La condamnation à une peine de deux années d’emprisonnement prononcée le 24 février contre six jeunes militants congolais témoigne clairement de la répression croissante exercée contre les voix indépendantes et la société civile, et elle incite à s’interroger une fois de plus sur l’indépendance du système judiciaire en RDC, a déclaré Amnesty International.
« Ces six personnes doivent être remises en liberté immédiatement et sans condition car elles n’auraient jamais dû être arrêtées. Elles ont le droit de protester contre le retard affectant la préparation des élections », a déclaré Sarah Jackson, directrice régionale adjointe pour l’Afrique de l’Est, la Corne de l’Afrique et les Grands Lacs à Amnesty International.
Ces six personnes – cinq hommes et une femme : Rebecca Kavugho, Serge Sivyavugha, Justin Kambale Mutsongo, Melka Kamundu, John Anipenda et Ghislain Muhiwa – ont été arrêtées le 16 février alors qu’elles préparaient une grève générale à l’appel de dirigeants de l’opposition et d’organisations de la société civile.
Elles sont membres de Lutte pour le changement (Lucha), un mouvement de jeunes qui a été créé en 2012 à Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu.
Ce mouvement de grève, baptisé Ville Morte, a été organisé pour protester contre, selon l’opposition et des organisations de la société civile, le projet du président Joseph Kabila de rester au pouvoir en briguant de façon anticonstitutionnelle un troisième mandat ou de retarder les élections.
Dans un récent rapport intitulé Ils sont traités comme des criminels : la RDC fait taire des voix discordantes, Amnesty International montre que les autorités ont utilisé le système judiciaire pour réprimer les voix dissidentes. Cette récente condamnation en est un nouvel exemple.
Amnesty International considère ces six personnes comme des prisonniers d’opinion, détenus uniquement pour avoir exercé pacifiquement leurs droits aux libertés d’expression et de réunion pacifique.
Complément d’information
Les six militants ont été déclarés coupables de tentative d’incitation à la désobéissance publique. Leurs avocats ont dit qu’ils allaient se pourvoir en appel.
Le président Joseph Kabila est à la tête du pays depuis 2001. La Constitution de la RDC limite à deux le nombre de mandats présidentiels consécutifs. À l’approche des élections de novembre 2016, les appels réclamant le départ du président Joseph Kabila se font de plus en plus nombreux, tandis que la répression de la dissidence s’intensifie.
LUCHA organise des sit-ins, des manifestations et d’autres actions dans le cadre de la campagne qu’il mène pour demander aux autorités de respecter le calendrier prévu par la Constitution pour les élections, et au président de respecter les limites définies par la Constitution en ce qui concerne le mandat présidentiel.
Le gouvernement accuse LUCHA d’être un mouvement criminel dont l’objectif serait de troubler l’ordre public. Au moins 19 de ses membres et sympathisants sont actuellement détenus.