Israël et territoires palestiniens occupés : Il faut lever l’interdiction de voyager enfreignant les droits d’un défenseur des droits humains


Déclaration publique

Index AI : MDE 15/026/2008 -

ÉFAI

Amnesty International trouve regrettable que les autorités israéliennes persistent à refuser de laisser Shawan Jabarin, un éminent défenseur palestinien des droits humains, voyager hors des territoires palestiniens occupés, et demande la levée immédiate de cette restriction.

Depuis mars 2006, Shawan Jabarin, directeur général d’Al Haq, une organisation palestinienne de défense des droits humains, n’est plus autorisé à quitter les territoires palestiniens occupés. Cette interdiction de voyager imposée par l’armée israélienne l’a empêché d’assister à plusieurs conférences et autres manifestations organisées à l’étranger en rapport avec les droits humains, et elle continue à entraver son importante action en faveur de ces droits dans les territoires palestiniens occupés.

Les autorités israéliennes soutiennent que l’interdiction de quitter la Cisjordanie imposée à Shawan Jabarin est motivée par des « raisons de sécurité ». Elles n’ont cependant inculpé cet homme d’aucune infraction et ont refusé de fournir à l’intéressé ou à ses avocats des informations au sujet de ces « raisons de sécurité » présumées, le privant ainsi de toute chance réelle de contester l’interdiction.

Amnesty International est préoccupée par le fait que cette interdiction de voyager porte atteinte au droit de circuler librement et au droit à la liberté d’association dont Shawan Jabarin dispose, ainsi qu’à son droit de recevoir et de répandre des informations – qui sont garantis par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP, articles 12, 19 et 21), auquel Israël est partie. Elle est également contraire aux droits inscrits dans la Déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l’homme (articles 6, 17 et 9).

Si le droit de circuler librement peut être restreint dans certaines circonstances précises, le Comité des droits de l’homme des Nations unies (l’organe chargé de veiller à l’application du PIDCP par les États) a précisé que « les limitations pouvant être imposées aux droits énoncés à l’article 12 ne doivent pas rendre sans objet le principe de la liberté de circulation » et que « le rapport entre le droit et la restriction, entre la règle et l’exception, ne doit pas être inversé » (Observation générale n° 27).
Le Comité des droits de l’homme a déclaré que toute restriction du droit d’un individu de circuler librement doit être justifiée par les États (Observation générale n° 27).

Le fait que les autorités n’acceptent de fournir aucune information expliquant pourquoi elles considèrent que Shawan Jabarin représente une « menace à la sécurité » prive celui-ci de toute véritable possibilité de contester cette interdiction, et porte donc atteinte à son droit à une procédure régulière, ainsi qu’à son droit à la liberté de circuler librement.

Shawan Jabarin a introduit auprès de la Haute Cour de justice israélienne une requête sollicitant la révocation de cette interdiction de voyager ; une audience relative à ce cas doit se tenir le 3 juillet 2008. Deux demandes précédentes ont été rejetées par la Haute Cour, en décembre 2006 et juin 2007. Dans les deux cas, ni Shawan Jabarin, ni son avocat n’ont pu consulter les informations soumises par l’armée à la cour.

Complément d’information

Avant que ne soit prononcée l’actuelle interdiction de voyager, en 2006, Shawan Jabarin s’est vu refuser en 2004 la permission de quitter la Cisjordanie dans le but de se rendre en Irlande pour passer sa maîtrise à l’université de Galway. À cette occasion également, l’interdiction avait été prononcée en vertu d’une décision administrative sans que les autorités militaires israéliennes ne fournissent à Shawan Jabarin ou à son avocat un quelconque élément de preuve étayant ce choix. Cependant, après que Shawan Jabarin eut entamé une action dans le but de solliciter l’annulation de cette interdiction par la Cour suprême israélienne, les autorités militaires israéliennes ont cédé du terrain et déclaré qu’elles l’autoriseraient à quitter la Cisjordanie s’il s’engageait à résider à l’étranger pendant trois années en continu, sans revenir en Cisjordanie. Il a refusé cette proposition et l’armée a finalement accepté de lui permettre de quitter la Cisjordanie, à condition qu’il reste à l’étranger pendant un an, ce à quoi il a consenti, ses études réclamant qu’il se trouve en Irlande pour cette durée. Il est rentré en Cisjordanie au bout d’un an, en 2005, après avoir obtenu une maîtrise en droits humains à l’université de Galway.

En mars 2006, les autorités militaires israéliennes ont empêché Shawan Jabarin de quitter la Cisjordanie et l’ont convoqué au poste de police de Gush Etzion, près de Bethléem. Une fois sur place, le 26 mars 2006, des membres des forces de sécurité lui ont dit de se mettre torse nu. Il a refusé, considérant que cet ordre était injustifié et humiliant, à la suite de quoi les membres des forces de sécurité israéliennes ont confisqué sa carte d’identité. Elle ne lui a été rendue qu’en juillet 2006, après qu’une organisation israélienne de défense des droits humains eut porté la question à la connaissance des autorités israéliennes.

Al Haq, l’une des principales organisations palestiniennes de défense des droits humains, a été fondée en 1979 ; elle est basée à Ramallah, en Cisjordanie occupée. Elle s’est vu accorder un statut consultatif auprès du Conseil économique et social des Nations unies (ECOSOC), et est membre de plusieurs organisations internationales majeures de défense des droits humains, dont la Fédération internationale des Ligues des droits de l’homme, l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et la Commission internationale de juristes (CIJ).

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