À l’annonce du jugement, des violences ont éclaté dans les bastions de l’opposition, notamment dans les bidonvilles de Mathare et Kibera, à Nairobi, ainsi qu’à Migori et Kisumu, dans l’ouest du pays. La Cour suprême a, en effet, rejeté les deux requêtes qui visaient à faire invalider les résultats du nouveau scrutin, qui s’était tenu le 28 octobre. Selon les premières informations, quatre personnes ont été tuées dans les affrontements.
Un témoin a indiqué à Amnesty International que des groupes de jeunes hommes avaient fouillé des logements du quartier de Kondele, à Kisumu, le 20 novembre. Ils cherchaient les personnes appartenant au groupe ethnique kikuyu, les harcelaient et pillaient leurs habitations. Il a ajouté que trois groupes avaient essayé d’entrer dans sa cour et que le portail de son voisin avait été détruit ; sa famille et lui avaient été contraints de s’enfuir pour se mettre à l’abri. Par ailleurs, les médias ont relaté que des manifestants avaient tenté d’incendier le poste de police de Kondele.
« Au cours des derniers jours et mois, la police a tiré aveuglément sur la foule lors de rassemblements, faisant des morts et des blessés. S’il est du devoir de la police kényane de protéger la population contre les violences, elle doit le faire tout en respectant le droit national et international. L’élection a fait couler assez de sang. Il ne faut pas que d’autres vies soient perdues inutilement parce que la police aura eu recours à la force de manière excessive », a déclaré Justus Nyang’aya, directeur d’Amnesty International Kenya.
Amnesty International a confirmé qu’au moins six personnes, dont une femme de 29 ans et un jeune homme de 18 ans, avaient été tuées à Nairobi la veille de la décision de la Cour suprême, lors d’attaques que les partisans de l’opposition ont attribuées à la police et à une présumée milice progouvernementale. La police a nié toute responsabilité mais son enquête est en cours.
Le 17 novembre, au moins cinq personnes ont trouvé la mort lorsque la police a tiré sans discernement sur des partisans du dirigeant de l’opposition Raila Odinga, qui s’étaient réunis pour lui souhaiter la bienvenue à son retour des États-Unis.
« Maintenant que le président Uhuru Kenyatta a été déclaré vainqueur, sa priorité doit être d’endiguer les violences et de veiller à ce que tous les Kenyans soient protégés et voient leurs droits respectés, a déclaré Justus Nyang’aya.
« La police est certes chargée de maintenir l’ordre mais les manifestants doivent pouvoir s’exprimer librement et pacifiquement, sans craindre que des agents ne tirent sur eux ou ne leur fassent du mal. Les policiers sont tenus de respecter les dispositions du droit international qui interdisent l’utilisation d’armes à feu, sauf en cas de légitime défense ou s’il s’agit de protéger quelqu’un contre un risque immédiat de mort ou de blessure grave. »
« Si le président Kenyatta entend résorber les divisions créées par les urnes, il doit aussi faire en sorte que les dizaines de kenyans tués ou blessés lors des violences ou du fait du recours excessif à la force par la police, qui a entaché le cycle électoral en 2017, obtiennent justice et que des comptes leur soient rendus. »
Au cours de l’année, des dizaines de personnes ont été tuées dans les violences liées à l’élection, au moins 33 d’entre elles ayant été abattues par la police.