé l’organisation à se rendre en Iran pour y évaluer la situation des droits humains depuis plus de trente ans. Malgré ces obstacles, Amnesty International a régulièrement publié des rapports sur l’Iran et recensé les violations des droits dans ce pays.

Nous détaillons ici quelques cas emblématiques récents mettant en évidence la répression exercée contre les droits humains.

LES JOURNALISTES ET LES ÉDITEURS EN LIGNE

Au Kurdistan, les forces de sécurité ont arrêté Khosro Kordpour, le directeur de l’agence de presse Mukrian, le 9 mars 2013, fouillé sa maison et confisqué certains de ses biens. Deux jours plus tard, ils ont arrêté son frère, Masoud Kordpour, qui s’était rendu au bureau de Mahabad du ministère du Renseignement pour tenter d’obtenir des informations sur l’arrestation et la détention de Khosro Kordpour. Les deux frères ont été emmenés dans un centre de détention des pasdaran (gardiens de la révolution) à Orumiyeh, le 16 mars 2013, où ils auraient été placés en isolement. En dépit de demandes répétées, les familles des deux hommes ont été incapables d’obtenir des informations sur leur sort jusqu’au 2 mai 2013, date à laquelle elles ont été autorisées à leur rendre visite. Les frères ont dit à leurs parents qu’ils ne connaissaient pas les motifs de leur arrestation. Le 19 avril 2013, Khosro Kordpour a entamé une grève de la faim pour protester contre l’impossibilité de contacter son avocat. Il a arrêté cette grève le 13 mai 2013 à la demande de sa famille et de ses amis, et a été transféré par la suite dans une cellule avec d’autres détenus. Les raisons de l’arrestation des frères Kordpour restent floues, mais on pense qu’ils ont été arrêtés sur des présomptions de délits touchant à la sécurité nationale. À ce jour, on ignore encore si les autorités les ont officiellement inculpés d’une quelconque infraction. L’avocat des frères aurait été informé le 14 mai 2013 que leur détention était prolongée de deux mois.

Mohammad Reza Pourshajari, aussi connu sous son nom de plume, Siamak Mehr, est actuellement détenu à la prison centrale de Karaj, où il purge une peine d’emprisonnement de quatre ans, malgré de sérieuses inquiétudes quant à sa santé. Les forces de sécurité l’ont arrêté à son domicile à Karaj le 12 septembre 2010 en raison d’un blog qu’il alimentait. Il dit avoir été placé en détention à l’isolement pendant huit mois, torturé et maltraité. Il aurait notamment été soumis à un simulacre d’exécution destiné à lui extorquer des « aveux ». Après un procès qui s’est terminé le 21 décembre 2011, la section 109 du tribunal révolutionnaire de Karaj l’a déclaré coupable d’un chef d’accusation rédigé en termes vagues (« insultes aux valeurs saintes de l’islam ») et condamné à un an d’emprisonnement. Mohammad Reza Pourshajari avait déjà été condamné à trois ans de prison pour avoir « insulté le Guide » et « agi contre la sécurité nationale ». Selon un membre de sa famille qui a parlé à Amnesty International, il a fait une crise cardiaque le 16 février 2013. Les autorités l’ont alors transféré dans un hôpital en-dehors de la prison pour cinq jours seulement. Elles continuent de lui refuser de sortir de la prison pour recevoir un traitement médical adéquat, et ce, selon les sources, malgré l’avis des médecins du centre carcéral.


Hossein Ronaghi Maleki
, un blogueur et prisonnier d’opinion, est retourné à la prison d’Evin, à Téhéran, le 21 mai 2013, pour y purger le reste d’une peine de prison de 15 ans entamée en 2010 après sa condamnation par un tribunal révolutionnaire pour « appartenance au groupe internet [illégal] ’Iran Proxy’ », « propagande contre le régime » et « insultes au Guide et au Président ». Cette condamnation semblait liée à ses activités pourtant pacifiques, notamment la rédaction d’articles publiés sur son blog. En mai 2012, il a entamé une grève de la faim parce que les autorités refusaient qu’il sorte de la prison afin de recevoir un traitement médical pour une maladie rénale. Les autorités ont finalement consenti à le libérer après paiement d’une caution de 10 milliards de rials (environ 613 348 euros). Cependant, il a été de nouveau arrêté en août 2012, alors qu’il était toujours en liberté provisoire, avec des militants des droits humains qui assistaient les personnes dans un camp de secours pour les victimes d’un tremblement de terre dans la province de l’Azerbaïdjan oriental. On l’a d’abord emmené à la section 1 de la prison de Tabriz, puis à la prison d’Evin, à Téhéran, et accusé de « distribution d’articles impurs et non hygiéniques ». Il a une nouvelle fois été libéré pour raisons médicales, le 6 novembre 2012, après paiement d’une caution. Cet homme a subi plusieurs opérations du rein et doit prendre des médicaments régulièrement. Son père affirme que, depuis son rappel à la prison d’Evin, les autorités ne lui ont pas permis de prendre les médicaments prescrits, ce qui renforce les inquiétudes touchant à sa santé et à son bien-être.

Les autorités ont arrêté au moins cinq journalistes depuis le début du mois de mars et ont fermé trois organes de presse. Les journalistes sont : Mohammad Mehdi Emam Nasseri et Alireza Aghaee Rad, respectivement directeur et rédacteur en chef politique du journal Maghreb, Ali Ghazali et Foad Sadeghi, respectivement directeur et rédacteur en chef du site web Baztab Emrooz, et Mohammad Javad Rouh, rédacteur en chef de Mehrnameh, l’un des trois organes de presse fermés par les autorités. Les autres journaux étaient Aseman et Tajrobeh. Les cinq journalistes seraient poursuivis pour leurs activités journalistiques, mais aucune précision sur les chefs d’accusation n’a pu être obtenue à ce jour.

LES MILITANTS POLITIQUES

Jamileh Karimi, membre d’une association connue sous le nom de Conseil central de la coalition des réformateurs dans la province du Fars, aurait été arrêtée par les forces de sécurité en avril 2013 et détenue à l’isolement dans un centre du ministère du Renseignement, à Chiraz. Ce centre a pour seul intitulé « n° 100 ». Jamileh Karimi, qui travaillait auparavant pour le gouverneur de la province du Fars en tant que conseillère pour les femmes et la jeunesse pendant la présidence de Mohammad Khatami (de 1997 à 2005), a été arrêtée à son domicile le 10 avril 2013, selon Kaleme, un site web d’information de l’opposition. Avant son arrestation, elle était l’une des quelque 90 signataires d’une lettre exhortant M. Khatami à se représenter à l’élection présidentielle de 2013. Cependant, aucune charge ne semble avoir été retenue contre elle pour le moment.

Le 4 juin 2013, l’Alliance religieuse nationale a indiqué sur son site internet que les forces de sécurité ont arrêté quatre individus liés à cette organisation, interdite mais généralement tolérée. Les personnes en question seraient Reza Agha Khani, Nasrollah Lashani, Alireza Akbar Zadeh et Hossein Bahiraee.

Actuellement, les raisons de ces arrestations ne sont pas claires, mais elles pourraient être liées à l’élection à venir, car des membres de l’Alliance religieuse nationale ont déjà été arrêtés par le passé avant d’autres élections dans le pays. On ignore où se trouvent ces personnes et si elles ont été inculpées d’une quelconque infraction. Les familles de ces hommes ont affirmé qu’ils n’étaient pas impliqués dans des activités illégales, et que certains d’entre eux ne sont même pas des militants politiques.

Le 1er juin, les forces de sécurité auraient arrêté un certain nombre de membres de l’équipe de campagne du candidat à la présidentielle Hassan Rouhani, après un rassemblement à Téhéran au cours duquel les partisans ont scandé des slogans demandant la levée de l’assignation à résidence des dirigeants de l’opposition Mir Hossein Moussavi et Mehdi Karroubi. Parmi ces personnes figureraient Nafiseh Nikbakht, Milad Panahi Pour, Mohsen Rahmani, Mohammad Parsi, Mohammad Ehtesham, Shirin Mir Karimi, Saeedollah Bedashti, Mojtaba Hashemi et Farzad Eslami. Selon les informations publiées le 3 juin sur le site Kaleme, l’un des détenus a dit à ses proches, au cours d’une conversation téléphonique, que 13 personnes avaient été arrêtées. Le site a également signalé que ces 13 personnes étaient détenues à l’isolement dans la section 240 de la prison d’Evin, et avaient été informées qu’elles seraient inculpées. Certaines d’entre elles ont été relâchées mais on pense que d’autres sont toujours en détention.

LES SYNDICALISTES

Le 28 mai 2013, le syndicaliste Mahmoud Beheshti Langroudi a été condamné à quatre ans d’emprisonnement par la 15e chambre du tribunal révolutionnaire de Téhéran, qui l’a déclaré coupable de « rassemblement et collusion contre la sécurité nationale », et à une peine supplémentaire d’un an pour « propagande contre le régime ». Aucune de ces charges ne correspond à une quelconque infraction reconnue au niveau international. À l’heure actuelle, Mahmoud Beheshti Langroudi reste en liberté en attendant le résultat d’une procédure d’appel, mais si celle-ci est rejetée, il risque également d’avoir à purger une peine antérieure de quatre ans avec sursis qui lui avait été imposée pour ses activités syndicales. Mahmoud Beheshti Langroudi, un ancien porte-parole des Associations syndicales des enseignants iraniens, affiliées à European International, un organisme international qui représente les travailleurs de l’éducation, a été arrêté en avril 2010, juste avant la Journée nationale iranienne des enseignants, le 2 mai, et détenu au secret pendant 16 jours. Il a été libéré sous caution le 4 juillet 2010.

Les forces de sécurité ont arrêté au moins 10 syndicalistes et militants des droits du travail dans le cadre de leurs activités syndicales, notamment lors de rassemblements pacifiques prévues pour marquer la Journée internationale du travail, le 1er mai 2013. Parmi les personnes détenues, on compte Mohammad Ehyai, Mohammad Ghasem Khani, Bahram Saïdi, Aram Zandi, Fardin Ghaderi, Shahpour Hosseini, Jalil Mohammadi, Hamed Mahmoudi Nejad, Nastaran Mohammadi et Bakhtiar Chatani. Certains ont été libérés, mais d’autres seraient encore en détention bien que l’on ignore s’ils ont été inculpés.


LES MEMBRES DES MINORITÉS ETHNIQUES ET RELIGIEUSES

Cinq membres de Yeni Gamoh, une organisation de défense des droits culturels et politiques azerbaïdjanais (turc), ont été condamnés à des peines de huit ans d’emprisonnement par la troisième chambre du tribunal révolutionnaire de Tabriz, le 29 avril 2013, après avoir été reconnus coupables de « formation d’un groupe illégal dans l’intention de nuire à la sécurité nationale ». Le tribunal a en outre condamné chacun d’eux à une peine supplémentaire d’un an d’emprisonnement pour « propagande contre le régime ». Ces cinq personnes – Latif Hasani, Mahmoud Fazli, Ayat Mehr Ali Beyglou, Shahram Radmehr et Behboud Gholizadeh, des membres du Conseil central de Yeni Gamoh – ont été arrêtées par le ministère du Renseignement entre janvier et mars 2013, détenues au secret, puis déplacées à la prison centrale de Tabriz.

Elles n’ont pu consulter un avocat qu’une semaine avant leur procès. Un membre de la famille de l’une des cinq personnes a déclaré à Amnesty International qu’elles avaient été torturées et maltraitées pendant leur détention par le ministère du Renseignement. Shahram Radmehr et Behboud Gholizadeh souffrent de problèmes de santé qui nécessitent un traitement médical impraticable en prison. Les autorités ont déclaré à Shahram Radmehr qu’il ne serait autorisé à recevoir son traitement que s’il acceptait de conserver sa tenue de prisonnier, avec des menottes aux poignets et aux chevilles.

Saeed Abedini, un pasteur chrétien irano-américain et résident des États-Unis, a été emprisonné le 26 septembre 2012. Des gardiens de la révolution l’auraient arrêté alors qu’il rendait visite à des parents en Iran. Le 20 janvier 2013, la 26e chambre du tribunal révolutionnaire de Téhéran l’a condamné à une peine de huit ans d’emprisonnement, qu’il purge actuellement à la section 350 de la prison d’Evin, après avoir été reconnu coupable de « former des églises clandestines dans l’intention de nuire à la sécurité nationale ». Après sa condamnation, dans une lettre datant de mars 2013, il a dit à sa famille avoir été torturé et maltraité pendant sa détention, et que le personnel médical de la prison d’Evin avait refusé de le soigner parce qu’il le considérait comme un « impur » ou un « incroyant ». On rapporte qu’il doit recevoir un traitement médical à la suite d’une hémorragie intestinale.

Le 4 juin 2013, le site Majzooban-e Nour (site soufi d’information qui dénonce les atteintes aux droits humains dont sont victimes les derviches), a indiqué que l’un de ses dirigeants, Saleh Moradi, un journaliste derviche nematollahi , avait été condamné à un an d’emprisonnement par le tribunal de Kavar, dans la province du Fars, après avoir été reconnu coupable de « troubler l’opinion publique » et de « troubler l’ordre public ». En outre, le tribunal l’a condamné à un an d’exil intérieur. Au moment de sa condamnation, Saleh Moradi avait déjà été détenu pendant plus d’un an, et a donc été remis en liberté. Selon Majzooban-e Nour, cet homme doit encore comparaître devant le tribunal révolutionnaire de Chiraz pour « propagande contre le régime », « agissements contre la sécurité nationale » et « appartenance au groupe Majzooban-e Nour ».

En avril 2013, la troisième chambre du tribunal révolutionnaire de Chiraz a condamné Kasra Nouri, un autre derviche nematollahi, à quatre années et quatre mois d’emprisonnement après l’avoir reconnu coupable de « propagande contre le régime », d’« agissements contre la sécurité nationale », d’« insultes au Guide » et d’« appartenance au groupe Majzooban-e Nour ». Lui et Saleh Moradi ont été arrêtés vers septembre 2011. Les autorités avaient alors également arrêté sept autres derviches nematollahi qui restent en détention, apparemment sans inculpation ni jugement : Afshin Karampour, Amir Eslami, Farshid Yadollahi, Mostafa Daneshjoo, Hamid Reza Moradi Sarvestani, Omid Behroozi et Reza Entesari. Ces sept personnes ont d’abord été incarcérées à la prison Adel Abad de Chiraz, puis transférées à la section 350 de la prison d’Evin, où elles sont restées jusqu’à leur placement à l’isolement dans la section 209 de la prison, contrôlée par le ministère du Renseignement, en janvier 2013. Elles n’ont été retransférées à la section 350, la section générale, que trois mois plus tard, après que Saleh Moradi et Kasra Nouri eurent entamé une grève de la faim pour protester contre leur situation. On pense que ces personnes et Kasra Nouri souffrent de problèmes de santé aggravés par leurs conditions de détention. Les derviches gonabadi de l’ordre nematollahi ont été confrontés à la répression continue des autorités iraniennes au cours des quatre dernières années.

Cinq membres de la minorité arabe ahwazie d’Iran se trouvent actuellement dans le couloir de la mort à la prison de Karoun dans le Khouzistan, où ils risquent d’être exécutés. Ces cinq hommes – Mohammad Ali Amouri, les frères Sayed Jaber Alboshoka et Sayed Mokhtar Alboshoka, et deux enseignants, Hashem Shabani Amouri et Hadi Rashidi (ou Rashedi) – ont été arrêtés au début de l’année 2011. Ils auraient été torturés et contraints de faire des « aveux » télévisés. Les cinq hommes ont été condamnés à mort le 7 juillet 2012 après avoir été déclarés coupables d’« inimitié à l’égard de Dieu et corruption sur terre », de « rassemblement et collusion contre la sûreté de l’État » et de « propagande contre le régime ». La chambre 32 de la Cour suprême a confirmé leur condamnation à mort le 9 janvier 2013. Au début du mois de juin 2013, on a signalé qu’ils n’étaient plus autorisés à recevoir de visites, ce qui fait craindre l’imminence de leur exécution, les condamnés à mort étant souvent maintenus à l’isolement avant d’être exécutés.


LES MILITANTS ÉTUDIANTS

Ashkan Zahabian, un militant étudiant, a été arrêté par des agents armés du ministère du Renseignement qui se sont rendus à son domicile le 27 mai 2013 et l’ont emmené à la prison de Babol, dans la province du Mazandaran, pour qu’il commence à purger une peine de prison de huit mois. Un tribunal l’avait condamné à cette peine en 2011, après l’avoir reconnu coupable d’« agissements contre la sécurité nationale » et de « propagande contre le régime ». Lors de l’arrestation, il n’avait reçu aucune injonction écrite indiquant qu’il devait commencer à purger cette peine. Amnesty International ne connaît pas à ce jour les raisons de sa mise en détention, mais celle-ci peut être destinée à dissuader d’autres étudiants de participer à des activités politiques. Ashkan Zahabian a déjà été emprisonné pour des raisons politiques : arrêté en juin 2009 pour avoir soutenu la campagne pour l’élection présidentielle de Mehdi Karroubi, il a passé environ trois mois en détention avant d’obtenir une libération sous caution, mais a ensuite été arrêté de nouveau en novembre 2009 et accusé d’« agissements contre la sûreté de l’État par la formation d’une association d’étudiants islamiques dans le nord du pays ». Encore une fois libéré sous caution, il a été condamné par contumace à six mois d’emprisonnement par la 101e chambre du tribunal révolutionnaire de Babol. Il a été arrêté quand il a répondu à une citation à comparaître devant des agents du ministère du Renseignement de Sari, au nord de l’Iran, puis a purgé sa peine de prison de six mois.

Afshin Keshtkari, un militant étudiant et membre fondateur de l’Association des étudiants islamiques de l’Université de technologie de Chiraz, a été cité à comparaître devant le tribunal révolutionnaire de Chiraz, le 18 mai 2013, et ensuite placé dans la prison Adel Abad pour commencer à purger six mois d’une peine de prison de trois ans (la majorité de la peine a été suspendue en appel). Un tribunal l’avait reconnu coupable de « former un groupe illégal avec l’intention de nuire à la sécurité nationale ». Il avait été arrêté le 7 décembre 2010, après une manifestation d’étudiants à l’Université de technologie de Chiraz. Il a été détenu au secret au centre de détention « n° 100 » de Chiraz jusqu’au 1er janvier 2011, puis libéré sous caution. Pendant sa détention, la commission disciplinaire de l’université lui a interdit de poursuivre ses études pendant un semestre.

LES VIOLATIONS DES DROITS HUMAINS AU SEIN DU SYSTÈME PÉNAL

Mazyar Ebrahimi, un homme d’affaires iranien qui a fondé sa propre société de production dans la région du Kurdistan irakien, a été arrêté par des agents du ministère du Renseignement en juin 2012 et détenu au secret. Le 6 août 2012, la chaîne de télévision publique IRTV1 a diffusé un documentaire de près de 40 minutes intitulé « Le club de la terreur » dans lequel Mazyar Ebrahimi faisait partie d’un groupe de 12 détenus, hommes et femmes, « avouant » leur participation dans les assassinats, depuis 2010, de scientifiques et universitaires iraniens spécialistes du nucléaire. Outre ces « aveux » qui auraient été obtenus sous la torture ou la contrainte, le documentaire ne contenait pas d’autres preuves de l’implication des détenus dans ces homicides. En mai 2013, Gholamhossein Mohseni Ejei, le procureur général de Téhéran et porte-parole judiciaire, aurait annoncé qu’un procès à huis clos de 44 personnes accusées d’implication dans les meurtres de ces scientifiques avait commencé, mais sans divulguer l’identité des accusés. Mazyar Ebrahimi et d’autres détenus ayant présenté leurs « aveux » dans l’émission « Le club de la terreur » pourraient faire partie des personnes visées, mais cela reste à confirmer.

Sept mois après la mort en détention du blogueur Sattar Beheshti, les autorités iraniennes n’ont pas encore trouvé de responsable de sa mort. Dès l’arrestation de Sattar Beheshti, le 30 octobre 2012, à son domicile par la cyberpolice, ses proches n’ont plus eu aucun contact avec lui jusqu’au 6 novembre 2012 ; ce jour-là, ils ont reçu un appel téléphonique leur demandant de venir récupérer son corps au centre de détention de Kahrizak. Après son arrestation, il avait passé une nuit dans la section 350 de la prison d’Evin et déposé une plainte officielle, alléguant que ses interrogateurs l’avaient torturé en détention provisoire. La Commission Sécurité nationale et politique étrangère du Parlement iranien et le Conseil supérieur des droits de l’homme, ont ouvert, entre autres organismes, des enquêtes sur sa mort. Mais jusqu’à présent, et malgré un certain nombre d’arrestations, personne n’a été inculpé à la suite de cette affaire. Certains membres de la famille de Sattar Beheshti ont été menacés d’être arrêtés s’ils évoquaient cette affaire avec les médias.

RECOMMANDATIONS AUX AUTORITÉS IRANIENNES

· libérer immédiatement et sans condition tous les prisonniers d’opinion et abandonner toutes les charges contre les personnes risquant un procès pour avoir exercé pacifiquement leurs droits à la liberté d’expression, d’association ou de réunion ;

· libérer tous les autres détenus à moins qu’ils ne soient inculpés d’une infraction dûment reconnue par la loi et jugés dans le respect des normes internationales d’équité des procès et sans avoir recours à la peine de mort ;

· tous les détenus doivent être autorisés à être en relation avec un avocat de leur choix, dès leur arrestation et de manière régulière par la suite, à être en contact avec leurs proches et à recevoir tout traitement médical dont ils pourraient avoir besoin ; tous doivent être protégés contre la torture et les autres formes de mauvais traitements ;

· revoir de toute urgence et modifier ou abroger les lois iraniennes qui empiètent sur les droits à la liberté d’expression, d’association et d’assemblée, définis dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et d’autres traités internationaux auxquels l’Iran est un État partie ;

· permettre à tous les individus et groupes d’exercer pacifiquement leurs droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion, y compris par des moyens différents des politiques et pratiques de l’État ; le libre exercice de ces droits peut prendre une importance particulière en période de campagne électorale ;

· instaurer un moratoire immédiat sur toutes les exécutions, commuer toutes les peines de mort en peines d’emprisonnement et entamer une démarche visant à abolir la peine capitale pour tous les crimes ;

· autoriser un contrôle international de la situation des droits humains en Iran, y compris en permettant les visites du Rapporteur spécial de l’ONU sur l’Iran et d’autres experts/mécanismes des droits humains des Nations unies ayant demandé des visites, et d’autres organisations indépendantes de défense de ces droits, comme Amnesty International.

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