Communiqué de presse

Kenya. Il faut de toute urgence légiférer pour faire cesser les expulsions forcées

L’État kényan doit immédiatement arrêter les expulsions tant que des garanties légales n’ont pas été mises en place pour protéger les droits humains des milliers d’habitants de bidonvilles et de quartiers informels qui sont concernés, a déclaré Amnesty International.

« Près de la moitié des habitants de Nairobi vivent dans des bidonvilles et nombre d’entre eux risquent d’être expulsés de force ; non seulement les expulsions jettent souvent les gens à la rue, sans abri, mais en outre elles peuvent s’accompagner de violences et entraîner la perte de l’accès à des services tels que l’eau et l’assainissement, aux moyens de subsistance, à l’éducation et aux soins, a dit Iain Byrne, responsable de l’équipe Droits économiques, sociaux et culturels d’Amnesty International.

« Les expulsions forcées sont dramatiques et doivent être prohibées par la loi. »

Pour marquer la Journée mondiale de l’habitat, un nouveau rapport d’Amnesty International intitulé We are like rubbish in this country (voir document ci-dessous) décrit la vie quotidienne dans les bidonvilles de Nairobi et ce qu’implique être expulsé de force. Le rapport porte sur deux quartiers d’habitat précaire, Deep Sea et City Carton.

À City Carton, près de l’aéroport Wilson, les logements de 400 familles ont été démolis en mai 2013 par des groupes d’hommes armés de marteaux, de pieds-de-biche et de machettes. Les policiers présents sur les lieux pendant les opérations ont fait usage de gaz lacrymogènes et de balles réelles.

D’après des éléments collectés par Amnesty International, des doutes sérieux subsistent quant à la nécessité et à la proportionnalité du recours à la force et aux armes à feu par la police.

Amnesty International a également constaté que les démolitions de logements à City Carton ne reposaient sur aucun fondement juridique, et que la police n’a rien fait pour arrêter les opérations ni pour protéger les habitants contre les hommes armés.

« En laissant ces hommes détruire des habitations à City Carton, la police a manqué à son devoir de protéger les habitants, et en faisant usage d’une force qui n’était pas nécessaire elle a effectivement donné son assentiment à l’opération d’éviction », a indiqué Iain Byrne.

Cinq mois après les démolitions, des centaines de personnes dorment toujours dans des abris de fortune et leurs conditions de vie déjà précaires ont nettement empiré. Depuis la destruction des installations sanitaires elles n’ont pas accès à un réseau d’assainissement, elles ont perdu leurs moyens de subsistance et des enfants ne peuvent plus aller à l’école. À ce jour elles se sont vu refuser les recours et l’assistance judiciaires auxquels elles ont légalement droit.

Le rapport d’Amnesty International met aussi l’accent sur la vulnérabilité des communautés comme celle de Deep Sea, dans le quartier de Westlands. Les logements et les sources de revenus des habitants de Deep Sea risquent fort d’être démolis pour laisser la place à une route qui traversera le principal marché du bidonville.

Le projet de construction de la route conçu par l’Autorité de la voirie urbaine du Kenya (KURA) est en train de se concrétiser, financé en partie par l’Union européenne. Il y a certes eu quelques échanges limités avec la KURA, mais les habitants de Deep Sea n’ont pas été impliqués dans de véritables consultations sur des solutions autres que les expulsions, ni sur d’éventuelles mesures de relogement.

En l’absence d’informations réelles sur le projet de route, les résidents craignent à tout moment de se retrouver à la rue.

« Les autorités kényanes sont tenues de respecter les garanties prévues par la loi, notamment de mener une véritable consultation auprès des communautés concernées. Un manquement à cette obligation à Deep Sea pourrait se traduire par des expulsions forcées, c’est-à-dire des violations des droits humains », a ajouté Iain Byrne.

La Constitution du Kenya reconnaît spécifiquement le droit à un logement convenable. Cela étant, au vu de l’ampleur et de la fréquence des expulsions forcées au Kenya, il faut de toute urgence adopter des lois qui prohibent explicitement ces mesures.

« Les normes internationales relatives aux droits humains sont sans équivoque : les expulsions forcées sont contraires à la loi, elles ne se justifient jamais et elles constituent une atteinte grave au droit au logement, sans parler des autres droits tels que le droit à la vie, à l’alimentation, à la santé et à l’assainissement », a dit Iain Byrne.

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