Amnesty International a demandé aux autorités iraniennes d’ouvrir sans délai une enquête impartiale sur les circonstances de la mort de Haleh Sahabi, militante des droits des femmes et membre de l’organisation Mères pour la paix. L’organisation a lancé cet appel dans une lettre adressée au responsable du pouvoir judiciaire le 2 juin 2011. Haleh Sahabi est morte après avoir été, semble-t-il, frappée par un membre des forces de sécurité dans la matinée du 1er juin 2011, lors des funérailles de son père, Ezzatollah Sahabi, ancien parlementaire et dirigeant de l’Alliance nationale religieuse.
Amnesty International a reçu le témoignage d’une personne présente lors des événements, qui indique que Haleh Sahabi a été malmenée par un ou plusieurs membres des forces de sécurité, et frappée après qu’elle eut refusé de se dessaisir d’une photographie de son père qu’elle tenait à la main. D’autres récits viennent confirmer ce témoignage, telle la relation des faits par Ahmed Montazeri, le fils du grand ayatollah Montazeri (aujourd’hui décédé), qui a affirmé dans une interview accordée à la BBC que Haleh Sahabi était morte après avoir été frappée par des membres des forces de sécurité. Les sources officielles iraniennes ont cherché à minimiser la responsabilité des forces de sécurité. La télévision nationale a ainsi diffusé l’interview d’un membre du personnel paramédical qui aurait porté secours à Haleh Sahabi et selon qui celle-ci s’est évanouie, puis a succombé, selon toute apparence à un arrêt cardiaque, lors de son transfert à l’hôpital.
Les obsèques de Haleh Sahabi ont été organisées par les forces de sécurité et se sont tenues le jour de sa mort, à 22 heures. Aucune autopsie n’a été pratiquée. Selon certaines informations, plusieurs personnes présentes ont été arrêtées lors des funérailles. Amnesty International condamne l’intervention des forces de sécurité durant les deux cérémonies, qui a provoqué un traumatisme supplémentaire chez les proches des défunts.
Considérée comme une prisonnière d’opinion par Amnesty International, Haleh Sahabi purgeait une peine de deux années d’emprisonnement prononcée à la suite de son arrestation en août 2009 lors d’une manifestation pacifique organisée en signe de protestation contre la prise de fonction du président Ahmadinejad. Selon certaines informations, elle avait été frappée au moment de son interpellation. Remise en liberté sous caution à la mi-août 2009, elle avait ensuite été condamnée à deux années d’emprisonnement et à une peine de flagellation pour « propagande contre le régime en raison d’une présence répétée à des rassemblements illégaux, et troubles à l’ordre public ». La 54e chambre de la Cour d’appel avait confirmé la peine d’emprisonnement en mai 2010, mais commué la sentence de flagellation en une amende. Haleh Sahabi avait commencé à purger la peine de prison en janvier 2011. Elle avait obtenu une permission de sortie exceptionnelle afin de se rendre au chevet de son père mourant.
Amnesty International pense que la façon dont les forces de sécurité se sont comportées vis-à-vis de Haleh Sahabi a pu provoquer sa mort, directement ou au moins indirectement. Celle-ci doit par conséquence faire l’objet sans délai d’une enquête impartiale, conformément aux Principes de l’ONU relatifs à la prévention efficace des exécutions extrajudiciaires, arbitraires et sommaires et aux moyens d’enquêter efficacement sur ces exécutions. L’article 9 de ces Principes prévoit qu’« une enquête approfondie et impartiale sera promptement ouverte dans tous les cas où l’on soupçonnera des exécutions extrajudiciaires, arbitraires et sommaires, y compris ceux où des plaintes déposées par la famille ou des informations dignes de foi donneront à penser qu’il s’agit d’un décès non naturel dans les circonstances données ». Toute personne pour laquelle des éléments sérieux montrent qu’elle a provoqué illégalement la mort de Haleh Sahabi doit être traduite en justice, lors d’une procédure excluant le recours à la peine de mort.
Dans la lettre adressée au responsable du pouvoir judiciaire, Amnesty International a également demandé des informations sur les personnes qui ont été arrêtées lors des funérailles d’Ezzatollah Sahabi. Selon les informations en possession de l’organisation, il y aurait parmi elles Habibollah Peyman, membre influent de l’Alliance nationale religieuse et membre du Comité national pour la paix, une organisation qui appelle à la fin du recours à la violence en Iran, Hamed Montazeri, le petit-fils du défunt grand ayatollah Montazeri, et Hamid Ehrari. Certains de ces hommes, si ce n’est tous, ont peut-être été remis en liberté entre temps. Amnesty International a demandé qu’on lui communique le nom de toutes les personnes arrêtées, le lieu où elles sont détenues (si elles n’ont pas encore été remises en liberté) et le détail des charges qui sont, ou sont susceptibles d’être, retenues contre elles. L’organisation a exhorté les autorités à remettre en liberté immédiatement et sans condition toute personne qui serait détenue pour le simple fait d’avoir exercé son droit à liberté de réunion. En attendant, toute personne encore détenue doit être autorisée sans délai à être en contact avec sa famille et un avocat de son choix, et être protégée contre la torture et toute autre forme de mauvais traitements.