Iran. Un homme aurait été lapidé à mort : indignée, Amnesty International craint que la coaccusée de la victime ne subisse le même sort.

Déclaration publique

MDE 13/083/2007

Ce lundi 9 juillet 2007, Amnesty International a fait part de son indignation en apprenant que Jafar Kiani aurait été exécuté par lapidation le 5 juillet, dans le village d’Aghche-kand, près de la ville de Takestan, dans la province iranienne de Qazvin. L’organisation a exhorté le chef du pouvoir judiciaire, l’ayatollah Hashemi Shahroudi, à intervenir immédiatement pour empêcher la lapidation de Mokarrameh Ebrahimi, déclarée coupable dans le cadre de la même affaire.

Jafar Kiani et Mokarrameh Ebrahimi ont été condamnés à mort par lapidation après avoir été reconnus coupables d’adultère. Aux termes de l’article 83 du Code pénal iranien, l’exécution par lapidation est la peine prévue pour un adultère commis par un homme marié ou une femme mariée. Selon le droit iranien, l’adultère peut être prouvé par les déclarations de témoins oculaires (le nombre exigé varie selon les types d’adultère), des aveux faits par l’accusé (répétés quatre fois) ou la « connaissance » de cet adultère par le juge. Dans ce dossier, la culpabilité pour adultère se fondait sur la « connaissance » du juge. Le couple était incarcéré depuis onze ans à la prison de Choubin et leurs deux enfants vivraient en détention avec leur mère. Leur appel devant la Commission judiciaire des grâces ayant été rejeté, Jafar Kiani et Mokarrameh Ebrahimi devaient être lapidés le 17 juin 2007 – mais leur mise à mort a été reportée au 21 juin. Elle devait avoir lieu en public, dans le cimetière de Behesht-e Zahra, en présence du juge de la première chambre du tribunal pénal qui les a condamnés à mort.

Cependant, leur exécution a une nouvelle fois été repoussée après que des militants impliqués dans la campagne Stop aux lapidations pour toujours ! en Iran eurent révélé la situation tragique du couple. En outre, le gouvernement iranien a fait l’objet de fortes pressions internes et internationales, notamment de la part d’Amnesty International, visant à empêcher ces lapidations. Dans l’après-midi du 20 juin, on a appris que le responsable du pouvoir judiciaire, l’ayatollah Shahroudi, avait transmis par écrit aux autorités judiciaires de Takestan l’ordre de différer cette exécution. Toujours condamné à la lapidation, le couple ne semblait plus risquer d’exécution imminente.

Aussi ce fut un choc lorsque des militants de la campagne Stop aux lapidations pour toujours ! ont annoncé le 7 juillet que Jafar Kiani avait été mis à mort par lapidation deux jours auparavant, à Aghche-kand. Selon certaines informations, la lapidation a été essentiellement conduite par des responsables du gouvernement local et des autorités judiciaires locales, et seules quelques personnes parmi le public y ont participé.

Le 8 juillet, le quotidien Etemad-e Melli rapportait que des habitants du secteur et une source proche de l’un des représentants parlementaires locaux avaient confirmé l’exécution, alors que les autorités judiciaires se sont jusqu’à présent abstenues de toute déclaration.

Amnesty International demande au responsable du pouvoir judiciaire de déterminer sans délai si Jafar Kiani a été exécuté par lapidation le 5 juillet et, le cas échéant, si cette exécution a eu lieu en violation du sursis qu’il avait décrété.

En outre, l’organisation l’invite, ainsi que d’autres responsables iraniens, à prendre immédiatement les mesures qui s’imposent afin d’empêcher l’exécution de Mokarrameh Ebrahimi, coaccusée de Jafar Kiani, et de commuer sa condamnation à mort sans délai.

Amnesty International s’oppose dans tous les cas à la peine de mort, qui constitue le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit. L’exécution par lapidation aggrave encore la brutalité de la peine, car elle est spécifiquement conçue dans le but d’augmenter les souffrances de la victime, les pierres étant délibérément choisies suffisamment grosses pour infliger de la douleur mais pas assez pour tuer la victime sur-le-champ.

Amnesty International invite également le gouvernement iranien à annuler toutes les exécutions par lapidation et à imposer un moratoire dans l’attente d’une abrogation ou d’une modification de l’article 83 du Code pénal. D’après les informations dont dispose l’organisation, d’autres personnes sont elles aussi condamnées à mort par lapidation en Iran : Ashraf Kalhori (f), Iran (f), Khayrieh (f), Shamameh Ghorbani (également connue sous le nom de Malek) (f), Kobra N. (f), Soghra Molai (f), Fatemeh (f) et Abdollah F. (h). L’organisation demande la commutation de toutes les condamnations à mort par lapidation en Iran.

Amnesty International s’oppose également à la criminalisation des relations sexuelles entre adultes consentants, dans un cadre privé, et demande instamment aux autorités iraniennes de revoir toutes les lois relatives à cette question afin de décriminaliser ces relations.

Complément d’information
En décembre 2002, l’ayatollah Shahroudi, responsable du pouvoir judiciaire, aurait adressé aux juges une décision ordonnant un moratoire sur les exécutions par lapidation, dans l’attente d’une modification permanente de la loi, envisagée semble-t-il par le Guide suprême de l’Iran, l’ayatollah Ali Khamenei.

Toutefois, en septembre 2003, une loi concernant l’application de certains châtiments, notamment la lapidation, a été adoptée, qui a manifestement affaibli ce moratoire. Amnesty International a continué par ailleurs à recevoir des informations faisant état de condamnations à la lapidation, même si aucune exécution ne semble avoir eu lieu avant mai 2006, lors de la lapidation d’une femme et d’un homme. Mahboubeh (f) et Abbas (h) les deux victimes, auraient été lapidés dans un cimetière de Meched, après avoir été déclarés coupables du meurtre du mari de Mahboubeh et d’adultère – accusation passible de la peine de mort. Une partie du cimetière avait été fermée au public et plus d’une centaine de gardiens de la révolution et de bassidji (miliciens volontaires), qui avaient été invités à assister à l’exécution, auraient participé à la lapidation à mort du couple.

Le 21 novembre 2006, l’ancien ministre de la Justice Jamal Karimi-Rad a nié que des lapidations se déroulent en Iran, déclaration reprise le 8 décembre 2006 par le chef de l’administration pénitentiaire de Téhéran. Les militants qui font campagne contre la lapidation ont répondu qu’il existait des preuves irréfutables que la lapidation de Meched avait bien eu lieu.

À la mi-2006, un groupe iranien de défenseurs des droits humains a entamé une campagne en vue de l’abolition de la lapidation, en s’appuyant sur les cas de onze personnes condamnées à ce châtiment. Depuis le début de cette campagne, trois personnes ont été sauvées de la lapidation : Hajieh Esmailvand (f), Parisa (f) et Najaf (h). D’autres ont obtenu un sursis et certains dossiers sont même réexaminés, voire rejugés.

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