Kenya. Amnesty International condamne les violences post-électorales

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Bulletin 11/002/2008

Amnesty International a condamné avec force ce jeudi 3 janvier les homicides à caractère politique dont le nombre n’a cessé d’augmenter au cours de ces derniers jours ; de nombreux civils ont été tués dans différentes régions du Kenya par des groupes de jeunes armés. L’organisation a fait part de son inquiétude face à ces violences de plus en plus motivées par des considérations ethniques.

Amnesty International a appelé le gouvernement et les dirigeants des partis politiques kenyans à prendre toutes les mesures possibles susceptibles de mettre immédiatement un terme aux violences et à s’engager publiquement à respecter et protéger les droits de tous les citoyens.


« Les dirigeants politiques ne doivent ni explicitement ni implicitement approuver les violences à l’égard de partisans supposés de leurs rivaux »
, a déclaré Erwin van der Borght, directeur du programme Afrique d’Amnesty International.

Amnesty International s’inquiète également du nombre continu de rapports faisant état d’homicides commis par des policiers. Une personne aurait été abattue ce jeudi 3 janvier lors d’accrochages entre policiers et manifestants à Mombasa. Le 31 décembre, Amnesty International avait déjà critiqué le recours excessif à la force par des policiers, à l’origine de la mort de manifestants anti-gouvernementaux.

À ce jour, plus de 300 personnes auraient été tuées au cours des violences qui ont éclaté après la proclamation des résultats contestés du scrutin présidentiel. Parmi les victimes, plus de 30 personnes – majoritairement des femmes et des enfants qui tentaient d’échapper à des jeunes armés – sont mortes brûlées lorsque l’église où elles s’étaient réfugiées a été délibérément incendiée, dans la ville d’Eldoret, dans la vallée du Rift le 1er janvier.

Le personnel médical de l’hôpital pour femmes de Nairobi a également fait état d’un nombre accrû de viols de femmes et de jeunes filles, perpétrés par des bandes ou des individus isolés dans la cadre des violences post-électorales.

Les violences commises dans certaines régions ayant connu des conflits ethniques dans le passé semblent avoir été le fait d’émeutiers qui s’en seraient pris à des Kikuyus, ethnie dont est issu le président Kibaki, manifestement pour se venger de la fraude électorale qu’ils soupçonnent être à l’origine de la réélection de Kibaki.

On compte plus de 75 000 personnes déplacées à l’intérieur du pays en raison des violences politiques.

« Le gouvernement kenyan doit organiser rapidement une assistance humanitaire pour venir en aide aux personnes déplacées et assurer la sécurité des travailleurs humanitaires », a déclaré Erwin van der Borght.

Des barrages routiers improvisés ont été mis en place par des bandes armées de jeunes gens, équipés de machettes, de bâtons ou de pierres. Certaines des personnes déplacées ont été évacuées par le gouvernement kenyan sous escorte militaire ou par avion vers des lieux sûrs, d’Eldoret notamment vers Nairobi et d’autres régions du Kenya. Des milliers de personnes auraient fui en direction des pays voisins, l’Ouganda notamment.


Complément d’information

Le 27 décembre se sont tenues au Kenya des élections présidentielle et législatives. Le 30 décembre, la Commission électorale officielle kenyane a annoncé la victoire du président sortant Mwai Kibaki sur le candidat de l’opposition Raila Odinga au scrutin présidentiel. Le Mouvement démocratique orange (ODM, Orange Democratic Movement) de Raila Odinga, a obtenu une large majorité aux législatives, devançant le Parti de l’unité nationale (PNU, Party of National Unity) de Mwai Kibaki et d’autres formations, mais a contesté sa défaite annoncée à l’élection présidentielle.

Mwai Kibaki a rapidement prêté serment après l’annonce de sa victoire officielle le 30 décembre. Des observateurs ont mis en doute la crédibilité des opérations de dépouillement et le décompte des voix pour le scrutin présidentiel ; la présidence de la Commission électorale kenyane a elle-même émis des doutes récemment. Alors que la tension politique augmentait, le gouvernement a interdit la diffusion en direct des résultats de l’élection par les médias kenyans ; cette interdiction n’est toutefois pas respectée en pratique. Le gouvernement a déployé des forces de sécurité dans de nombreuses régions. La police et l’armée ont commencé à protéger la population des émeutiers dans certaines zones et dispersé des manifestations violentes dans d’autres. Le gouvernement avait interdit une grande manifestation de l’ODM prévue le 3 janvier à Nairobi et dans plusieurs autres villes ; les manifestants ont été empêchés de se rassembler par la police qui a fait usage de gaz lacrymogènes et de canons à eau.

Des efforts diplomatiques sont en cours au niveau international et régional, notamment par l’Union africaine et par Desmond Tutu, archevêque sud-africain ; des ONG kenyanes s’efforcent aussi de trouver une solution pour sortir de l’impasse politique actuelle et pour endiguer la violence.

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